(Photo: La Presse Canadienne)
Ottawa — Face à la crise du logement, Ottawa met 5 milliards de dollars (G$) sur la table pour convaincre les provinces d’adopter certaines de ses priorités en matière de logement, y compris la charte des droits des locataires dont le gouvernement du Québec ne veut rien savoir, et impose une date butoir pour toucher les fonds: le 1er janvier 2025.
«On prend les grands moyens pour que les prix des maisons et des condos redeviennent décents en augmentant l’offre des logements rapidement», a résumé le premier ministre Justin Trudeau, mardi à Halifax, aux côtés de son ministre du Logement, Sean Fraser.
La somme sera versée depuis un nouveau fonds de 6G$ visant à construire et à mettre à niveau des infrastructures liées au logement, comme celles nécessaires à l’approvisionnement en eau potable, au traitement des eaux pluviales et à la gestion des déchets solides.
Le milliard restant sera versé aux municipalités afin de répondre à des «besoins urgents» en matière d’infrastructures qui permettront de créer «directement» des logements, précise le gouvernement fédéral.
Et Ottawa prévient les provinces qui ne signeront pas une entente d’ici l’«échéance» du 1er janvier 2025 que les fonds qui lui sont dédiés «seront transférés au volet municipal». Les territoires auront quant à eux trois mois supplémentaires.
M. Trudeau a d’ailleurs reconnu carrément en réponse à une question qu’il s’agit de «conditions» qu’il imposera aux provinces, mais a néanmoins insisté que «bien sûr» il travaillera en «partenariat» avec le Québec.
La charte canadienne des droits des locataires qu’Ottawa a annoncé vouloir créer la semaine dernière exigerait que les propriétaires fournissent un «historique clair» des loyers d’un appartement afin que les locataires puissent négocier «équitablement». Elle vise également à établir un bail standard à l’échelle nationale.
Or, Québec a récemment adopté son projet de loi 31 sur le logement, et il y a écarté l’idée d’un registre des loyers, jugeant la mesure trop dispendieuse.
Agacé, le ministre des Relations canadiennes, Jean-François Roberge, avait immédiatement répliqué que le gouvernement Legault ne tolérera pas un «nouvel envahissement» dans ses champs de compétences. Ottawa veut «arriver avec de nouvelles conditions, […] se mêler de nos affaires», s’était-il insurgé.
Dans cette négociation, Ottawa exigera également que les municipalités construisent plus de logements intermédiaires dont des duplex, des maisons en rangées et d’autres immeubles d’habitation, l’adoption de changements au Code national du bâtiment visant à soutenir des logements plus accessibles, abordables et respectueux de l’environnement, l’utilisation du catalogue fédéral de conception de logements qui sera bientôt rendu public, et la mise en œuvre d’une charte des droits des acheteurs.
Le premier ministre Justin Trudeau et bon nombre de ses ministres avaient prévu mardi pas moins d’une dizaine de conférences de presse aux quatre coins du pays pour dévoiler ces mesures en matière de logement qu’ils entendent inscrire dans le prochain budget fédéral devant être déposé dans deux semaines.
L’autre grande mesure dévoilée est l’ajout de 400 millions de dollars (M$) supplémentaires dans le Fonds pour accélérer la construction de logements. Les sommes visent notamment à encourager les municipalités à «réduire leurs lourdeurs administratives» et à investir dans le logement abordable. Ottawa calcule que cela permettra d’«accélérer» la construction de 12 000 logements en trois ans.
Le ministre du Logement, Sean Fraser, a indiqué qu’Ottawa dévoilera «au cours des prochaines semaines» son plan pour s’attaquer à la crise du logement. Il aura trois piliers: construire plus de maisons, s’assurer de venir en aide aux plus vulnérables, et des mesures visant à ce qu’il soit plus facile de louer ou d’acheter une maison.
Dans le cadre de ces annonces prébudgétaires, M. Trudeau avait dévoilé en grande pompe la veille que le prochain budget fédéral comprendra le financement d’un programme national d’alimentation scolaire qui visera à fournir des repas à 400 000 enfants de plus par an à travers le pays.
Michel Saba, La Presse Canadienne
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