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«Microsoft est une techno sous-estimée»

Stéphane Rolland|Mis à jour le 15 avril 2024

MARCHÉS EN ACTION. Comment avez-vous ajusté vos modèles dernièrement ?

STÉPHANE ROLLAND – Vous recourez à l’analyse macroéconomique pour choisir vos thèmes d’investissement. Puis, vous recourez à l’analyse technique pour choisir le meilleur moment pour faire vos choix. Comment avez-vous ajusté vos modèles dernièrement ?

PHILIPPE PRATTE – On a mis à jour nos filtres pour faire une place aux titres «valeurs» l’automne dernier. Depuis la fin 2008, nous jugions que nous n’avions plus besoin d’être en «valeur». Nous étions seulement en «croissance». Par exemple, nous étions plus téméraires après la correction de 2011 et ça a été payant, mais maintenant, nous sommes un peu plus prudents. On sait que nous sommes en fin de cycle, mais personne ne sait exactement où on se situe dans cette phase. Les cycles haussiers n’ont pas de date de préemption, même si on sait qu’ils se terminent souvent après 7 à 10 ans.

S.R. – Justement, le cycle haussier a eu une longue durée. En voyez-vous la fin ?

P.P. – Il y a beaucoup d’incertitude quant à ce que nous dit l’analyse technique. Les résultats du premier trimestre ont dissipé les craintes. Tant qu’on a une augmentation des bénéfices de sociétés, un repli de marché offre une occasion. Quand on regarde l’analyse technique, la direction des marchés à court terme est difficile à anticiper, car nous sommes à un tournant. Le déclin récent pourrait être une brève pause avant les prochains gains, comme il pourrait marquer le début d’une correction plus importante. Les investisseurs sont nerveux quant à une possible guerre commerciale alors qu’on vient d’atteindre de nouveaux sommets. Il y a un risque qu’une normale prise de profit se transforme en contagion. Les remontées ont été rachetées beaucoup moins vite. À partir de décembre, on voyait que les replis du marché se faisaient racheter rapidement. Il pourrait y avoir un retournement qui nous donne confiance, mais présentement (l’entrevue a été réalisée le 9 mai 2019), nous sommes aux aguets.

S.R. – Quelle société est sur votre écran radar ?

P.P. – On détient Microsoft (MSFT, 125,50 $ US) depuis un bon moment. Elle est devenue une entreprise de services qui est basée sur les abonnements, ce qui génère beaucoup de flux de trésorerie. Ils ont de bons produits avec la division d’infonuagique, Office et les jeux vidéo. Ils gagnent des parts de marché. On pense que leurs revenus vont croître de 10,8 % l’année prochaine. D’après moi, c’est une entreprise technologique sous-estimée. Son ratio cours/bénéfice est à environ 27 fois et le rendement du dividende est de 1,48 %.

S.R. – Dans le segment de l’infonuagique, Google veut intensifier la concurrence dans un marché dominé par Amazon et Microsoft. Y a-t-il un risque ?

P.P. – Dans l’infonuagique, je préfère de loin Microsoft à Amazon ou Google. En tant que client, je préfère les services de Microsoft, car on juge qu’elle donne plus de flexibilité à ses clients, qui détiennent la suite de ses produits. Google va continuer sa croissance, mais le marché va croître suffisamment pour faire de la place à tout le monde.

S.R. – Quel secteur trouvez-vous attrayant ?

P.P. – On a augmenté un peu nos positions dans les matériaux. À la fin du mois d’avril et au début de mai, on a acheté des producteurs d’or; c’est une forme de protection contre le risque lorsque nous sommes en fin de marché. Le dollar américain est relativement élevé par rapport au dollar canadien et l’or va nous protéger d’une fluctuation de devise. On commence tranquillement à remettre un peu d’argent dans le secteur de l’énergie. Le baril de pétrole se promène entre 60 $ US et 62 $ US. On trouve ce prix attrayant quand on examine les ratios cours/bénéfice que nous pouvons aller chercher chez certaines entreprises du secteur qui ont de bons flux de trésorerie. Ça pourrait être encore plus intéressant si le prix du pétrole avançait de 10 %. Mais, c’est vraiment de petites participations dans les deux secteurs. On met un orteil, on ne plonge pas.

S.R. – Vous parlez de l’or pour protéger contre une baisse du dollar américain. Est-il le temps pour un investisseur canadien de se protéger contre le risque de devise quand il investit aux États-Unis ?

P.P. – Si je devais acheter un FNB d’actions américaines, j’aurais tendance à choisir celui couvert contre le risque de devise. Il y a souvent une corrélation inverse entre le dollar américain et le marché américain, ce qui fait en sorte que le dollar américain a tendance à monter lorsque le marché baisse. Indirectement, ça procure une sorte de protection contre les baisses aux investisseurs canadiens, mais ça leur enlève une partie des rebonds. Le dollar américain s’est apprécié en raison de la baisse récente du S&P 500. Pour cette raison, je n’achèterais pas de dollar américain en ce moment.