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Haute direction: l’écart salarial hommes/femmes se creuse

La Presse Canadienne|Publié le 02 janvier 2019

Les femmes sont aux prises avec un «plafond de verre» au sommet de la hiérarchie des entreprises canadiennes.

Un nouveau rapport sur les chefs d’entreprise les mieux payés au pays démontre une fois de plus que les femmes sont aux prises avec un «plafond de verre à double épaisseur» au sommet de la hiérarchie des entreprises canadiennes. Elles doivent d’abord accéder aux postes de haute direction et, une fois qu’elles y sont, elles doivent encore faire face à une discrimination salariale par rapport à leurs homologues masculins.

Le Centre canadien de politiques alternatives calcule que, sur plus de 1 200 membres de la haute direction nommés au sein de 249 sociétés cotées en bourse au Canada, les femmes gagnent environ 0,68$ pour chaque dollar gagné par leurs homologues masculins.

Selon cette étude, l’écart se réduit à 0,86$ à l’échelon des cadres supérieurs, ce qui correspond presque à l’écart salarial global au pays, qui se situe à 0,87$ gagné par une femme pour chaque dollar gagné par un homme, d’après Statistique Canada. 

L’écart au sommet de la hiérarchie d’entreprise signifie qu’en moyenne, les hommes gagnent environ 950 000$ de plus par année que les femmes occupant des postes de direction similaires. 

L’auteur du rapport souligne que les conclusions, bien qu’elles portent sur le niveau de direction où les salaires sont déjà élevés, révèlent un problème d’équité salariale beaucoup plus large.

«On parle des hautes directions, c’est ce qu’on examine, mais je pense que cela reflète bien ce qui se passe à l’intérieur des grandes entreprises canadiennes et les obstacles que rencontrent les femmes pour obtenir un traitement équitable, même lorsqu’elles possèdent toutes les compétences», estime l’économiste principal du centre, David Macdonald.

Ces conclusions sont annexées au rapport annuel de l’organisme sur les salaires des chefs de la direction les mieux payés au Canada. Ceux-ci devraient avoir empoché le salaire annuel moyen d’un travailleur dès mercredi midi, le deuxième jour de l’année.

Une analyse des documents financiers publiés par des sociétés cotées en bourse démontre que les principaux PDG ont gagné en moyenne 10 millions $ en 2017, année où les plus récentes données sont disponibles, soit environ 197 fois le revenu moyen d’un employé.

Une analyse antérieure de La Presse canadienne, citée dans le rapport de l’organisme, avait permis de découvrir un écart similaire au sein des 60 plus grandes entreprises cotées en bourse du pays. L’examen des dossiers de 312 membres de la haute direction a révélé que seules 25 femmes avaient gagné en moyenne 0,64$ pour chaque dollar versé à leurs homologues masculins. 

Plusieurs explications

Des entretiens réalisés avec une douzaine de dirigeants ont relevé diverses raisons pour expliquer cette disparité.

Certains ont expliqué à La Presse canadienne que les entreprises ont toujours recours aux relations des vieux « boys club » lorsqu’elles recherchent de nouveaux membres de la direction. Ces mêmes dirigeants admettent par ailleurs la persistance d’une culture rétrograde au sein de certaines entreprises qui refusent de nommer des femmes à des postes de direction ou qui ne leur offrent aucun soutien dans leur milieu de travail.

D’autres ont évoqué un manque de confiance en soi et de tolérance au risque chez certaines femmes, un enjeu qui ressort dans les recherches universitaires sur la rémunération des dirigeants. 

Le rapport de M. Macdonald identifie trois problèmes.

Premièrement, peu de femmes occupent des fonctions de chef d’entreprise. Elles représentent environ quatre pour cent des PDG au Canada, tandis que dix pour cent des cadres supérieurs sont des femmes.

Deuxièmement, les «primes de rendement» versées aux hauts dirigeants sont plus élevées pour les hommes que pour les femmes. En éliminant les primes de l’équation, l’écart salarial est réduit à 0,82$ pour chaque dollar, soit presque l’écart moyen dans l’ensemble de la main-d’oeuvre au pays. 

Enfin, les entreprises qui comptent davantage de femmes au sein de leur direction sont généralement de plus petite taille et ne peuvent donc pas offrir des salaires aussi généreux, relève M. Macdonald. 

La loi fédérale adoptée au printemps a créé un modèle de «conformité ou d’explication» concernant la diversité au sein des conseils d’administration, au lieu de fixer des quotas pour le nombre de femmes. D’après le rapport Macdonald, qui cite une décennie de données norvégiennes montrant que les quotas ont augmenté le nombre de femmes dans les conseils d’administration, ces quotas ne seraient pas la solution pour réduire l’écart de rémunération.