McKinsey: quatre chefs veulent une enquête publique indépendante
La Presse Canadienne|Publié le 30 septembre 2022«Il y a trop de questions sans réponses, trop d’anomalies», dans ce dossier «qui ne sent pas bon», selon le chef du Parti conservateur du Québec (PCQ). (Photo: La Presse Canadienne)
Québec — Toute la lumière doit être faite sur les contrats octroyés par le gouvernement Legault à la firme McKinsey, soutiennent en chœur les quatre chefs des partis d’opposition, en réclamant la tenue d’une enquête publique indépendante.
En mêlée de presse, vendredi matin, au local électoral de la circonscription de Chauveau, Éric Duhaime a été le premier à dénoncer le rôle politique de premier plan apparemment joué par la firme internationale de consultants dans la gestion de la crise sanitaire depuis 2020.
«Il y a trop de questions sans réponses, trop d’anomalies» dans ce dossier «qui ne sent pas bon», selon le chef du Parti conservateur du Québec (PCQ), qui estime que le gouvernement Legault a donné trop de pouvoirs à la firme de consultants, payée 35 000$ par jour, en lui attribuant un rôle «qu’elle n’aurait jamais dû jouer».
Une enquête menée par Radio-Canada révélait vendredi que la firme McKinsey avait joué un rôle central auprès du gouvernement dans la gestion de la pandémie, notamment lors de la campagne de vaccination et au moment d’élaborer les stratégies de communication.
Au total, la firme aura facturé 6,6 millions $ au gouvernement pour les services rendus, sans appels d’offres.
Le reportage rappelle qu’en mai 2020, le gouvernement Legault avait rejeté une demande des partis d’opposition visant à rendre publics tous les documents produits par cette firme en rapport avec la pandémie. En août 2020, le député péquiste Pascal Bérubé avait interpellé le premier ministre François Legault à ce sujet en commission parlementaire. Ce dernier avait justifié l’approche gouvernementale en affirmant qu’il était «important» d’avoir recours à ce genre de firmes «pour ne pas réinventer la roue».
La firme avait également obtenu l’accord du gouvernement pour ne pas révéler qui étaient ses autres clients, un risque de possibles conflits d’intérêts, a fait valoir M. Duhaime.
Le reportage indique de plus que plusieurs documents de travail de McKinsey portaient le logo du gouvernement du Québec.
Mais l’urgence de la situation justifiait le recours à cette firme, a réagi le premier ministre sortant, François Legault, en mêlée de presse, à Amos, ne voyant aucun problème, ni rien «d’anormal» dans la façon de faire retenue. Au contraire, il a dit que les recommandations formulées par McKinsey «ont aidé à sauver des vies».
La haute fonction publique québécoise, a-t-il aussi fait valoir, n’avait pas l’expertise requise pour gérer ce genre de crises, d’où l’embauche d’une firme privée.
De son côté, son chef de cabinet, Martin Koskinen, a nié que la firme avait joué un rôle politique clé dans la gestion de la crise. Sur Twitter, il a reconnu que la firme McKinsey avait contribué à gérer la situation en partageant «les meilleures pratiques des gouvernements de la planète» avec la haute fonction publique québécoise. «Mais prétendre qu’elle tirait les ficelles de la gestion de crise, c’est faux et même absurde», a-t-il écrit.
La cheffe libérale, Dominique Anglade, a vu dans l’alliance entre le gouvernement Legault et McKinsey un manque de «transparence», qu’elle perçoit dans plusieurs autres dossiers, considérant que le premier ministre sortant est reconnu pour ne pas «partager les informations» avec quiconque. Elle a rappelé que son parti réclamait plus largement depuis longtemps une enquête publique sur toute la gestion de la pandémie, qui engloberait le rôle joué par McKinsey.
Le co-porte-parole de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a qualifié d’«indécents» les contrats octroyés, qui indiquent que le gouvernement a opté pour une forme de «privatisation» de la gestion de la pandémie. Lui aussi a réclamé une vaste commission d’enquête sur toute la gestion de la crise, incluant les contrats octroyés à la firme privée.
Le chef du Parti québécois (PQ), Paul St-Pierre Plamondon, a renchéri. Il a souligné lui aussi que cette histoire révélait le «manque de transparence» du gouvernement dans la gestion de la crise sanitaire et il a rappelé que les partis d’opposition, dont le sien, font pression depuis des mois pour la tenue d’une commission d’enquête.