Mes employés passent en deuxième, voire en troisième!
Le courrier des lecteurs|Publié le 12 octobre 2023En ignorant les employés, c’est impossible que la population n’en soit pas impactée. (Photo: 123RF)
Un texte de Kévyn Gagné, CRIA, M. Sc., directeur des ressources humaines, Franklin Empire
COURRIER DES LECTEURS. Parfois, si on ne dit pas la vérité, ce n’est pas que l’on veuille mentir, c’est peut-être que nous voulons rendre ça plus beau ou moins pire que ce ne l’est en réalité. À moins que le but inavoué soit de détourner notre regard du problème pour ne pas voir l’incompétence des gens qui tentent d’apporter des solutions.
Ainsi, si vous travaillez pour la Ville de Montréal, on se fout de vous! À vrai dire, on ne se fout pas juste de vous, puisque l’Administration de la ville est totalement déconnectée de la réalité de ses travailleurs et de son service des ressources humaines.
Dans son énoncé sur le resserrement budgétaire 2023-2024, la Ville de Montréal nous prouve ces jours-ci que les 28 000 employés de la ville sont incompris, non reconnus, au bout du rouleau, et on nous confirme du même coup que la situation n’ira que de mal en pis. Tout ceci pour s’assurer que le compte de taxes des Montréalais ne soit pas plus élevé que l’inflation.
La ville veut rendre les mêmes services, soi-disant bons, tout en suspendant le processus de dotation de plus de 400 postes vacants de cols bleus, de cols blancs, de professionnels, et plus de 150 postes de cadre.
Ce matin, mes oreilles ont commencé à bourdonner lorsque j’ai entendu dire qu’il revenait aux ressources humaines d’évaluer les employés. Non pas au superviseur ou au gestionnaire auquel se rapporte l’employé, mais bien aux ressources humaines. Pourquoi s’intéresser à ses employés si nous pouvons déléguer cette tâche ingrate?
Si ce n’est pas du je-m’en-foutisme, c’est un signe d’incompétence ou d’incompréhension. Qu’importe la raison, ça regarde mal pour les employés.
Donc, à partir de ce constat d’échec de l’administration et de son incompréhension de la réalité au nom du citoyen, je me suis davantage intéressé à la question.
Ainsi, en ne pourvoyant pas les 400 postes actuellement affichés, on prévoit faire des économies, mais on prévoit surtout qu’aucun service à la population ne sera impacté. On assure que la population ne verra rien puisque ce seront les employés actuels qui seront appelés à contribuer davantage.
Comme si ces 28 000 employés n’étaient pas des citoyens eux-mêmes; comme si ces 28 000 employés n’étaient pas déjà surtaxés et surmenés; comme s’ils ne faisaient pas déjà le travail pour 2 personnes afin de couvrir les 400 employés manquants et couvrir les milliers d’employés en invalidités et arrêts de travail.
Donc, l’employé déjà débordé ne sera pas impacté. Ni positivement ni négativement!
Comment est-ce possible? Je ne le sais pas… à moins que l’on se foute totalement de ses employés.
Ou, à moins que les employés n’aient même pas été considérés dans l’équation de l’équilibre budgétaire. Après tout, on sert la population, et non nos employés.
L’employé ne sera pas impacté? L’employé est surtout évacué de tous discours, de tout plan d’action, et rien n’est mis en place pour le mobiliser, pour le retenir, pour le motiver, et pour le reconnaître.
Car si c’était le cas, on pourvoirait ces postes pour les laisser respirer un peu.
En ignorant ses employés, c’est impossible que la population n’en soit pas impactée. En ne pourvoyant pas les postes vacants, pour lesquels les besoins de comblement ont été justifiés et budgétisés, c’est impossible que les services à la population ne soient pas impactés.
Peut-être qu’en plus d’être déconnectée de ses employés, l’Administration de la Ville de Montréal vit peut-être dans un monde imaginaire et parallèle, un peu à l’image qu’elle se fait de son propre service des ressources humaines.
Être capable de gérer du cash ne veut pas dire être capable de gérer du monde!
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