Dev A. Coossa et Nicolas Pinto, les deux fondateurs du tout nouveau Angus Capital. (Photo : courtoisie)
La plupart des fonds investissent surtout pour appuyer une équipe en place et ainsi générer un rendement intéressant avec le capital qu’ils ont sous la main.
L’approche d’Angus Capital est tout autre. Disposant d’une trentaine de millions de dollars (M$) en capitaux propres, ce nouveau venu apparu en mai souhaite acquérir des PME québécoises ayant un bénéfice avant intérêts, impôts et amortissement de 2 M$ à 5 M$ afin de les diriger et de les pousser plus loin.
« On a trouvé une belle niche, explique en entrevue le cofondateur Nicolas Pinto. Il y a une grande place dans le marché pour ces PME traditionnelles. Il y a moins d’activité et moins d’acheteurs potentiels. Quand on regarde la démographie, on se rend compte qu’il y a beaucoup d’entrepreneurs vers la fin de leur carrière. Il y a davantage d’occasions pour ce segment. »
Ces PME passent un peu entre les craques des autres fonds qui visent soit des start-ups technologiques, soit des PME de plus grande taille. Angus Capital a choisi de se concentrer sur des PME qui sont présentes dans un de ces quatre domaines : manufacturier, distribution, santé et transformation alimentaire.
« Ce marché demande un investissement en temps qui n’est pas toujours possible pour un fonds qui a un grand montant à déployer, note l’autre cofondateur, Dev A. Coossa. Il y a de la valeur qui peut être créée dans ces tailles-là. »
Un associé-opérateur
Désirant être majoritaire, Angus Capital mise sur des PME ayant une rentabilité soutenable, un marché à fort potentiel et des leviers financiers adéquats. En réévaluant les objectifs stratégiques, le fonds espère ainsi réaliser des synergies, améliorer des processus et attirer des talents. Il compte cependant sur l’intégration d’un associé-exploitant d’expérience pour diriger l’entreprise.
« C’est un élément différenciateur, note Dev A. Coossa. Cette personne pourrait par exemple détenir 25 % de l’entreprise. Il s’agit d’un professionnel de son domaine qui va mener le plan de transformation qu’on veut faire. Ce partenaire-exploitant peut venir de l’interne ou de l’externe pour implanter cette nouvelle vision. »
Il ajoute aussi que l’arrivée de quelqu’un qui connaît l’industrie rassurera le vendeur, qui souvent a mis sa vie à bâtir son entreprise, ainsi que les employés pour qui le changement pourrait être source de stress.
Acquisitions en vue
D’ici trois ans, Angus Capital a comme stratégie de mettre la main sur quatre à six PME phares. À ces locomotives se grefferaient de plus petits joueurs dont les acquisitions viendraient diversifier l’offre de produit, créer des synergies ou tout simplement permettre d’atteindre de nouvelles zones géographiques. Au total, le fonds espère acquérir une douzaine de PME d’ici 2027.
« Prenons par exemple l’usinage de métal, un domaine super fragmenté, mentionne Dev A. Coossa. On retrouve plusieurs entreprises qui pourraient être des leaders dans un sous-secteur. Notre objectif, c’est d’en regrouper et de les moderniser pour les amener à un autre niveau, afin de devenir un chef de file canadien, nord-américain et pourquoi pas mondial. »
Pour y arriver, Angus Capital voudrait revamper les structures des PME sous son aile et favoriser leur automatisation et numérisation. Les meilleures pratiques d’une d’entre elles pourraient notamment servir de modèle pour les autres.
Miser sur la complémentarité
Angus Capital est constitué de cinq associés qui ont chacun un rôle à jouer. Dev A. Coossa, qui a déjà été responsable du groupe de restructuration chez KPMG, se chargera de tout ce qui touche les acquisitions, tandis que Nicolas Pinto se passionne davantage pour la gestion. Les deux fondateurs ont aussi débusqué d’autres partenaires.
Pierre Ste-Marie, un ancien patron du marché québécois pour KPMG ainsi que chef de la direction financière de Novatech, apporte sa connaissance du milieu de la PME. Stéphane Guérin, un ex-PDG de Hewitt Équipement, apporte une longue feuille de route à la tête d’entreprise et une expérience en matière de transactions, tandis que Claude-Etienne Fournier a dirigé de nombreuses entreprises, en plus d’avoir une formation comme ingénieur et d’avoir fait ses premiers pas dans une PME familiale d’Abitibi.
Ces cinq associés détiennent environ le quart d’Angus Capital tandis que le reste appartient à cinq familles d’investisseurs qui leur font confiance pour faire fructifier leurs avoirs.
Comptant mettre la main à la pâte, ces hommes souhaitent donc transmettre leur vision entrepreneuriale aux entreprises à la recherche d’une nouvelle direction. Et il y en aura beaucoup, selon l’Indice entrepreneurial 2022, qui rapporte que 60 % des propriétaires de PME espèrent se départir de leur bébé d’ici dix ans.
« On voit des entrepreneurs qui sont fatigués et qui veulent prendre leur retraite plus tôt qu’avant, mentionne Dev A. Coossa. Ils ne comptent pas attendre jusqu’à 70 ans. Certains ont envie d’un nouveau défi et désirent monétiser leur investissement. Cela nous donne plusieurs occasions. »
« On espère que notre présence aidera à assurer la pérennité de PME québécoises », résume Nicolas Pinto.