Le PQ suspend deux candidats pour des propos controversés
La Presse Canadienne|Publié le 30 septembre 2022Le chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon, attend de lui parler avant de prendre une décision définitive sur sa candidature, mais s’est dissocié de ses propos. (Photo: La Presse Canadienne)
Tadoussac — Ce n’est pas un, mais deux candidats qu’a expulsés le Parti québécois (PQ), vendredi, pour des commentaires écrits ou partagés sur les femmes qui portent le voile et sur la religion musulmane.
Après l’avoir suspendu en attendant d’obtenir des explications, le chef, Paul St-Pierre Plamondon, a confirmé que le candidat de Rousseau, Pierre Vanier, ne pourrait pas faire partie du caucus du PQ, s’il est élu. Sa conjointe, Catherine Provost, qui se présente dans L’Assomption, est également exclue, car elle a partagé du contenu similaire, a-t-il ajouté lors d’une mêlée de presse à Tadoussac.
Les deux candidats bannis ont toutefois refusé de retirer leur candidature. Leurs noms demeureront inscrits sur le bulletin de vote, mais le chef assure qu’ils ne joindront pas le PQ à l’Assemblée nationale s’ils sont élus et seraient considérés comme indépendants. «En aucun cas, ils ne pourront faire partie du caucus.»
M. St-Pierre Plamondon s’est fait demander s’il n’avait pas pu convaincre les candidats de se retirer comme l’a fait la candidate solidaire Marie-Ève Rancourt, dans Camille-Laurin, qui avait été filmée en train de voler un dépliant promotionnel du PQ. «Je vais le plus loin que je peux dans les pouvoirs que j’ai et dans ce que la loi dit», a répondu M. St-Pierre Plamondon.
Des questions demeurent à savoir si le PQ recevra les subventions pour les votes qu’obtiendront les deux candidats. Même si un candidat ne remporte pas son élection, chaque vote qu’il reçoit procure une subvention annuelle à sa formation politique. «Je vais m’adresser au DGE (Directeur général des élections) pour savoir comment on gère ça.»
À Élections Québec, on ne veut pas commenter de cas spécifique. On confirme que seul un candidat peut retirer sa candidature. Par contre, il n’existe pas de mécanisme pour se désaffilier d’un parti politique pendant un scrutin, a expliqué le porte-parole Gabriel Sauvé-Lesiège.
La réponse du chef du PQ démontre un manque de leadership, croit le porte-parole de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois. «Ce n’est pas une vraie décision. Soit M. Plamondon les garde dans son équipe, dans ce cas-là, qu’il s’assume […], soit il décide de les retirer de son équipe, mais dans ce cas-là qu’il ramasse pas leur vote. Il ne peut pas faire les deux en même temps.»
Questionnée sur le sujet, la cheffe libérale Dominique Anglade a souligné que ce genre de propos font mal aux personnes visées. Ses tirs ont toutefois visé la Coalition avenir Québec (CAQ) plutôt que le PQ.
Avec leurs propos controversés des derniers jours sur l’immigration, le chef de la CAQ, François Legault, et le ministre de l’Immigration, Jean Boulet, ont eu un effet néfaste sur le climat politique, selon elle. «C’est ça qui doit changer. Le message, il doit être un message d’ouverture.»
Des propos qui refont surface
Dans une série de publications sur les médias sociaux faites en 2015 et 2016, le candidat péquiste dans Rousseau, Pierre Vanier, a mis en doute l’intelligence des femmes qui portent le voile et accusé les musulmans de «tuer la démocratie». Les commentaires ont refait surface dans un texte du Journal de Montréal.
«Donnez un marteau à un souverainiste, il se bâtira un pays, peut-on lire dans un commentaire qu’il a partagé en juin 2015. Donnez un marteau à un musulman, il tuera la démocratie.»
En janvier 2016, il s’en est pris aux femmes qui portent le voile, dans un commentaire qu’il a rédigé. «Pourquoi les femmes occidentales choisissent de se draper dans ces accoutrements? Comme le disait une de mes collègues: elles manquent un 15 minutes de pas cuit dans la caboche.»
Plus tôt, vendredi, le chef du PQ avait dit qu’il suspendait M. Vanier, mais attendait de lui parler avant de prendre une décision définitive sur sa candidature. «Ce sont des propos inacceptables, a réagi le chef lors d’une mêlée de presse à Godbout, vendredi. Je m’en dissocie complètement.»
Le chef du PQ a fait part de sa frustration que sa formation n’ait pas eu connaissance des propos avant d’accepter la candidature. «Moi, évidemment, je n’en avais aucune connaissance. J’avais beaucoup de difficulté à comprendre qu’on n’avait pas eu cette information-là. Je ne cacherai pas une forme de colère de mon côté.»
À la défense des erreurs du passé
S’il condamne les propos, M. St-Pierre Plamondon s’est porté à la défense de ses deux anciens candidats. Il souligne que les deux candidats se sont excusés.
«Eux, ils font valoir, et il faut entendre cet argument-là, qu’on ne peut pas juger une personne, surtout qu’ils regrettent […] sur un événement, une publication, un partage en 2015.»
La situation évoque un problème de société plus large sur le discours politique sur les médias sociaux, croit M. St-Pierre Plamondon. «Les médias sociaux créent ces situations-là où des gens regrettent ce qu’ils ont dit, ce qu’ils ont fait. On le voit sur Twitter la quantité de haine, sur tous les sujets.»
Quatre candidats avec des propos controversés
Plus tôt cette semaine, M. St-Pierre Plamondon a dû s’expliquer sur les propos de deux candidates sur la religion musulmane.
Des commentaires où la candidate dans Sainte-Rose, à Laval, Lyne Jubinville, critique la religion musulmane en 2011 et 2016 ont refait surface. En 2011, elle avait écrit: «Pourquoi les hidjabs envahissent de plus en plus notre paysage public?». La candidate a précisé qu’elle demeure critique de toutes les religions, mais qu’elle reconnaît le droit de chacun d’exercer sa religion.
Questionné sur les écrits de sa candidate, M. St-Pierre Plamondon avait dit que les déclarations de Mme Jubinville ne sont pas islamophobes. «On ne peut pas mettre le mot sur “phobie” sur toute critique des religions. Il n’y a aucune façon de viser l’ensemble de ses propos comme visant une seule religion.»
Dans une perspective féministe, faire une critique des religions est légitime, croit-il. «Interroger les religions structurées en institution sur le plan du droit des femmes, c’est une critique qui est nécessaire.»
Un point qu’il a réitéré, vendredi, et qui marque une différence entre les propos de M. Vanier et Mme Jubinville, selon lui. «“Un marteau contre la démocratie”, c’est vraiment antimusulman.»
Il s’est aussi porté à la défense de la candidate de La Pinière, Suzanne Gagnon, qui se demandait, en novembre dernier, sur les médias sociaux: «Pourquoi les minorités visibles résistent-elles autant lorsqu’elles se font arrêter?»
Le chef a dit que les propos étaient «maladroits». Il répond que Mme Gagnon reconnaissait le profilage racial. «Ce qu’elle dit, c’est que le profilage racial existe. Clairement, son intention, c’est qu’elle est inquiète des blessures subies lors des arrestations des gens parmi les minorités visibles.»