Logo - Les Affaires
Logo - Les Affaires
Philippe Leblanc

Entre les lignes

Philippe Leblanc

Expert(e) invité(e)

Faillites québécoises: voyons-nous les choses de la bonne façon?

Philippe Leblanc|Publié le 01 février 2019

Faillites québécoises: voyons-nous les choses de la bonne façon?

Photo:123rf

BLOGUE INVITÉ. Les faillites annoncées récemment des entreprises Caroline Néron et Téo Taxi ont fait beaucoup jaser, en particulier sur les réseaux sociaux. Plusieurs décrient ces échecs, laissant entendre que les gens derrière ces sociétés de démarrage n’ont pas été à la hauteur.

Sans vouloir m’immiscer dans ces discussions – je ne suis pas en mesure de commenter la performance de ces entreprises ou de leurs dirigeants – je crois qu’il est important de souligner quelques points essentiels concernant l’entrepreneuriat.

1. Nous en avons grandement besoin. Une économie dynamique et innovante carbure aux démarrages d’entreprises. Les entrepreneurs prennent de grands risques pour lancer de nouvelles entreprises dans de nouveaux marchés. Sans eux, d’où viendrait l’innovation? Quelles seraient les perspectives de croissance de notre économie à long terme? À mon avis, ce ne sont ni les gouvernements, ni les universités, ni les très grandes entreprises qui généreront les idées et les concepts innovants ou qui feront leur mise en marché efficacement.

2. L’échec est normal, voire nécessaire. C’est bien connu, un très faible pourcentage des nouvelles entreprises seront des succès. Je lisais notamment que seulement 4% des nouvelles entreprises survivent 10 ans. Et que la moitié des nouvelles entreprises échouaient en moins de deux ans. Souvent, un ou une entrepreneure échouera à maintes reprises avant de frapper le bon filon et de connaître le succès. De fait, l’échec d’un entrepreneur lui apprendra bien souvent les leçons nécessaires au succès éventuel.

3. Il faut développer au Québec et au Canada une culture plus favorable à l’entrepreneuriat. Il faut à mon avis cesser de tomber à bras raccourcis sur l’entrepeneur(e) qui échoue. Celui ou celle-là a bien souvent perdu personnellement beaucoup de ses propres économies dans une telle aventure. Il ou elle n’a pas besoin du mépris des autres, mais plutôt d’un mot d’encouragement pour se relever.

Il y a quelques années, j’ai lu le livre Start-Up Nation des auteurs Dan Senor et Raul Singer, un livre que je recommande et qui explique les nombreux facteurs qui font de l’Israël le champion mondial de l’entrepreneuriat.

Selon les auteurs, «en 2008, les investissements en capitaux dans des entreprises en démarrage (venture capital) par personne en Israël étaient 2,5 fois plus élevés qu’aux États-Unis, plus de 30 fois plus importants qu’en Europe, 80 fois plus élevés qu’en Chine et 350 plus importants qu’en Inde.»

Je me demande où figureraient le Québec et le Canada par rapport à l’Israël? À mon avis, la comparaison serait plutôt embarrassante…

Au sujet de la culture israélienne qui favorise l’entrepreneuriat, on peut lire dans Start-Up Nation que «l’attitude et l’informalité israéliennes découlent d’une tolérance culturelle pour ce que certains Israéliens appellent les « échecs constructifs » ou « échecs intelligents »».

Bien sûr, il faut plus qu’une culture favorable pour encourager l’entrepreneuriat. D’autres facteurs tels que la diversité culturelle, une immigration nombreuse et diversifiée, une population éduquée, une réglementation favorable, des prêteurs sophistiqués aux ressources importantes sont autant de facteurs cités dans le livre Start-Up Nation. Il me semble cependant que la culture est la fondation essentielle pour développer un entrepreneuriat florissant.

À titre d’investisseur dans des entreprises d’assez grandes tailles en Bourse, je rêve de voir un nombre croissant d’entreprises québécoises et canadiennes démarrer, se développer et éventuellement faire le saut en Bourse. Pour y arriver, peut-être faudrait-il perdre cette fâcheuse habitude de lancer des pierres à tout entrepreneur qui échoue.

Philippe Le Blanc, CFA, MBA