Une «nouvelle formidable», a déclaré à l’AFP le directeur général d’Air France-KLM, Benjamin Smith. (Photo:123RF)
Un ballon d’oxygène: le transport aérien, laminé depuis 18 mois par le Covid-19, a accueilli avec enthousiasme lundi la réouverture annoncée des frontières des États-Unis, les vols depuis et vers ce pays figurant traditionnellement parmi les plus rentables.
Une «nouvelle formidable», a déclaré à l’AFP le directeur général d’Air France-KLM, Benjamin Smith, résumant l’état d’esprit d’un secteur qui a subi des dizaines de milliards d’euros de pertes depuis que les gouvernements ont fermé leurs frontières pour tenter de freiner la pandémie, en mars 2020.
Pour les compagnies européennes historiques (Air France et KLM, mais aussi British Airways et Lufthansa), aux réseaux long-courriers très développés, les restrictions de voyage sur l’axe nord-atlantique ont été particulièrement dures à avaler: le groupe franco-néerlandais réalisait ainsi 40% de son chiffre d’affaires sur ces liaisons. Et chez Lufthansa, la moitié de la flotte long-courrier servait à réaliser des vols transatlantiques.
L’annonce de ce lundi représente un «moment historique», qui «verra nos deux pays se réunir après 18 mois de séparation», a affirmé le directeur général de British Airways, Sean Doyle, pour qui «le monde s’ouvre à nouveau» à ses clients qui «peuvent réserver en confiance».
Un peu moins exposées à l’international (entre 25% et 30% de leur chiffre d’affaires), en raison de leur très important marché intérieur, les grandes compagnies américaines (United, Delta, American…) n’en ont pas moins salué «une étape positive dans le rétablissement de notre pays», selon le PDG de l’association professionnelle Airlines for America, Nicholas Calio.
Son organisation sœur européenne, Airlines for Europe, a quant à elle dit «applaudir» la décision de l’administration Biden, qui va «donner un élan particulièrement nécessaire au trafic et au tourisme transatlantiques, et réunir familles et amis».
Il s’agit d’un «grand pas en avant», qui va «doper la reprise de l’économie», a renchéri Willie Walsh, le directeur général de l’Association internationale du transport aérien (Iata), qui fédère 290 compagnies aériennes du monde entier, représentant 82% du trafic mondial.
Flou sur les voyages d’affaires
L’Iata demandait depuis des mois une approche des restrictions de mouvement «fondée sur la science», en prenant notamment en considération le statut vaccinal des voyageurs, et a salué dans l’annonce de Washington «un changement important dans la façon de gérer les risques» de contagion.
Le secteur aérien européen avait espéré que la réouverture aurait lieu avant la très active saison estivale, mais les Américains n’avaient pas emboîté le pas à l’Europe, qui avait ouvert ses frontières pendant l’été. Cet été, le trafic transatlantique avait atteint moins de 50% des niveaux de 2019.
L’ouverture «intervient un peu plus tard que ce que nous attendions, étant donné ce que nous savons sur l’efficacité des vaccins», a remarqué Colin Scarola, analyste au cabinet CFRA Research.
Mais, même si M. Smith, le patron d’Air France-KLM, s’est dit prêt à déployer davantage d’appareils pour relier Europe et États-Unis, la reprise risque d’être lente, a prévenu George Dimitroff, analyste chez Ascend by Cirium, entreprise spécialiste des données sur le transport aérien.
«Nous ne nous attendons pas à voir les compagnies augmenter leurs rotations tout de suite, sauf les liaisons les plus fréquentées, car certains appareils sont encore sous-utilisés», a-t-il affirmé, voyant «des améliorations plus grandes en mars 2022 quand les compagnies aériennes vont préparer leurs programmes d’été».
«Si vous ne remplissez pas un appareil à 75 ou 80%, le vol ne sera pas rentable, il vous faut des passagers des deux côtés», a aussi prévenu Burkett Huey, analyste chez Morningstar.
M. Dimitroff a également évoqué un «redécollage au quatrième trimestre des voyages d’affaires», très rentables pour les compagnies, mais qui ont été réduits à la portion congrue par la pandémie et le recours aux visioconférences.
Et, prévient d’ailleurs M. Scarola, la réouverture des frontières ne résout pas «l’incertitude sur les deux sujets majeurs pour une reprise des voyages d’affaires: comment la pandémie va-t-elle évoluer dans les prochains mois et est-ce qu’une grande partie des voyageurs vont avoir disparu à cause des outils de réunion virtuels désormais disponibles?»