L’IRIS constate qu’il y a une forte prévalence de la pauvreté hors des grands centres. (Photo: La Presse Canadienne)
L’inflation rend la vie encore plus inabordable dans les régions éloignées tandis que les ménages n’ont pas de solution de rechange à la voiture.
C’est l’une des conclusions d’un rapport de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) sur le revenu viable hors des grands centres du Québec. «À mesure qu’on s’éloigne des grands centres, ça coûte de plus en plus cher pour atteindre un niveau de vie viable», résume le chercheur Guillaume Tremblay-Boily, en entrevue.
Dans plusieurs localités, la hausse des prix de l’essence a un effet double sur le coût de la vie. Elle augmente les coûts des déplacements (souvent des distances plus longues) et a un effet sur le transport des aliments vendus dans les communautés.
Le groupe de réflexion de gauche a développé en 2015 un indicateur de revenu viable. Il comprend les besoins essentiels, mais aussi les dépenses nécessaires pour «vivre dignement», par exemple des vacances, des sorties culturelles et des économies pour répondre aux imprévus.
Il existe donc des variations importantes entre les 33 localités analysées dans l’étude. Par exemple, Saint-Jean-sur-Richelieu en Montérégie se situe hors d’un grand centre, mais elle est relativement près de Montréal. À l’inverse, des localités comme Schefferville sur la Côte-Nord sont considérées comme des localités éloignées.
À Saint-Jean-sur-Richelieu, une personne seule a besoin de 31 000 $ pour avoir un revenu viable en 2023. À Schefferville, il en faut plutôt 45 500 $ pour vivre décemment.
Le coût de la voiture
Dans une municipalité desservie par un service de transport en commun, l’IRIS considère le coût de ce service public dans le revenu viable. Lorsque cette option n’est pas possible, il tient compte des coûts d’une voiture.
Même si le coût du logement est souvent moins élevé dans une localité éloignée, la variable du transport «pèse vraiment lourd» dans l’équation, souligne Guillaume Tremblay-Boily. «Le coût de posséder une voiture, c’est environ autour de 9000 $ par année tandis que le transport en commun, quand il existe, coûte généralement autour de 2000 $ par année, constate l’auteur de l’étude. Ça fait vraiment une différence pour l’atteinte du revenu viable.»
Même avec une faible densification, il est possible de trouver des solutions pour faciliter les déplacements des moins nantis. Guillaume Tremblay-Boily offre diverses pistes de solution: le service de navette, la possibilité qu’une municipalité loue une automobile à ses citoyens, le vélo électrique ou le service de taxi-bus.
Taux élevé de pauvreté
L’IRIS constate qu’il y a une forte prévalence de la pauvreté hors des grands centres. Dans 75% des localités recensées, plus de la moitié des résidants n’atteignent pas le revenu viable.
La population vieillissante avec des revenus de retraite insuffisants et la présence d’industrie saisonnière font partie des facteurs qui contribuent à cette situation.
«Il y a plusieurs des localités sur la Côte-Nord et en Gaspésie qui sont dévitalisées, où les revenus des gens sont assez faibles, souligne le chercheur. Évidemment, il y a des exceptions majeures comme les villes minières de Havre-Saint-Pierre et Fermont qui sont des villes où le revenu est beaucoup plus élevé que le revenu médian.»
Par Stéphane Rolland