La capacité hospitalière «inadéquate» pourrait nuire au PIB
François Normand|Publié le 17 janvier 2022Depuis le début de 2022, l'économiste Stéfane Marion affirme que la Banque Nationale reçoit plusieurs appels de clients institutionnels à l’étranger qui sont de plus en plus nombreux à se demander «What’s going on in Québec»? (Photo: 123RF)
Les capacités «inadéquates» dans le secteur de la santé au Québec pourraient compromettre la croissance économique et l’objectif du gouvernement Legault de rattraper l’Ontario en termes de PIB par habitant.
C’est ce qu’affirme dans une note publiée ce lundi matin Stéfane Marion, économiste et stratège en chef à la Banque Nationale («What’s going on in Quebec?» ou que se passe-t-il au Québec).
Dans un courriel à Les Affaires, il explique que l’affaiblissement du PIB potentiel du Québec est strictement mathématique, même s’il ne peut pas encore le chiffrer avec précision pour l’instant.
«Si nous devons fermer une partie de l’économie tous les hivers à cause des soins intensifs débordés, notre PIB potentiel sera nécessaire impacté négativement. Donc, pour chiffrer l’impact, il faudrait savoir la capacité à rajouter au secteur de la santé qui sera recommandée par les experts.»
Depuis le début de 2022, Stéfane Marion affirme que la Banque Nationale reçoit plusieurs appels de clients institutionnels à l’étranger qui sont de plus en plus nombreux à se demander «What’s going on in Québec»?
Même si la province affiche un taux de vaccination très élevé (90% des adultes québécois ont reçu deux doses) et impose les mesures sanitaires les plus rigoureuses au Canada, le Québec a pourtant dû fermer plusieurs secteurs de son économie, et ce, des restaurants aux salles de spectacle en passant par les cinémas.
Il a aussi imposé un second couvre-feu, qui est maintenant levé.
Depuis quelques semaines, les mesures sanitaires au Québec sont plus rigoureuses que la moyenne canadienne. (Source: Banque Nationale)
Aux yeux de Stéfane Marion, la cause fondamentale de cette situation est la capacité hospitalière «inadéquate» du Québec.
Bref, si le système de santé était moins fragile et sur la corde raide depuis des années, il pourrait mieux mieux gérer l’afflux de personnes atteintes de la COVID-19.
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Près de 300 personnes font trembler l’économie
«Si la présence de 282 personnes atteintes de la COVID-19 dans les unités de soins intensifs au Québec est capable de ralentir l’élan d’une économie de plus de 8 millions d’habitants — un nombre somme toute limité grâce à une campagne de vaccination hautement réussie —, alors il y a un problème de capacité du système de santé qui peut nécessiter une injection de fonds public», écrit l’économiste dans la note.
En 2019, selon les données internationales de comparaison les plus récentes de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le Canada comptait en moyenne 2,5 lits d’hôpitaux par 1000 habitants.
Le Québec comptait 2,7 lits en 2017, selon l’Institut de la statistique du Québec), soit un peu moins que les États-Unis (2,8).
Les champions du monde sont le Japon (12,8), la Corée du Sud (12,4) et la Russie (8,0). L’Allemagne n’est pas loin, au quatrième rang, avec 7,9 lits par 1000 habitants. La France en compte 5,8.
Stéfane Maron affirme qu’il ne faut pas sous-estimer cet enjeu, et que l’heure n’est surtout pas à la complaisance.
«Le gouvernement devrait revoir ses priorités au prochain budget pour s’assurer que notre système de santé ne devienne pas un obstacle structurel à la croissance économique dans un contexte de gestion endémique de la COVID-19».
À ses yeux, cet effort pourrait notamment passer par une nouvelle contribution santé, mais pour l’ensemble des contribuables québécois — pas seulement pour les adultes non vaccinés.
Il faudrait aussi faire des efforts pour accroître l’efficacité du système.