Même si 85% des femmes âgées de 25 à 54 ans se retrouvent sur le marché du travail, même si le chômage plonge dans un abysse au pays, tout n’est pas rose. (Photo: 123RF)
Ottawa — La relance économique n’a pas souri à tous les groupes de femmes, soutiennent des experts.
Même si 85% des femmes âgées de 25 à 54 ans se retrouvent sur le marché du travail, même si le chômage plonge dans un abysse au pays, tout n’est pas rose.
Les femmes se retrouvent dans les secteurs ayant été directement frappés par la pandémie: les soins et les professions qui requièrent une interaction directe avec le public. Si certaines travailleuses ont pu garder leur emploi, plusieurs autres ont joint les rangs des employés domestiques. Cette situation, disent des experts, affecte la sécurité économique des femmes et l’égalité des sexes.
Les femmes ont été plus durement frappées au cours de la pandémie que lors des récessions précédentes. Auparavant, environ 17% des postes perdus étaient occupés par des femmes, rappelle Brittany Feor, une économiste au Conseil de l’information sur le marché du travail. Pendant la pandémie, la répartition des pertes d’emploi a été presque égale entre les hommes et les femmes.
Le tableau est plus positif en 2022, concède Mme Feor, mais tout dépend du type d’emploi et du secteur.
Cela peut s’expliquer par le fait que plusieurs femmes travaillaient dans des secteurs déjà précaires et vulnérables aux restrictions de la santé publique, comme les services alimentaires, l’hébergement et le divertissement, selon une récente étude du Centre canadien pour des politiques alternatives.
Selon le groupe de réflexion, il faut diriger la relance vers celles qui font face aux plus grands obstacles afin de rattraper le terrain perdu au chapitre de l’égalité.
Mme Feor espère que la participation en force des mères de famille sur le marché du travail ne reculera pas au cours des prochaines années.
«C’est plus élevé que lors des autres récessions, note-t-elle. Cela semble positif. Mais nous ne sommes qu’en 2022. Il faudra vérifier l’état de la situation dans trois ou quatre ans. À quoi le marché du travail ressemblera-t-il?»
Les conséquences de devoir travailler à la maison malgré un jeune enfant ne seront pas immédiatement connues, ajoute l’économiste.
«Le recul que l’on subit parce qu’on ne peut pas participer à certains projets ou parce qu’on ne peut pas travailler aussi longtemps que ses collègues masculins, car ils n’ont pas les mêmes obligations, c’est quelque chose qu’on ne pourra constater qu’à long terme.»
Jongler entre l’entretien d’une famille et des responsabilités professionnelles peut affecter la carrière d’une femme, mais aussi sa santé, souligne Andrea Gunraj, vice-présidente à l’engagement public à la Fondation canadienne des femmes.
Un récent sondage réalisé les 20 et 21 avril pour le compte de l’organisme auprès de 1505 Canadiens laisse entendre que les mères canadiennes sont beaucoup plus anxieuses, isolées et tristes que les pères.
Près de deux mères sur cinq ont dû mettre leur carrière en veilleuse afin de gérer les responsabilités familiales et parentales.
«C’est plutôt intéressant et troublant, car cela signifie que des gens sont prêts à renoncer à un emploi payé pour s’occuper essentiellement d’un boulot non payé. Qu’est-ce que cela signifie sur le plan du bien être des femmes, de leur situation économique, de leur capacité à s’occuper d’elles-mêmes ou des personnes à leur charge? Cela a de grandes répercussions sur elles», dit Mme Gunraj.
Près de la moitié des répondantes se disent épuisées à force d’essayer de concilier le travail et les responsabilités liées aux enfants, comparativement à 30% des répondants.
«C’est vraiment une situation où les gens sont poussés à bout. Les femmes le sont de manière disproportionnée parce qu’elles assument des responsabilités pour lesquelles elles ne sont pas payées», lance Mme Gunraj.