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Crédits carbone: des solutions face aux défis climatiques

Le courrier des lecteurs|Mis à jour le 18 juin 2024

Crédits carbone: des solutions face aux défis climatiques

Jean-François Léonard (Photo: courtoisie)

Un texte de Jean-François Léonard, VP Affaires publiques et gouvernementales, Solutions Will

COURRIER DES LECTEURS. De nombreux articles de presse ont porté récemment sur les crédits carbone; notamment sur la validité de ceux offerts par les compagnies aériennes à leurs clientèles pour compenser leurs émissions de GES. Cela met le doigt sur la difficile transition énergétique qui doit mener à ce qu’on appelle le Net-Zéro carbone en 2050. Cette transition est non seulement urgente, mais elle doit s’accélérer avec un seul objectif assez simple: ne plus émettre de GES. 

Comme on s’en doute: c’est plus facile à dire qu’à faire. 

Après la mise en place d’un marché conjoint du carbone réglementé Québec-Californie en mai 2014 — le fameux « Cap & Trade » — appuyé sur un mécanisme appelé aussi « droit de polluer », il y a eu l’émergence d’un 2e marché en parallèle qui s’appelle le marché volontaire du carbone, qui est apparu au début du millénaire (2003). Celui-ci permet à des individus et à des entreprises de compenser sur une base volontaire leurs émissions de GES en achetant des crédits carbone dédiés pour ce marché, tels les voyageurs par avion. Un crédit carbone représente une tonne de gaz à effet de serre (GES) qui a été réduite ou retirée de l’atmosphère. Cependant, ces retraits et ces réductions peuvent avoir été créés de différentes façons.

Pour ce faire, il y a trois portes d’entrée qui font office de solutions climatiques: la séquestration des émissions par la nature, la capture des émissions par la technologie suivie de leur entreposage long terme subséquent et la réduction des émissions à la source. 

La première est connue sous le nom de « Nature Based Solution (NBS). En gros, on utilise la capacité de séquestration naturelle des arbres, des milieux humides et des océans pour faire payer et compenser la réduction des émissions de GES produites par la société. En théorie, un arbre séquestre les GES de façon optimale à partir de sa maturité (environ 25 ans) jusqu’à son grand âge (environ 100 ans). C’est pour ça que la forêt amazonienne et les grandes forêts boréales sont considérées comme les poumons de l’univers. C’est pour ça que leur destruction causée par les feux, ou par l’activité humaine est si problématique. 

La seconde relève essentiellement du monde de l’ingénierie. Il s’agit de technologies aptes à capter directement le CO2 de l’atmosphère ou à emmagasiner les GES « à la sortie de la cheminée » et le stocker à long terme ( plus de 100 ans) dans des profondeurs géologiques. Les Américains entendent y consacrer des dizaines de milliards de dollars avec, à la clé, la possibilité de continuer à utiliser les énergies fossiles et/ou de réduire de façon significative les 57 milliards de tonnes de GES qui sont actuellement émis annuellement dans l’atmosphère. Il y a donc de nombreuses technologies en développement, mais aucune qui récupère de façon significative lesdites émissions. 

La troisième porte est celle de la réduction à la source, la priorité du GIEC. Des PME, des OBNL, des organismes publics mettent en place des politiques, des processus et des modes de comptabilité qui leur permette de suivre et de rendre compte de façon transparente et vérifiée les efforts de réduction de leurs émissions annuelles de GES. On appelle ça la décarbonation. Soyons calmes, cela se fait encore de façon modeste, mais cela existe. 

La question l’efficacité de ces approches ou de ces différentes portes d’entrée à la décarbonation, doit être regardée avec rigueur et attention. Or les critiques bien portent essentiellement sur la séquestration des GES par la nature. Est-ce qu’il y a tel phénomène de séquestration ? Bien sûr. Est-ce que les crédits carbone «accotés sur la nature» sont de la fraude comme l’a clamé The Guardian ou une sorte « d’excuse utilisée par les industries pour ne pas faire plus pour réduire directement leurs émissions » comme l’affirme la Fondation Suzuki ? La réponse se trouve dans les outils comptables et de vérification qui sont utilisés pour émettre ces crédits. Nous pensons qu’il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain. D’une part il y a eu – et il y aura — des acteurs aux comportements inacceptables à l’image des boursicoteurs qui achètent sur marge (Margin Call). Et il y a des acteurs qui font un travail remarquable pour générer des crédits carbone qui sont blindés en termes de quantification, sérialisation et audits certifiés, à l’instar de ce que fait Carbone boréal au Saguenay. 

Nous cherchons chez nous à intervenir uniquement par une approche basée sur la réduction à la source dont nous avons parlé plus haut. Cela garantit des crédits carbone qui sont basés sur des efforts réels de réduction, et d’une transparence totale. Cela a modestement permis depuis une quinzaine d’années une réduction globale de plus de 9,5 millions de tonnes de GES. C’est une goutte dans l’océan, me direz-vous! C’est sûr. Mais l’océan n’est-il pas formé de gouttes d’eau?

Comme on dit chez nous; «Yes we Will!»