La transition énergétique pourrait exercer à plus long terme une certaine influence à la baisse sur les prix. (Photo: 123RF)
Comme tous les prix, celui du pétrole brut est influencé par deux facteurs fondamentaux : l’offre et la demande. Derrière ces deux éléments se cache toutefois un large et complexe ensemble de facteurs déterminants, allant de la force de l’économie aux investissements. Survol des forces en présence.
Le prix du brut a fluctué substantiellement depuis le début de la pandémie.
D’un sommet de 63,27 $ US le 6 janvier 2020, le West Texas Intermediate, la référence nord-américaine en ce qui a trait au prix du pétrole, s’est vite effondré au début de la pandémie. Il s’est même échangé à un prix négatif durant une brève période au cours du mois d’avril, frappant le fond du baril à -36,98 $ US.
Les prix ont ensuite grimpé graduellement jusqu’en janvier dernier, où le prix du baril était d’environ 120 $ US, avant de recommencer à descendre. Le 23 novembre dernier, celui-ci s’échangeait à un peu plus de 77 $ US.
Quels facteurs sont derrière ces variations?
L’économie toute-puissante
Le premier facteur influant sur le prix du brut est peut-être la santé de l’économie mondiale, explique Jean-René Ouellet, stratège d’investissement et gestionnaire de portefeuille chez Desjardins. Celle-ci exerce une forte influence sur la demande.
« Quand il y a un ralentissement mondial, on voit généralement les prix chuter de manière significative, dit-il. À l’inverse, dans un contexte d’accélération, il faut s’attendre à avoir une demande et des prix plus élevés. »
Toujours du côté de la demande, la transition énergétique pourrait exercer à plus long terme une certaine influence à la baisse sur les prix. Pour l’instant, toutefois, ce facteur n’est pas nécessairement aussi déterminant qu’on pourrait le croire.
« Oui, on voit davantage de véhicules électriques. En Norvège, par exemple, où l’on favorise leur adoption depuis des années, on a vu la consommation d’essence baisser », note Jean-René Ouellet. Reste que ce genre de baisse n’est pas extrêmement significative, à l’échelle mondiale, dans un contexte où des régions et des pays de taille, comme le Moyen-Orient, la Chine et l’Inde, se procurent toujours plus de véhicules à essence.
« Dans l’ensemble, on voit donc qu’il y a un nombre croissant de véhicules à essence, dit le gestionnaire. La demande reste donc robuste. »
Resserrement de l’offre
De l’autre côté de l’équation, l’offre contribue tout autant aux variations du prix du brut.
L’OPEP+, une alliance de pays exportateurs de pétrole, tient sa main bien agrippée sur le robinet. En octobre dernier, par exemple, l’organisation a décidé de réduire la production de deux millions de barils par jour à partir de novembre.
Les investissements dans le développement de projets pétroliers sont un autre facteur d’importance. Pour le moment, ceux-ci sont plutôt anémiques.
Normalement, lorsque les prix du baril sont élevés, les investisseurs sont incités à développer de nouveaux projets. Cette fois-ci, avec une pression vers la transition énergétique et l’échec de divers projets de transport, comme celui de l’oléoduc Keystone XL liant le Canada et les États-Unis, les choses sont différentes.
« Aujourd’hui, c’est le silence radio, dit Jean-René Ouellet. C’est même spectaculaire de voir à quel point l’industrie de la production a réalisé peu d’investissements. »
L’influence des réserves
À la mi-octobre, les États-Unis ont annoncé qu’ils allaient puiser 15 millions de barils supplémentaires dans leurs réserves stratégiques dans le but d’influencer à la baisse le cours de l’or noir. Mais dans un contexte où l’OPEP veut produire deux millions de barils de moins par jour, il s’agit plus ou moins d’un coup d’épée dans l’eau.
En conséquence, Travis Wood, directeur général de la recherche sur les actions pour le secteur de l’énergie, à la Banque Nationale, ne voit pas les prix retomber de manière substantielle avant un bon bout de temps.
« La demande continue de dépasser les attentes et l’hiver est à nos portes, avec ce que ça implique en matière de demande d’énergie », dit-il. Selon lui, même une récession l’an prochain ne parviendrait pas à faire fléchir les prix de manière significative.
« À un moment donné, les prix élevés devraient eux-mêmes commencer à changer les comportements, comme les habitudes de transport, et donc la demande, explique Travis Wood, selon qui l’économie mondiale continue d’utiliser trop de pétrole.