Les entreprises québécoises doivent se mettre en conformité avec le règlement canadien interdisant certains plastiques. (Photo: 123RF)
Passer à des emballages respectueux de l’environnement pourrait soulever des défis considérables, prévient le cabinet canadien EY-Parthenon dans un récent rapport qui pointe notamment l’augmentation potentielle des coûts de marchandises, les dépenses pour le réoutillage et les essais sur la ligne de production.
Des enjeux rencontrés par bien des entreprises québécoises pour se mettre en conformité avec le règlement canadien interdisant certains plastiques.
Une équipe spéciale
«C’est un long parcours pour notre entreprise», lance Michel Bourassa, chef de la direction des Emballages Carrousel, à Boucherville.
Le premier distributeur d’emballages alimentaires au Québec — une activité qui représente 55% de ses ventes globales — multiplie les initiatives depuis 2018 pour mettre en avant des produits recyclables et compostables auprès de sa clientèle, composée de 15 à 20 000 clients actifs au Québec.
En 2021, le distributeur a mis sur pied une équipe multidisciplinaire, de quatre personnes à temps plein, qui se consacre à la compréhension des réglementations applicables aux emballages et à la transition nécessaire dans son organisation. Cet investissement lui a permis d’identifier selon les villes les produits de plastique dont l’usage est (ou sera) banni ou restreint — qui représentent 10% de son catalogue — et de diffuser sur son site un tableau récapitulant les règles fédérales et à Montréal.
«Nous devons revoir nos stratégies d’approvisionnement, et aider nos clients dans cette transition», indique le chef de la direction. L’entreprise forme plus de 70 personnes en relation avec la clientèle dans ses équipes et développe d’autres outils. «Début novembre, notre site fournira des informations sur tous nos produits bannis ou restreints et nos clients pourront identifier des solutions de substitution. Des webinaires de formation leur seront aussi offerts à partir de la mi-novembre», indique Michel Bourassa.
Remballer les bières
Les anneaux en plastique étaient monnaie courante dans l’industrie de la bière pour tenir ensemble les canettes. En mars dernier, Molson Coors a annoncé investir 85 millions de dollars (M$) pour mettre à niveau ses équipements mondiaux, en commençant par emballer ses paquets de six canettes dans du carton moulé recyclable à la fin de 2022. Cet investissement lui permettra aussi de retirer les anneaux en plastique de tous ses paquets de six canettes produits en Amérique d’ici 2025. La transition vers le carton a demandé de tester la durabilité et la stabilité des nouveaux emballages — changements d’humidité, empilement, transport — et d’évaluer leur intégration chez les détaillants et les réactions des consommateurs.
Le groupe Triani, une PME de 200 employés qui embouteille des boissons récréatives à Terrebonne, a pour sa part réorganisé sa production dès 2021 pour arrêter de sous-traiter certaines opérations d’emballage. «Compte tenu des réglementations qui s’annonçaient, nous avons acheté une cartonneuse (1M$) — bien plus cher qu’une machine posant des anneaux de plastique (200 000$) — puis une machine pour emballer nos packs avec du wrap en plastique recyclé», explique Tristan Bourgeois-Cousineau, le président du groupe. Au risque de perdre quelques commandes, dit-il. «Ce changement a bloqué certains contrats d’emballage avec des clients qui demandaient les anneaux de plastique. Nous avons donc subi une perte de revenu importante.». Mais l’augmentation du coût d’achat de matières pour la PME est minime.
L’affaire est dans le sac
Les sacs à emplettes jetables sont plus simples à remplacer. Le distributeur de produits surgelés Cool & Simple propose depuis 2020 dans ses quatre boutiques montréalaises des alternatives payantes, soit des sacs en papier à 0,25$ et des sacs isothermes réutilisables à 4$. «Si nous voulons éduquer nos clients, il faut qu’ils comprennent que l’emballage a un coût. Nous préférons qu’ils viennent avec leurs propres sacs et à défaut, nous leur proposons ces alternatives», explique le président de l’entreprise, Vincent Mahé.
Les sacs en papier vendus au prix coûtant sont plus économiques pour l’entreprise. «En offrant des sacs en plastique, nous perdions de l’argent», dit le président, qui s’est engagé dans un processus de certification B Corp. «Nous serons plus crédibles pour exiger de plus en plus d’emballages au minimum recyclables, et idéalement compostables, à nos fournisseurs de plats préparés, par exemple», se réjouit-il. Ceux qui ne suivront pas ce mouvement vert quitteront le carnet de commandes, l’entrepreneur en surgelés ayant «bien l’intention de montrer l’exemple et de changer les choses».
EN CHIFFRES
43,7M$
Somme investie par le brasseur Labatt dans sa brasserie de Montréal et 52,6M$ dans celle de London (Ontario). Ces sommes serviront à financer un système d’emballage en carton recyclé pour ses formats de quatre ou six canettes et d’autres projets tels qu’une nouvelle cuve de fermentation, ou une nouvelle ligne de canettes qui accroît les options d’emballage.
Source: Labatt Breweries of Canada, 15 novembre 2021.