Peu d’intérêt pour les remboursements des taxes sur le carbone
La Presse Canadienne|Publié le 25 janvier 2022Les résultats publiés cette semaine dans la revue scientifique «Nature Climate Change» indiquent que non seulement les remises n’ont pas fait beaucoup de différence dans l’opinion publique, mais que les Canadiens ne les comprennent pas très bien. (Photo: La Presse Canadienne)
Les remises sur les taxes sur le carbone n’ont pas aidé les Canadiens à s’y intéresser, selon une nouvelle étude.
Les résultats publiés cette semaine dans la revue scientifique «Nature Climate Change» indiquent que non seulement les remises n’ont pas fait beaucoup de différence dans l’opinion publique, mais que les Canadiens ne les comprennent pas très bien.
Et ceux qui étaient convaincus qu’ils payaient plus en taxes carbone qu’ils n’en recevaient restaient tout aussi convaincus, même lorsque les faits leur ont été présentés.
«La partisanerie a eu un impact important, non seulement sur le fait que les gens étaient favorables à l’idée d’une tarification du carbone, mais sur leur perception des faits», a déclaré la co-auteure de l’étude, Kathryn Harrison, de l’Université de la Colombie-Britannique.
Mme Harrison a mentionné qu’elle et ses collègues voulaient étudier si les remises sur le carbone — rendre l’argent aux contribuables pour compenser ou même dépasser le montant qu’ils avaient payé en taxes sur le carbone — rendraient la politique plus acceptable.
«Le Canada a été l’un des deux premiers pays à faire cela. Il y avait une opportunité de vérifier systématiquement quel était l’impact de la politique», a précisé Mme Harrison.
L’équipe a réalisé l’étude auprès des Canadiens entre le début de 2019 et mars 2020. Ils ont étudié les provinces de la Saskatchewan et de l’Ontario, dont les résidents bénéficient du remboursement fédéral ; le Québec, qui utilise un système de plafonnement et d’échange pour réduire le carbone ; la Colombie-Britannique, qui a une taxe provinciale sur le carbone sans rabais ; et l’Alberta, qui s’est retrouvée sur le programme fédéral à mi-parcours de l’étude lorsqu’elle a annulé son prélèvement provincial.
Les répondants ont été interrogés après l’annonce du plan de remise, après sa mise en œuvre, après la distribution des premières remises, après l’élection fédérale de 2019 et un an après l’annonce initiale. La taille de l’échantillon était de 3313 répondants au début et de 899 répondants à la fin du cinquième sondage.
«Il n’y avait pas de magie», a tranché Mme Harrison.
L’étude a révélé, tout au plus, des changements mineurs dans le soutien à la tarification du carbone au fil du temps dans les cinq provinces. La Colombie-Britannique, qui n’offre pas de rabais, a affiché la plus forte augmentation d’environ 10 points de pourcentage. Aucune province n’a affiché de baisse.
Il y avait de grands écarts de soutien entre les répondants qui s’identifient comme libéraux et conservateurs.
Mais les chercheurs ont découvert que près de la moitié des répondants de l’Ontario et environ un quart de ceux de la Saskatchewan ne savaient même pas qu’ils avaient obtenu un remboursement. Ceux qui l’ont fait ont constamment sous-estimé le montant de 40% en moyenne en Ontario et de 32% en Saskatchewan.
Lorsque les chercheurs ont montré aux répondants le vrai montant de leur remise, un calcul simple qui ne nécessite aucune donnée fiscale, les commentaires se sont à nouveau divisés en fonction de l’affiliation politique.
«Après avoir appris combien ils recevaient, les électeurs conservateurs étaient plus susceptibles de déclarer qu’ils étaient des perdants nets, qu’ils payaient plus d’impôts qu’ils ne recevaient», a déclaré Mme Harrison.
«Ils ont dû augmenter leur estimation du montant qu’ils payaient à l’avance, a-t-elle lancé. (Ils) semblent avoir ajusté leurs croyances afin de soutenir leur position d’opposition à la taxe fédérale sur le carbone.»
Lorsque les chercheurs ont mené des enquêtes similaires en Suisse, l’autre pays à avoir mis en place un système de remboursement sur le carbone, Mme Harrison a affirmé que les conclusions étaient similaires.
Selon elle, les résultats sont décourageants pour ceux qui pensent que la population est composée d’acteurs rationnels évaluant froidement les informations et agissant au mieux de leurs intérêts.
«Rendre de l’argent aux gens ne change pas automatiquement leur attitude», a mentionné Mme Harrison.
«Les Canadiens reçoivent leurs avis sur ce type de politique de la part de personnes en qui ils ont confiance, qu’il s’agisse de groupes d’intérêt ou de politiciens. Dans de nombreux cas, ils fondent ces positions sur des informations inexactes», a-t-elle tranché.