Les cinq chefs de parti ont pu croiser le fer pour la première fois depuis le début de la campagne électorale à l’occasion d’un «Face à Face», diffusé sur les ondes du réseau TVA. (Photo: La Presse Canadienne)
Québec — Les cinq chefs de parti ont pu croiser le fer pour la première fois depuis le début de la campagne électorale, jeudi, à l’occasion d’un «Face à Face», diffusé sur les ondes du réseau TVA, un exercice qui n’a donné lieu à aucun dérapage majeur.
Les attaques ont surtout visé le premier ministre sortant, François Legault, qui devait défendre son bilan des quatre dernières années.
Prudent, M. Legault a réussi à garder son calme, même si ses adversaires ont bien tenté de le faire sortir de ses gonds, notamment sur sa perception des immigrants.
En matière d’immigration, la cheffe libérale Dominique Anglade a affirmé que lorsque M. Legault parlait d’immigration c’était toujours «de façon négative», la présentant comme une menace et en l’associant à la violence.
Le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon a lancé à M. Legault qu’il avait «perdu le contrôle de l’immigration».
M. Legault a dit que l’immigration était une richesse, en ajoutant que le premier ministre du Québec devait assurer l’avenir du français.
Le chef conservateur, Éric Duhaime, s’est fait questionner sur les «valeurs occidentales» qu’il veut prioriser au moment de sélectionner les immigrants.
La défense de la langue française a donné lieu à quelques vifs échanges sur la pertinence de la loi 96, incluant les arguments pour ou contre l’accès au cégep anglophone.
M. St-Pierre Plamondon a accusé M. Legault d’être «l’auteur de l’anglicisation la plus rapide de l’histoire du Québec».
La question de l’environnement et de la lutte aux changements climatiques a aussi illustré les différences entre les partis.
La cheffe libérale a reproché au chef conservateur Éric Duhaime de vouloir ramener le Québec «à 1950», parce qu’il fait la promotion de l’exploitation des hydrocarbures.
M. Duhaime a tenté, sans succès, de forcer M. Legault à s’engager à publier avant la fin de la campagne électorale toutes les études menées par son gouvernement sur la pertinence de construire un troisième lien entre Québec et Lévis.
La lutte à l’inflation, les promesses de hausses de taxes et de baisses d’impôts ont aussi donné lieu à plusieurs échanges. M. Nadeau-Dubois a dû défendre son projet de surtaxe pour les citoyens les plus fortunés.
En santé, la promesse de Mme Anglade de faire en sorte que tous les Québécois aient accès à un médecin de famille a été mise en doute par ses adversaires. Elle a soutenu que son engagement était réaliste et qu’il ne fallait pas baisser les bras. Celle-ci est passée à l’attaque contre M. Legault en affirmant qu’il avait échoué à ce chapitre, et «après 25 ans en politique, ça ne peut pas être toujours la faute des autres».
La gestion de la pandémie a été abordée et M. Duhaime en a profité pour réaffirmer son opposition aux mesures sanitaires, dont le confinement et le couvre-feu, accusant M. Legault d’avoir «infantilisé» les citoyens et d’avoir été «le pire “confineur” du continent». Ce dernier a répliqué en affirmant qu’il avait agi ainsi «pour sauver des vies», lui reprochant son manque de solidarité.
Animée par Pierre Bruneau, la confrontation de deux heures aura permis aux électeurs de mieux connaître les idées des différents leaders, et surtout d’apprécier leur personnalité, leur style, leur sens de la répartie.
Ces grands rendez-vous télévisés des campagnes électorales sont très suivis et marquent souvent un point tournant. En 2018, le Face à Face TVA avait été regardé par près d’un million de téléspectateurs. L’exercice peut s’avérer utile, quand on sait que les sondages indiquent qu’un électeur sur trois ne sait pas pour qui voter ou affirme qu’il pourrait changer d’idée.
À leur arrivée sur place, en début de soirée, au studio de Montréal, les chefs de parti ont été accueillis par une poignée de militants environnementaux venus réclamer des engagements clairs dans la lutte aux changements climatiques. Certains sont allés leur parler, (Paul St-Pierre Plamondon, du Parti québécois, Dominique Anglade, du Parti libéral du Québec, et Gabriel Nadeau-Dubois, de Québec solidaire), mais les deux autres (le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, et le chef du Parti conservateur du Québec, Éric Duhaime), ont préféré les ignorer.
M. Legault a une longue expérience de ce type d’exercice, ayant vécu les débats des campagnes de 2012, 2014 et 2018, mais pour les quatre autres ce fut une première expérience.
Parfois cacophonique, mais en général plutôt discipliné, le débat était axé autour de trois thèmes: l’environnement, la qualité de vie et l’économie, puis la santé, la famille et l’éducation, et enfin l’immigration, la langue et l’identité. Les échanges sur chaque sous-section étaient très brefs, laissant peu de latitude aux participants.
Un deuxième débat aura lieu sur les ondes de Radio-Canada, jeudi prochain, le 22 septembre.