QS veut aller chercher 2,65 G$ dans la poche des «riches»
La Presse Canadienne|Publié le 06 septembre 2022Le parti de gauche, dirigé par Gabriel Nadeau-Dubois (sur la photo) et Manon Massé, estime que les Québécois les plus fortunés doivent contribuer davantage au financement des missions de l’État. (Photo: La Presse Canadienne)
Gatineau — L’augmentation de la contribution fiscale de 5% des citoyens les plus riches n’entraînera pas un exode des capitaux ou la perte des sièges sociaux, assure Gabriel Nadeau-Dubois. Le chef parlementaire de Québec solidaire veut que les Québécois les plus fortunés contribuent davantage au financement des services publics.
M. Nadeau-Dubois a expliqué qu’un gouvernement solidaire aurait besoin de ressources financières pour améliorer les services en santé et en éducation, pour lutter contre les changements climatiques et pour aider les ménages à contrer les effets de l’inflation, lors d’un point de presse, mardi, à Gatineau. «On a besoin de moyens pour lutter contre les changements climatiques pour construire un avenir. Et non, l’argent, ça ne pousse pas dans les arbres, on va aller le chercher.»
Le parti de gauche propose deux mesures: un impôt supplémentaire sur les grandes fortunes et un impôt sur la succession. Il estime pouvoir récolter 2,65 milliards de dollars avec cette proposition.
La fiscalité des plus fortunés fait débat parmi les économistes. Les partisans estiment qu’une imposition plus élevée des grandes fortunes pourrait financer les services publics et réduire les écarts de richesse. Les détracteurs affirment que de telles mesures pourraient entraîner des conséquences contre-productives comme un exode des capitaux vers un pays où la fiscalité est plus avantageuse.
Le spectre d’un exode des richesses serait un phénomène plutôt rare lorsqu’on leur demande une contribution fiscale plus importante, affirme le candidat dans Hull et professeur à l’Université du Québec en Outaouais, Mathieu Perron-Dufour, qui était présent à l’annonce.
«Évidemment, on brandit le fantôme, car on ne la veut pas, la taxe, mais, dans les faits, il y a plein d’autres facteurs qui déterminent ce pour quoi on choisira un endroit ou un autre pour habiter, répond l’économiste. Ça (la fiscalité) en est un parmi tant d’autres et il n’est pas dominant.»
La proposition d’impôt supplémentaire de 35% sur les successions de plus de 1 million de dollars (M$) soulève toutefois des questions sur la protection des sièges sociaux au Québec. En 2014, le Groupe de travail sur la protection des sièges sociaux formé à la demande du gouvernement péquiste de Pauline Marois avait identifié l’impôt à la succession comme un obstacle au maintien des sièges sociaux au Québec.
L’idée est qu’au décès du fondateur d’une entreprise, la succession pourrait devoir vendre des actions de leur entreprise pour payer l’impôt sur la succession. Les actions d’une entreprise familiale risqueraient ainsi d’être acquises par des acheteurs hors Québec et le contrôle pourrait passer à des intérêts étrangers.
Questionné sur le sujet, M. Nadeau-Dubois a écarté ce risque. Il a souligné que l’impôt sur la succession était présent dans d’autres pays européens et affirmé que la vente d’actions à des intérêts étrangers n’était pas un phénomène qui avait été constaté ailleurs.
«Il y a 24 des 37 pays de l’OCDE qui ont un impôt sur les successions et ce n’est pas des phénomènes qui se sont produits là-bas. Je ne vois pas pourquoi, ça se convient ici. En fait, le Québec est plutôt une exception dans les pays développés.»
Quant à l’impôt sur l’actif net, la mesure prévoit un impôt de 0,1% supplémentaire pour les citoyens qui ont un actif net de 1M$ à 10M$.
Pour cette tranche, cela représenterait un impôt supplémentaire de 1000$ par tranche de 1 million $. Autrement dit, un particulier avec un actif de 10 M$ paierait un impôt supplémentaire de 9000$.
Précisions que l’actif net tient également compte des dettes. Par exemple, un particulier qui détient des immeubles à logement d’une valeur de 1,5M$, mais qui aurait une hypothèque de 700 000$, ne serait pas touché par cette mesure.
Pour la tranche de 10M$ à 99M$, le taux d’imposition grimpe à 1%. Au-delà de 100M$, le taux est de 1,5%.
Le chef de la Coalition avenir Québec et le premier ministre sortant, François Legault, a dit que le contexte économique n’est pas approprié pour une augmentation du fardeau fiscal.
«Demain, on s’attend à une augmentation des taux d’intérêt. Québec solidaire, là, annonce depuis trois jours des nouvelles taxes au plus mauvais moment. Ça n’a vraiment pas de bon sens, avec l’augmentation des taux d’intérêt, d’aller annoncer que les Québécois vont avoir plus de taxes. Quel sera l’impact sur l’économie? Il ne faut pas avoir évalué ça», a dit M. Legault.