Les banques anticipent une augmentation des prêts en souffrance
La Presse Canadienne|Publié le 09 janvier 2024Le président et chef de la direction de la Banque Royale du Canada, Dave McKay, a dit qu’il s’attend à ce que les provisions pour pertes atteignent un sommet cette année. (Photo: La Presse Canadienne)
Toronto — Les dirigeants des banques canadiennes s’attendent à mettre davantage d’argent de côté cette année pour d’éventuels prêts en souffrance, mais ils estiment que les emprunteurs s’en tirent généralement bien, malgré les taux d’intérêt plus élevés.
Lors d’une conférence réunissant les patrons de banques mardi, le président et chef de la direction de la Banque Royale du Canada (RBC), Dave McKay, a dit qu’il s’attend à ce que les provisions pour pertes atteignent un sommet cette année, car certains prêts commerciaux se trouvent dans une situation précaire.
Il constate que les emprunteurs hypothécaires doivent s’adapter aux paiements hypothécaires plus élevés, avec une moyenne de 400$ par mois pour les clients qui renouvelleront cette année. Les augmentations de salaire et l’épargne accumulée contribueraient à atténuer l’impact de la hausse des taux, selon lui.
«De ce que nous avons observé dans l’industrie et à RBC, les consommateurs font un très bon travail en utilisant leur épargne et en modifiant leurs habitudes de dépenses si nécessaire. N’oubliez pas non plus que l’augmentation des paiements de 20% correspond, en moyenne, à l’augmentation des revenus disponibles.»
M. McKay prévoit une légère détérioration sur un certain nombre de fronts en 2024, en particulier dans l’immobilier commercial aux États-Unis, dans certains marchés immobiliers résidentiels multifamiliaux, sur les marchés des capitaux et dans certains domaines des prêts à la consommation non garantis.
Le grand patron de la Banque Scotia, Scott Thomson, prévoit, lui aussi, que les provisions pour prêts en souffrance soient plus élevées, mais il pense que les activités seront plus stables après les efforts de restructuration en 2023.
M. Thomson souligne que les taux ont déjà commencé à baisser en Amérique latine, dans les marchés où la Scotia est présente. Cette tendance aiderait à réduire les risques et réduire les pertes sur prêts, selon lui.
Pour sa part, le grand patron de la Banque Nationale, Laurent Ferreira, croit que les marchés sont trop optimistes au sujet d’une éventuelle baisse des taux d’intérêt. De nombreux facteurs pourraient compliquer la lutte à l’inflation, selon lui.
«Il y a le risque géopolitique, qui pourrait avoir un effet sur les prix alimentaires. Il y a les perturbations commerciales, la transition énergétique, la démondialisation, les dépenses publiques, tout cela est inflationniste», énumère M. Ferreira.
«Oui, nous devrions assister à des réductions de taux, mais je pense que le marché est un peu optimiste en ce qui concerne l’économie canadienne et les taux, ajoute-t-il. Nous nous attendons à une croissance négative du PIB pour les deux premiers trimestres, de moins 1,1% et 1,3%, respectivement.»
Avec les espoirs d’une possible baisse des taux, l’activité commerciale pourrait ralentir à court terme, croient plusieurs des dirigeants présents à la conférence. Cette situation pourrait exercer une certaine pression sur la croissance économique au cours des prochains mois.
Le président et chef de la direction de la BMO, Darryl White, trouve qu’il va de soi que les clients, particuliers et entreprises, reportent leurs emprunts, que ce soit la rénovation d’une maison ou l’achat d’une entreprise, s’ils n’en ont pas besoin aujourd’hui.
«Si je vous disais qu’il est fort probable que si vous retardiez une transaction de six ou neuf mois, cela coûtera 100 points de base moins cher, qu’allez-vous faire? Vous allez attendre», ajoute M. White.
M. Thomson constate que de nombreux dirigeants d’entreprise attendaient d’avoir une plus grande visibilité sur les taux et sur la situation économique en général, ce qui l’amène à modérer les attentes quant à l’activité commerciale cette année.
«Il y a beaucoup d’incertitude, ce qui empêche évidemment les clients, les chefs des finances et les PDG, de prendre des décisions.»