Dans plusieurs interviews, accordées après la défaillance de FTX, Sam Bankman-Fried avait expliqué avoir pris ses distances, longtemps avant la faillite, avec la gestion d’Alameda, dont il restait l’actionnaire majoritaire, pour éviter tout conflit d’intérêts. (Photo: Getty Images)
L’ancienne figure des cryptomonnaies Sam Bankman-Fried a été bousculé dès le début de son contre-interrogatoire lundi dans son procès fédéral à New York, l’accusation égrenant, une à une, ses contradictions.
Lors de l’audition de «SBF» débutée la semaine précédente, son avocat Mark Cohen avait patiemment cherché à présenter, par ses questions et par les réponses de son client, un entrepreneur de bonne foi, prenant des décisions sensées, sans intention délictueuse.
Mais Danielle Sassoon, représentante du procureur fédéral de Brooklyn Damian Williams, a ostensiblement cherché, dès les premières minutes du contre-interrogatoire, à mettre en pièces cette ligne de défense assemblée durant sept heures d’audition, vendredi et lundi.
Elle a interrogé l’accusé sur une série de déclarations publiques et, à chaque fois, sur l’écart existant entre celles-ci et la situation ou le fonctionnement réel de ses sociétés.
«SBF» est jugé pour avoir organisé, à l’insu des clients, l’utilisation, illégale, de fonds déposés sur sa plateforme d’échanges de cryptomonnaies FTX, qui a fait faillite en novembre 2022.
L’argent pompé sur FTX alimentait les activités, souvent risquées, de sa société d’investissement Alameda Research.
Dans plusieurs interviews, accordées après la défaillance de FTX, Sam Bankman-Fried avait expliqué avoir pris ses distances, longtemps avant la faillite, avec la gestion d’Alameda, dont il restait l’actionnaire majoritaire, pour éviter tout conflit d’intérêts.
Pas coupé
«Dans l’ensemble, je ne prenais pas de décisions sur les transactions d’Alameda, mais je n’étais pas complètement coupé de ces opérations», a néanmoins reconnu lundi celui qui encourt jusqu’à 110 années de réclusion en cas de condamnation.
Depuis l’ouverture du procès, trois témoins clés d’anciens collaborateurs — ont affirmé que «SBF» était parfaitement informé de la situation financière de la société et n’avait rien fait pour modifier sa trajectoire.
La représentante du ministère public a également mentionné plusieurs déclarations et tweets affirmant que la protection des fonds des clients et des investisseurs était une «priorité», alors qu’Alameda a emprunté jusqu’à 14 milliards de dollars de dépôts de clients, souvent pour effectuer des transactions à haut risque.
«Je ne me souviens pas exactement», «Je ne suis pas sûr», a déclaré, inlassablement, l’accusé. À chaque fois, Danielle Sassoon produisait, en contrepoint, un document contenant une déclaration ou un écrit accablant.
La procureure a aussi évoqué les nombreuses interventions de Sam Bankman-Fried au Congrès (trois fois), lors desquelles il a milité pour davantage de régulation du secteur des cryptomonnaies.
«Avez-vous dit: que les régulateurs aillent se faire foutre?», a toutefois questionné Danielle Sassoon, prête à dégainer un nouveau document le démontrant. «Je l’ai dit une fois.»
L’accusation a aussi détaillé une série d’affirmations publiques de «SBF» selon lesquelles Alameda n’avait «aucun accès privilégié» à FTX.
Toujours sous le feu des questions de la procureure, «SBF» a néanmoins reconnu qu’Alameda bénéficiait d’une ligne de crédit pouvant aller jusqu’à 65 milliards de dollars, un montant qui en faisait une exception sur la plateforme.
L’ancienne idole des monnaies numériques a aussi confirmé qu’Alameda était autorisé à avoir un solde négatif dépassant la valeur de l’ensemble de ses garanties sans s’exposer à la fermeture de son compte, à la différence de tous les autres clients de FTX.