Hors alimentation et énergie, l'inflation dite sous-jacente est stable sur un mois, à 0,3%, et ralentit sur un an, à 4,9% (contre 5,2% le mois dernier). (Photo: Eduardo Soares pour Unsplash)
Washington — Les ménages américains ont continué à dépenser solidement en avril tandis que l’inflation a entamé un ralentissement bienvenu pour le portefeuille des consommateurs et pour la cote de popularité du président Joe Biden.
La forte hausse des prix qui pèse depuis des mois sur le pouvoir d’achat s’est un peu assouplie en avril, comme l’a montré vendredi l’un des indices mesurant l’inflation. Cela confirme la tendance esquissée plus tôt dans le mois par d’autres mesures.
Les prix ont grimpé de 6,3% sur un an en avril, contre 6,6% en mars, ce qui était un record en 40 ans, selon l’indice PCE du département du Commerce, privilégié par la banque centrale américaine, la Fed.
Sur un mois, le tassement est encore plus marqué, à 0,2% contre 0,9% le mois passé. Il s’agit de la plus faible hausse des prix depuis novembre 2020.
Joe Biden a salué un «signe de progrès, bien que nous ayons encore beaucoup de travail», assurant que la lutte contre la hausse des prix était sa «priorité économique».
«L’inflation reste trop élevée et la hausse des prix de (Vladimir) Poutine continue de peser sur les coûts de l’alimentation et de l’énergie», a déploré le président américain.
En mars en effet, la guerre en Ukraine avait fait flamber les prix de l’essence et de l’alimentation notamment, exacerbant les difficultés d’approvisionnement qui durent depuis des mois, conséquences durables de la pandémie.
L’autre principal indice de l’inflation, le CPI, publié par le département du Travail et utilisé notamment pour le calcul des retraites, a un peu ralenti en avril, à 8,3% sur un an, après avoir atteint en mars 8,5%, son plus haut niveau depuis 1982.
«Route sinueuse»
Touchés au portefeuille, les ménages américains ont fait attention à leurs dépenses le mois dernier, mais celles-ci sont restées soutenues, meilleures que prévu: elles ont augmenté de 0,9%, moins que la hausse de 1,4% de mars, mais plus que les 0,6% attendus.
Les consommateurs ont augmenté leurs dépenses dans les services, notamment pour aller au restaurant, tandis que leurs loyers ont grimpé. Ils ont aussi acheté plus de voitures et de pièces détachées.
«Les ménages américains sont peut-être mécontents de l’inflation, mais ils continuent de dépenser à un rythme sain», commentent Lydia Boussour et Kathy Bostjancic, économistes pour Oxford Economics.
Ces économistes anticipent que, «dans un contexte d’inflation élevée et d’offre limitée de biens, les consommateurs continuent de s’orienter vers les achats de services, ce qui devrait alimenter la croissance économique cet été».
La consommation, «principal pilier de l’économie, est toujours solide face à l’inflation historique et à la hausse des taux d’intérêt. Mais une route sinueuse attend l’économie américaine qui, selon nous, ralentira considérablement à l’approche de 2023», ajoutent-elles.
Une récession, plutôt l’année prochaine, menace en effet l’économie.
La confiance se dégrade
Les revenus, ajustés de l’inflation, ont progressé de 0,4% en avril, un peu moins qu’en mars (0,5%).
«Les ménages ont continué de puiser dans leur épargne pour financer leurs dépenses. Le taux d’épargne des particuliers a chuté de 0,6 point à 4,4% en avril — le niveau le plus bas depuis septembre 2008», soulignent encore Lydia Boussour et Kathy Bostjancic.
L’inflation comprime le pouvoir d’achat des Américains et menace la croissance économique, et est une sérieuse épine dans le pied pour le président américain Joe Biden. L’opposition l’accuse d’avoir une politique économique inflationniste et cette flambée des prix pèse lourdement sur sa cote de popularité.
La banque centrale américaine, la Fed, est en première ligne et a assuré qu’elle ferait tout pour ramener l’inflation dans les clous. Quitte à ce que cela ralentisse un temps la croissance de l’activité économique, et fasse un peu monter le chômage.
Elle a ainsi commencé à relever avec vigueur ses taux directeurs et devrait continuer.
Cela a pour effet d’augmenter le coût des prêts que contractent les particuliers et professionnels auprès des banques commerciales. Or, lorsque le crédit coûte plus cher, on emprunte moins, ce qui fait ralentir la demande et donc la pression sur les prix.
Mais des taux d’intérêt en hausse, qui viennent s’ajouter à une inflation record, ont dégradé la confiance des consommateurs américains en mai, celle-ci tombant à son plus bas niveau depuis août 2011, selon l’enquête de l’Université du Michigan.