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Les implications économiques de l’attaque de l’Iran sur Israël

John Plassard|Mis à jour le 13 juin 2024

Les implications économiques de l’attaque de l’Iran sur Israël

(Photo: Getty Images)

EXPERT INVITÉ. L’Iran a lancé une vaste attaque aérienne contre Israël et le territoire qu’il contrôle à partir de samedi en fin de journée, en tirant plusieurs centaines de drones et missiles. Il s’agit de la première attaque directe de ce type lancée depuis le territoire iranien après des décennies de guerre de l’ombre entre les deux pays.

L’assaut a été lancé en réponse à une récente attaque contre un bâtiment du complexe de l’ambassade iranienne en Syrie, qui a tué plusieurs hauts responsables iraniens. Se pose maintenant la question de savoir quelles pourraient être les conséquences économiques d’une implication plus directe de l’Iran. Synthèse et analyse.

 

Les faits

L’Iran a lancé une attaque aérienne de grande envergure contre Israël dans la nuit de samedi. Il s’agit de la première frappe directe depuis le territoire de Téhéran contre Israël depuis des années de tensions. L’attaque n’a pas fait de morts, mais 12 personnes ont été transportées au centre médical Soroka, dans le sud d’Israël, au cours de la nuit. La base aérienne de Nevatim, située dans le désert du Néguev, dans le sud d’Israël, aurait été légèrement endommagée par l’attaque, mais qu’elle fonctionnerait.

 

 

Téhéran a déclaré que cette attaque était menée en représailles d’un attentat qu’il impute à Israël contre le consulat iranien dans la capitale syrienne, Damas, au début du mois. Plusieurs membres du Corps des gardiens de la révolution islamique d’Iran ont été tués lors de cette attaque. Israël n’a ni revendiqué ni nié sa responsabilité.

Rappelons que depuis des décennies, l’Iran et Israël se livrent à une guerre clandestine, dans laquelle ils attaquent leurs intérêts respectifs sur terre, en mer, dans les airs et dans le cyberespace. L’Iran soutient (théoriquement) des forces supplétives telles que le Hezbollah au Liban, le Hamas en Cisjordanie et à Gaza et les Houthis au Yémen.

Israël a lancé une série d’attaques, notamment en tuant le principal scientifique nucléaire iranien, Mohsen Fakhrizadeh, en 2021, et en assassinant un commandant des gardiens de la révolution, le colonel Sayad Khodayee, en 2022. Les tensions sont montées en flèche dans la région après six mois de guerre brutale entre Israël et le Hamas, groupe militant palestinien soutenu (inofficiellement) par l’Iran, déclenchée par les attentats du 7 octobre de l’année dernière. Le contre-amiral Daniel Hagari des Forces de défense israéliennes (FDI) a décrit le tir de barrage de samedi comme une «escalade majeure».

 

 

L’Iran, ennemi de longue date d’Israël, a toujours eu recours à des mandataires pour mener ses interventions, d’où l’intérêt pour les groupes qui lui sont alliés au Moyen-Orient. Cette fois-ci, la situation est différente, car c’est historique. Alors que l’Iran possède la capacité de lancer des missiles sur Israël (comme l’a fait l’Irak de Saddam Hussein pendant la guerre du Golfe), le prépositionnement de moyens navals Américains et d’autres alliés occidentaux dans la région ces derniers jours semblait avoir pour but de signaler les conséquences d’une intervention de l’Iran. Les informations des services de renseignements étrangers auront donc été une nouvelle fois exactes.

 

Une implication globale

La mission permanente de l’Iran auprès des Nations unies a déclaré dans un message publié sur les réseaux sociaux cette nuit que «l’affaire peut être considérée comme conclue». Toutefois, si le régime israélien commet une nouvelle erreur, la réponse de l’Iran sera considérablement plus sévère.

De son côté, le gouvernement américain, dans l’espoir d’éviter une nouvelle escalade, aurait informé Israël que sa défense contre l’attaque iranienne était une victoire majeure qui ne nécessitait peut-être pas une nouvelle série de représailles comme le soulève le NY Times. Mais le gouvernement israélien sera sous pression pour répondre à l’attaque et le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, a déclaré que la confrontation avec l’Iran n’était «pas encore terminée».

Par ailleurs, la toute récente intensité des attaques des Houthis pousse de nombreux navires de guerre à quitter la mer Rouge. La frégate française FREMM Alsace, de classe Aquitaine, par exemple a quitté la mer Rouge à court de missiles et de munitions pour repousser les attaques des forces armées yéménites, selon son commandant, Jérôme Henry.

«Nous ne nous attendions pas nécessairement à un tel niveau de menace. Il y a eu une violence décomplexée qui a été très surprenante et très significative. Les Yéménites n’hésitent pas à utiliser des drones qui volent au ras de l’eau, à les faire exploser sur des navires commerciaux et à tirer des missiles balistiques», a déclaré Jérôme Henry au Figaro.

 

 

Cliquez sur suivant pour connaître les répercussions économiques

Quels sont les répercussions économiques ?

Le conflit entre Israël et le Hamas a des répercussions importantes sur l’économie mondiale, surtout si l’Iran s’implique plus directement dans le temps.

