L’industrie agrochimique a du souci à se faire. L'entrée de Beyond Meat menace ses activités.
L’industrie agrochimique a du souci à se faire. L’entrée en force d’entreprises telles que Beyond Meat ou Impossible Foods dans le marché menace les activités de géants tels que Bayer AG, selon un rapport de la société mondiale de gestion d’actifs, Alliance Bernstein.
Rappelons que la production de 1kg de viande nécessite 10kg de maïs et 0,2kg de soja. Presque 60% de la production mondiale de maïs et 90% de celle du soja servent à l’alimentation animale. Donc, si la vente des viandes diminue, notamment parce que les consommateurs se dirigent vers des alternatives à la viande comme Beyond Meat, le besoin de maïs et de soja diminue, ainsi que les produits chimiques qui y sont rattachés. Ces derniers constituent une grande partie des revenus des entreprises qui les fournissent, comme Bayer AG.
Le rapport d’Alliance Bernstein stipule que si la pénétration dans le marché des viandes alternatives à base de plantes atteint 15% d’ici 2028 (il est maintenant à 5%), la demande de maïs diminuera de 7% et celle du soja de 3%.
« On voit un risque modeste à moyen terme, mais ces entreprises doivent planifier la gestion de ce problème à long terme », a déclaré Gunther Zechmann, un des analystes d’Alliance Bernstein, responsable du rapport.
La diminution de la demande de maïs et de soja aura pour conséquence directe l’augmentation de leurs inventaires. L’accumulation de stocks exerce alors une pression sur les prix, ce qui influence les tendances de dépenses des agriculteurs qui sont « plus sensibles au prix plutôt qu’à l’utilisation des nouvelles technologies », selon le rapport.
Encore plus de difficultés pour certaines
Bayer AG, le numéro 2 mondial des pesticides et des semences génétiquement modifiées, souffrira certainement de cette diminution de demande, mais pas autant que ses concurrents, notamment Corteva, selon l’étude.
« Dans le très long terme, avec la réduction de la demande de cultures servant à l’alimentation animale, on s’attendrait à ce que ces entreprises se tournent vers les fruits et les légumes pour remplacer le maïs et le soja. Heureusement pour Bayer, ils ont déjà une position forte dans cette catégorie, pendant que Corteva a besoin de la construire », affirme M. Zechmann.
Pour DSM et Evonik, spécialisée dans les engrais, le défi est plus grand. Environ 33% des ventes de DSM et 30% de celles d’Evonik sont dédiées à l’alimentation animale. Ce qui veut dire qu’une diminution de la demande due à une diminution de consommation de viande affecte grandement leur chiffre d’affaires.
DSM aura particulièrement de la difficulté à se réinventer. Contrairement à sa concurrente Evonik. Avec 40% de ses ventes provenant d’alimentation d’animaux, DSM s’expose à un plus grand risque de reconversion. « Avec un portfolio concentré sur l’amélioration de la santé des animaux et l’efficacité de leur alimentation, on voit plus de risques pour DSM dans le long terme si la production de viande venait à chuter », pense M. Zechmann.
Beyond Meat utilise 100 fois moins d’eau
Au-delà des changements d’habitudes de consommation, les pratiques de production écologiques de Beyond Meat lui permettent de se démarquer à une ère où l’environnement devient une préoccupation générale.
La production d’un kilogramme de viande de bœuf nécessite 12 500 litres d’eau (contre 125 litres pour l’alternative), 330 m2 de terre (contre 23,1 m2) et 70lWh d’énergie (contre 37,8kWh). La production de viande de bœuf émet aussi 11 fois plus de gaz à effet de serre (GES) que la viande alternative.
« Quand on évalue le secteur de l’agriculture qui est responsable de 9% des émissions de GES, on trouve que le bétail a contribué à une moyenne de 40% des émissions totales pendant les cinq dernières années. À la lumière des préoccupations environnementales, l’accent a été mis sur la production durable des denrées alimentaires en tenant compte des objectifs à long terme », précise M. Zechmann.
Selon le rapport, l’environnement est le 3e facteur, après le bien-être animal et la santé, responsable de la décision des individus de ne pas consommer de viande. Depuis 2004, l’intérêt pour le véganisme a augmenté de 40%, toujours selon Alliance Bernstein.
M. Zechmann reste optimiste et pense que « même si l’impact est grand, c’est loin d’être une fatalité pour l’agrochimie, considérant un horizon de 10 ans. »