Le stress financier aurait un impact physique sur les jeunes
La Presse Canadienne|Publié le 05 octobre 2021Safiya Mayers, 25 ans, (Photo: La Presse Canadienne)
Au cours des dernières années, le stress financier a laissé à Safiya Mayers dépression, anxiété, fatigue, douleurs musculaires, fluctuations de poids et douleurs thoraciques.
La coordonnatrice d’installations de Toronto, âgée de 25 ans, dit avoir éprouvé un stress considérable à payer ses droits de scolarité et le loyer en tant qu’étudiante universitaire au début de la vingtaine, tout en accumulant une dette. Elle n’est plus aux études, mais une partie importante de ses revenus est consacrée au paiement du loyer, ce qui rend difficile le remboursement des prêts ou la constitution d’une épargne importante.
«Je dois déménager en décembre et je vais probablement devoir faire des sacrifices, soit en éliminant une certaine vie sociale, soit en louant mon propre logement. Quand je pense à mon avenir, j’ai beaucoup d’anxiété parce que je n’ai pas de coussin. Je n’ai pas les bases appropriées pour savoir que je vais bien m’en tirer en cas de tremblement de terre», a-t-elle illustré.
«J’ai l’impression que les premières années de ma vingtaine m’ont été enlevées parce que j’étais toujours inquiète pour mes finances, ce qui à son tour a affecté ma santé.»
Mme Mayers n’est pas seule dans cette situation. Selon l’indice de stress financier de FP Canada, publié en juin 2021, 39% des Canadiens de moins de 35 ans interrogés affirment que le stress financier leur a occasionné des problèmes de santé et 11% des participants de moins de 35 ans indiquent que le stress financier a entraîné des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie. En comparaison, 28% des personnes de plus de 35 ans déclarent que le stress financier a eu un impact sur leur santé et 5% affirment qu’il a entraîné des problèmes de santé mentale et de toxicomanie.
Les Canadiens de moins de 35 ans sont également beaucoup plus susceptibles (44%) de citer l’argent comme principale source de stress que les 35 ans et plus (36%).
«Nous savons que le stress, et en particulier le stress chronique, est lié à de nombreux problèmes de santé différents, tels que la fatigue chronique, la santé intestinale, un système immunitaire affaibli, des maux de tête et une sensation d’oppression dans le corps. À terme, cela pourrait entraîner des problèmes cardiaques», a observé Chantel Chapman, chercheuse en traumatologie financière établie à Richmond, en Colombie-Britannique, et cofondatrice de The Trauma of Money, un programme de littératie financière.
Le corps et le cerveau ne font pas la distinction entre le stress financier et le stress lié aux relations, au travail ou tout autre type de stress, a-t-elle ajouté.
Les jeunes Canadiens sont probablement plus touchés par le stress financier en raison de problèmes d’accessibilité du logement, en particulier dans les villes plus populeuses, selon Mme Chapman. «Parfois, les gens sont stressés de trop dépenser parce qu’ils essaient de dépenser pour survivre. Leurs frais de logement pourraient représenter environ 60% de leurs revenus. Le coût est très élevé par rapport à leurs revenus», a-t-elle expliqué.
Comprendre ce qui se passe
Une autre raison pour laquelle les jeunes Canadiens peuvent éprouver un stress financier plus élevé est le temps passé sur les médias sociaux, a-t-elle ajouté. Des niveaux plus élevés d’engagement sur les réseaux sociaux peuvent être directement corrélés à des sentiments d’insuffisance ou de stress, ce qui peut entraîner un état de comparaison, a expliqué Mme Chapman. Cela peut provoquer des sentiments de manque ou des sentiments de douleur, auxquels les gens réagissent parfois en dépensant.
Selon Mme Chapman, la première étape pour réduire le stress financier est de comprendre ce qui se passe dans son système nerveux _ y compris dans son corps, son cerveau, sa respiration et son rythme cardiaque _ puis d’utiliser sa respiration ou une autre pratique somatique pour se calmer.
Une fois dans un état plus calme, on peut commencer à remettre en question les histoires qu’on se raconte et se demander ce qui est en son pouvoir en tant qu’individu. «De toute évidence, cela ne prend pas en considération les défis systémiques que certaines personnes rencontrent en matière d’argent», a ajouté Mme Chapman. «Il existe des barrières économiques qui ont un impact sur la santé et la santé financière des gens, et qui échappent dans une certaine mesure à leur contrôle individuel.»
Shannon Lee Simmons, planificatrice financière et fondatrice de la New School of Finance à Toronto, a indiqué que ses jeunes clients sont en mesure d’atténuer un certain stress financier en déterminant l’argent qui entre et l’argent qui sort. «Parfois, faire cela peut sembler plus effrayant que ce ne l’est vraiment», a-t-elle ajouté.
Même si l’intégralité des revenus d’une personne est consacrée au loyer, à l’épicerie, aux factures et au remboursement de la dette, un plan financier peut être avantageux, a ajouté Mme Simmons. «L’objectif pour cela serait de ne pas s’endetter, et si on doit s’endetter un peu, il faut rester calme, puis élaborer un plan à court terme pour le rembourser de manière viable.»
Mme Simmons a ajouté que la pratique de cet ensemble de compétences donnait de la confiance aux gens, ce qui est stimulant pour leurs finances, puisqu’ils peuvent être certains qu’ils sont capables de gérer de l’argent, même s’ils n’en économisent pas. Et, quand on sait qu’on peut gérer son argent, il y a de l’espoir.
«Je pense que l’espoir est (important) lorsqu’on sent qu’on n’a plus le contrôle ou qu’on a l’impression de ne pas avoir d’avenir ou qu’on ne sait pas à quoi ressemblera l’avenir», a estimé Mme Simmons. «Restaurer l’espoir permet d’être moins stressé pendant la nuit.»