En voici quelques points clés:

• Prix de l’énergie: Le rôle de l’Iran dans le conflit est crucial, car il contrôle le détroit d’Ormuz, un passage maritime critique où transitent environ 20 à 30% des stocks mondiaux de pétrole. Si le conflit s’aggrave et touche les principaux pays producteurs de pétrole, comme l’Iran, les coûts de l’énergie pour les entreprises et les ménages pourraient grimper en flèche en raison des interruptions d’approvisionnement. La hausse des prix de l’énergie entraverait les efforts des banques centrales pour gérer les pressions inflationnistes dans le monde entier.

• Tensions commerciales mondiales: Toute perturbation de l’approvisionnement en pétrole pourrait exacerber les tensions commerciales mondiales existantes. Les entreprises fortement dépendantes des ressources énergétiques pourraient être confrontées à des difficultés, ce qui aurait une répercussion sur les chaînes d’approvisionnement et les coûts de production.

• Hezbollah et Hamas: Si le Hezbollah continue de se sentir menacé par Israël, une implication plus profonde de l’Iran dans le conflit pourrait devenir envisageable. Un tel scénario pourrait conduire à un événement économique catastrophique.

En résumé, la participation de l’Iran au conflit entre Israël et le Hamas pourrait affecter les marchés de l’énergie, le commerce mondial, la dynamique de l’inflation et raviver la situation géopolitique.

 

Quels sont les actifs qui sont à surveiller ?

L’implication de l’Iran dans le conflit actuel entre Israël et le Hamas pourrait avoir une répercussion sur divers actifs et marchés.

Voici quelques domaines susceptibles d’être affectés :

• Le prix du pétrole: L’Iran contrôle le détroit d’Ormuz, un passage maritime essentiel pour le transport du pétrole. Toute escalade impliquant l’Iran pourrait perturber l’approvisionnement en pétrole, ce qui entraînerait une hausse des prix de l’énergie au niveau mondial. Le prix du baril de pétrole a fortement progressé vendredi sur la rumeur d’une intervention ce week-end avant de quelque peu se dégonfler. La tendance haussière devrait se poursuivre.

• Marchés des matières premières: En fonction des régions concernées, d’autres produits de base peuvent également connaître une certaine volatilité en raison des tensions géopolitiques.

• L’or: Les investisseurs considèrent souvent l’or comme une valeur refuge en période de volatilité des marchés. Si le conflit s’intensifie, la demande d’or pourrait augmenter, les investisseurs cherchant à se mettre à l’abri. L’or a touché un nouveau plus haut historique vendredi.

• Le bitcoin: Le bitcoin et d’autres cryptomonnaies ont fortement chuté après l’attaque de l’Iran contre Israël. Le cours du bitcoin a chuté d’environ 67 000 $US à 61 625 $US, réduisant à néant plus de 130 millions de dollars de capitalisation boursière dans les minutes qui ont suivi l’attaque avant de se redresser. Rappelons ici que l’histoire récente nous a montré que les cryptomonnaies agissaient comme des actifs risqués.

 

 

• Actions des secteurs de la défense et de l’aérospatiale: les entreprises actives dans les secteurs de la défense et de l’aérospatiale pourraient susciter un intérêt accru. La défense réussie d’Israël contre l’attaque de l’Iran pourrait renforcer la confiance dans ses capacités militaires, ce qui pourrait profiter aux valeurs connexes.

• Les devises: le conflit peut avoir une répercussion sur les taux de change, en particulier pour les monnaies des pays directement impliqués ou de ceux qui ont des intérêts importants dans la région. On songe aussi aux devises refuges telles que le CHF et l’USD.

• Marchés boursiers régionaux: les marchés boursiers du Moyen-Orient, en particulier Israël et les pays voisins, pourraient connaître des fluctuations en fonction des développements géopolitiques. Par contre des marchés comme la Suisse (SMI) considérés comme plus défensifs pourraient être «soutenus».

• La volatilité: la volatilité qui semblait «morte» depuis novembre 2023 vient de se réveiller. Le VIX (indice de la peur) vient de dépasser les 17 points pour la première fois depuis octobre 2023 et pourrait poursuivre son ascension en cas de représailles israéliennes sur l’Iran après les attaques de ce week-end.

 

 

Enfin comment ne pas parler de la prime de risque géopolitique. Les investisseurs peuvent exiger une prime de risque plus élevée pour les actifs de la région en raison de l’incertitude et des tensions géopolitiques. Bref, en cas d’implication (de poursuite de l’implication) de l’Iran, de nombreux actifs pourraient en subir les répercussions.

 

Synthèse

Aujourd’hui, il est possible que toute réponse n’inclue pas une attaque à grande échelle sur le territoire iranien lui-même, limitant ainsi les chances d’une nouvelle escalade. Rappelons qu’historiquement, la République islamique n’a pas d’appétit pour les frictions, même de faible intensité, qui pourraient conduire à un conflit direct avec ses adversaires.

Une conflagration régionale risquerait non seulement d’endommager son réseau d’influence, mais aussi d’affaiblir le régime islamique lui-même, au point de remettre en cause son existence. Ces risques, dont les dirigeants iraniens sont parfaitement conscients, pourraient expliquer la «retenue» de leur engagement qui intègre naturellement la question de leur recherche nucléaire.

 


Ce texte est tiré de l’infolettre quotidienne de John Plassard, gracieuseté de Mirabaud

 

** Veuillez prendre note que les visuels de notre expert sont présentés en anglais à titre informatif et ne peuvent être traduits par notre équipe. Merci de votre compréhension.