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Nouveau programme de la CAQ pour recruter des préposés

La Presse Canadienne|Publié le 13 février 2024

Nouveau programme de la CAQ pour recruter des préposés

Le ministre de la Santé, Christian Dubé (Photo: La Presse Canadienne)

Le gouvernement Legault tente de nouveau d’attirer des aspirants préposés aux bénéficiaires (PAB) avec un programme qui offre une formation écourtée en plus d’une bourse de 12 000$. 

Québec espère ainsi recruter 1000 nouveaux PAB avec l’objectif de former davantage de personnel travaillant en soutien à domicile. Le gouvernement vise à ce que les nouvelles cohortes puissent être à l’œuvre d’ici l’automne 2024. Il assure d’ailleurs aux futurs préposés qu’ils auront un emploi dès l’obtention de leur attestation.

La nouvelle formation qui sera offerte partout au Québec dans les centres de formation professionnelle sera de 705 heures, réparties sur environ cinq mois, comparativement au programme régulier qui contient 870 heures. 

En ce qui a trait à la bourse de 12 000$, l’enveloppe sera divisée en trois: deux versements de 4000$ seront attribués durant la formation et devront être remboursés advenant un abandon ou un échec et les étudiants ayant obtenu leur attestation d’études professionnelles auront accès à un autre montant de 4000$. La bourse est conditionnelle à un engagement de six mois à travailler dans le réseau de la santé.

Cet élément est essentiel pour assurer une relève, selon le co-porte-parole de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, et il y voit une incohérence avec le programme de formation accéléré pour le domaine de la construction annoncé cette année par le ministre du Travail, Jean Boulet.

«Dans le cas [du programme pour les préposés aux bénéficiaires], on exige quand même que les gens aillent travailler dans le réseau pendant un certain temps, ce qui n’a pas été fait quand on a lancé un programme pour la construction. Il y a quand même une incohérence que moi je m’explique mal», a déclaré Gabriel Nadeau-Dubois. 

«C’est de l’argent public qui va dans la rémunération de ces formations, on s’attendrait à ce que ça vienne avec des garanties de travailler dans le domaine approprié.»

Gabriel Nadeau-Dubois a tout de même salué l’initiative du gouvernement Legault pour contrer la pénurie de main-d’œuvre. «En matière de vieillissement à la population, on a tout un défi de société. À Québec solidaire, les solutions qui fonctionnent et qui nous permettent de relever ces défis-là, on ne va pas les critiquer juste parce qu’elles viennent de la CAQ. Ce programme-là, c’est une bonne idée, c’est un bon programme.»

Du côté du Parti libéral du Québec, le chef intérimaire Marc Tanguay a dit qu’il attendrait les résultats du programme avant de le juger. «Oui, c’est un autre pas dans la bonne direction, mais investit-il de l’argent de façon efficiente et quels sont les résultats? C’est un gouvernement qui ne nous a pas habitués à avoir — dans tous les dossiers — des résultats tangibles. Pis ça, eh bien on jugera l’arbre à ses fruits.»

 

Pallier le manque de formation

Les préposés aux bénéficiaires qui travaillent en soins à domicile portent le titre d’auxiliaire aux services de santé et sociaux (ASSS) et ils doivent se rendre à la résidence des personnes en perte d’autonomie. Leurs tâches de travail consistent à veiller au bien-être et à l’hygiène du patient, installer certains appareils et donner des soins pour lesquels il a été formé. 

La Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS-CSN), la plus grande organisation syndicale en santé et services sociaux, est inquiète du nouveau programme raccourci.

Guillaume Clavette, représentant de la catégorie du personnel paratechnique, des services auxiliaires et des métiers à la FSSS-CSN, a fait valoir dans un communiqué que le personnel actuel allait devoir aider leurs nouveaux collègues sans expérience. «On met la charge de former les nouveaux sur les épaules du personnel qui est en pénurie», a-t-il affirmé.

«En enlevant 165 heures de formation, les nouveaux employés seront moins préparés à vivre les particularités des soins à domicile: patients violents, travail isolé, appartement insalubre, santé mentale, etc., a expliqué Guillaume Clavette. Encore une fois, au lieu de valoriser et de rendre attractifs les emplois, on les dévalue.»

Le Syndicat québécois des employées et employés de service, affilié à la FTQ, espère quant à lui que cette annonce marquera un tournant dans la prestation publique de service à domicile. 

Dans un communiqué, la présidente du syndicat, Sylvie Nelson, soutient qu’à l’approche de l’interdiction de faire appel aux agences de placement, Québec doit embaucher davantage pour renforcer les équipes de soins à domicile, qui dépendent trop souvent des agences de placement pour assurer les services. 

«Avec le vieillissement de la population, la volonté de vieillir chez soi et le virage nécessaire vers les soins à domicile et la fin de l’appel aux agences de placement, il faudra plus d’une cohorte de 1000 ASSS pour répondre aux besoins. Il est nécessaire de mettre en place des mesures d’attraction et de rétention fortes», a fait valoir Sylvie Nelson.

 

Les défis du vieillissement de la population

Le programme accéléré annoncé mardi fait suite à une autre formation courte, lancée en mai dernier, qui a permis de former 3000 PAB pour travailler en centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) et dans les maisons des aînés. 

Le gouvernement Legault avait déjà usé de cette tactique de recrutement en 2020, alors que la crise sanitaire battait son plein. Une bourse pouvant atteindre 9210$ visait à attirer 10 000 nouveaux visages. De ce lot, plus de 7500 PAB sont toujours en poste, selon le ministère de la Santé.

«Dans le contexte actuel du vieillissement de la population, il est de notre responsabilité de miser sur les options à l’extérieur des infrastructures propres de notre réseau de la santé», a soutenu le ministre de la Santé, Christian Dubé, dans un communiqué.

La commissaire à la santé et au bien-être, Joanne Castonguay, indiquait dans un rapport au début de l’année que d’ici 2040, les besoins en services, tant à domicile qu’en CHSLD, nécessiteront l’équivalent de 571,9 millions d’heures de services. Les dépenses des soins et services devraient presque doubler, en augmentant de 8,9 milliards de dollars pour s’établir à 16,5 milliards. Le vieillissement de la population devrait accroître les besoins en soin à domicile au cours des prochaines années.

Dans un précédent rapport, Mme Castonguay soulignait que les dépenses en soins à domicile et en services communautaires par habitant en 2021-2022 au Québec étaient parmi les moins élevées au Canada, avec celles de l’Ontario, de l’Alberta et du Nouveau-Brunswick.