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ONU: les crises mondiales ne doivent pas détourner du climat

La Presse Canadienne|Publié le 06 juin 2022

ONU: les crises mondiales ne doivent pas détourner du climat

La communauté internationale avait alors réaffirmé l'objectif — pour l'heure hors d'atteinte — de contenir le réchauffement à 1,5 °C alors que nous sommes déjà à 1,1 °C depuis que l'humanité a commencé à utiliser industriellement les énergies fossiles. (Photo: 123RF)

Paris — Les crises qui secouent le monde ne doivent pas entraver la lutte contre la crise climatique, déjà trop timorée, a plaidé la patronne de l’ONU-Climat lundi, en ouvrant des pourparlers censés donner un élan à la prochaine conférence climat de novembre en Égypte.

Les représentants de près de 200 pays sont réunis pour 11 jours de «session intermédiaire» à Bonn, siège de l’agence spécialisée onusienne, pour tenter de concrétiser l’ambition affichée il y a six mois, lors de la COP26 de Glasgow.

La communauté internationale avait alors réaffirmé l’objectif — pour l’heure hors d’atteinte — de contenir le réchauffement à 1,5 °C alors que nous sommes déjà à 1,1 °C depuis que l’humanité a commencé à utiliser industriellement les énergies fossiles.

Depuis, le monde a été ébranlé par l’invasion russe de l’Ukraine et ses répercussions sur les marchés énergétique et alimentaire, faisant souvent passer la crise climatique à l’arrière-plan, malgré la publication d’un nouveau rapport alarmant du GIEC, les experts climat de l’ONU.

«Il n’est pas acceptable de dire que nous vivons des temps difficiles» pour justifier l’inaction, car «le changement climatique n’est pas une question que nous pouvons repousser à plus tard,» a martelé en ouvrant les pourparlers la Mexicaine Patricia Espinosa, patronne sortante de l’ONU-climat.

 

«Décisions très difficiles»

Des points clés restent en suspens à quelques mois de la prochaine COP27, du 7 au 18 novembre à Charm el-Cheikh, station balnéaire sur la mer Rouge.

Et en premier lieu la réduction des émissions de gaz à effet de serre responsables du réchauffement. «Nous sommes loin de là où la science nous dit que nous devrions être», a insisté Mme Espinosa, prévenant «qu’il va falloir prendre des décisions très difficiles».

Le «pacte climatique» conclu à Glasgow enjoignait aux pays de «revisiter et renforcer» leurs objectifs pour «les aligner» avec ceux de l’accord de Paris «d’ici la fin de 2022». «Il nous faut ces plans!» a lancé la patronne d’ONU-Climat, appelant à «faire avancer ces négociations plus vite».

L’accord de Paris, clé de voûte de la lutte contre le changement climatique, vise à «contenir l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels» et si possible à 1,5 °C.

Or, de nombreux pays ne tiennent déjà pas leurs engagements actuels, ce qui met les objectifs de Paris «hors de portée», selon les experts du GIEC. Ceux-ci estiment que le monde est pour l’instant sur une trajectoire catastrophique de réchauffement de 2,8 °C.

L’absence de nouveaux engagements chiffrés à quelques mois de la COP27 illustre la «déconnexion entre les preuves scientifiques d’une crise mondiale en préparation, avec des impacts climatiques inimaginables, et le manque d’actes,» se désole Johan Rockström, directeur de l’Institut de recherche sur l’impact du changement climatique à Potsdam (PIK).

 

«Attentes claires»

Autre dossier brûlant, l’aide des pays riches, souvent les plus gros émetteurs historiques, aux plus pauvres, les moins responsables du réchauffement, mais souvent en première ligne de ses impacts.

La promesse de les aider à faire face aux défis du changement climatique à hauteur de 100 milliards de dollars américains par an en 2020 n’est toujours pas tenue. Et face à la multiplication des sécheresses, inondations et incendies ou de la montée inexorable des océans, c’est le financement spécifique des «pertes et préjudices» subis qui est désormais sur la table.

Les pays riches avaient bloqué cette demande à Glasgow, avec un compromis final sur la création d’un cadre de «dialogue» jusqu’à 2024 pour «discuter des modalités pour le financement».

Cette «question controversée doit être abordée d’une manière constructive et tournée vers l’avenir», a souhaité Mme Espinosa, plaidant également pour un meilleur financement de l’adaptation aux effets du réchauffement.

Car la méfiance perdure. Bonn ne doit pas être «juste un autre forum de discussions», a averti l’Alliance des petits États insulaires (Aosis), qui exigent de repartir avec «une vision claire sur le quand et le comment (quant à l’application du) financement spécifique des pertes et préjudices».

Et pour Climate Action Network, principale fédération mondiale d’ONG environnementales, ces négociations doivent «définir des attentes claires et préparer les principales mesures» à concrétiser à Charm el-Cheikh, en «se concentrant sur les besoins de ceux qui sont le plus durement frappés par les impacts de la crise climatique».