La Fed souligne néanmoins qu’elle maintiendra ses taux bas tant que le marché de l’emploi ne progresse pas davantage. (Photo: La Presse Canadienne)
Washington — La Banque centrale américaine (Fed) a annoncé mercredi le retrait accéléré de son soutien à l’économie et se prépare désormais à relever ses taux d’intérêt dès l’année prochaine pour tenter de contenir l’inflation vertigineuse qui est devenue un obstacle majeur de la présidence Biden.
La hausse généralisée des prix à la consommation, qui s’avère plus tenace que prévu, pénalise durement les ménages aux États-Unis.
Le président Joe Biden a promis d’inverser la tendance. Mais ses marges de manœuvre sont limitées. La hausse des taux d’intérêt, qui ralentit la demande en augmentant les coûts d’emprunt, est l’outil le plus efficace pour tempérer la poussée inflationniste.
Aussi la Réserve fédérale (Fed) a-t-elle décidé de passer à la vitesse supérieure en avançant de quelques mois la fin de la réduction d’achats d’actifs « tapering », condition préalable à la hausse des taux, a-t-elle annoncé mercredi à l’issue de la réunion de deux jours de son comité monétaire, le FOMC.
Cette diminution du soutien monétaire s’achèvera en mars et non en juin, comme prévu initialement.
Et, l’institution s’est dite « prête à ajuster le rythme de rachat (d’actifs) si des changements dans les perspectives économiques le justifiaient », a-t-elle indiqué dans un communiqué.
Une majorité des membres du FOMC anticipe désormais jusqu’à trois hausses des taux en 2022.
L’institution, qui avait porté secours à l’économie en un temps record au printemps 2020, prend désormais acte qu’il y a urgence à agir alors que l’inflation a atteint 6,8% en novembre en glissement annuel. Du jamais vu depuis juin 1982. C’est aussi très supérieur à sa cible de l’ordre de 2% considérée comme saine pour l’économie.
La Fed souligne néanmoins qu’elle maintiendra ses taux bas tant que le marché de l’emploi ne progresse pas davantage.
Pour l’heure, elle projette un taux de chômage de 4,3% cette année avant 3,5% en 2022, soit le niveau de février 2020 juste avant la propagation de la pandémie aux États-Unis.
Son président Jerome Powell tient une conférence de presse à 19H30 GMT, la première depuis qu’il a été reconduit dans ses fonctions par la Maison-Blanche.
Il est très attendu sur sa vision du marché de l’emploi et sur les perspectives de croissance. Une remontée brutale des taux d’intérêt pourrait compromettre la croissance déjà ralentie par les variants du Covid-19.
Pas immédiat
De plus, si la hausse du taux directeur est un outil efficace pour faire reculer l’inflation, son effet n’est pas immédiat.
Généralement, l’impact est tangible 6 à 12 mois plus tard.
« La raison principale est que le taux d’intérêt directeur met un certain temps à se refléter dans les taux d’emprunt à court terme et à moyen terme », explique Gregory Daco, chef économiste chez Oxford Economics. Il faut donc patienter avant que la consommation et les investissements ne ralentissent et tempèrent, in fine, l’inflation.
Et la question est de savoir dans quelle proportion les taux d’intérêt, actuellement compris dans la fourchette de 0% à 0,25%, seront relevés.
Selon les nouvelles projections de la Fed, la croissance 2021 s’élèvera à 5,5% contre 5,9% projeté en septembre.
Trop d’argent dans l’économie ?
Jerome Powell devrait insister sur la nécessité de faire preuve d’adaptabilité compte tenu des nombreuses incertitudes.
« Vous constatez que nous ajustons notre politique et vous verrez que nous continuerons à le faire », avait-il déjà assuré récemment devant le Congrès.
La propagation rapide du variant Omicron, qui a poussé certains pays à réimposer des restrictions, complique ainsi encore sa tâche.
Sans compter la pression politique ambiante. Joe Biden, qui n’a plus la cote dans l’opinion, est accusé par l’opposition républicaine et jusque dans son camp démocrate, d’alimenter l’inflation en injectant trop de liquidités dans l’économie.
En mars dernier, il avait promulgué un plan d’urgence de 1 900 milliards de dollars après plus de 3 600 milliards injectés en 2020.
Mi-novembre, il a signé un plan d’infrastructures de 1 200 milliards. Il pousse désormais pour un plan de réformes sociales et environnementales de quelque 1 800 milliards.
C’est trop, disent les républicains. Ces derniers plans s’étalent sur une décennie, se défend l’administration Biden, qui les qualifie même d’anti-inflationnistes.