La fabrication locale des composants de produits d'emballage fait partie des solutions innovantes pour l'avenir. (Photo:123RF)
INDUSTRIE DE L’EMBALLAGE. Repenser les emballages incite tous les acteurs de cette industrie, mais aussi les entreprises clientes, à faire preuve d’innovation afin de proposer des solutions réellement écoresponsables.
Favoriser des emballages dont les composants sont fabriqués localement, et dont on connaît les débouchés postconsommation, fait partie des solutions innovantes que salue l’équipe d’Agro Québec, un organisme qui accompagne les entreprises agroalimentaires dans leur positionnement stratégique, marketing et de commercialisation.
Sa principale conseillère, Suzie Dubé, se réjouit d’ailleurs de l’intérêt d’Investissement Québec à encourager le développement d’un réseau de fournisseurs de proximité et à vouloir aider les fabricants d’emballage à rapatrier leurs productions dans la province.
La beauceronne Idéal Canne, qui a rapatrié sa production de contenants de sirop d’érable de la Chine dans ses installations de La Guadeloupe, au printemps 2022, en est un exemple. Seule entreprise manufacturière canadienne à offrir ce type de boîte de conserve, la PME de 45 employés a bénéficié d’une aide gouvernementale de 1,2 million de dollars (M$) pour se doter d’une chaîne de montage pouvant produire jusqu’à 100 millions de « cannes de sirop » et de boîtes de conserve par année. « D’autres usines de conserves pourraient d’ailleurs voir le jour au Québec d’ici les deux prochaines années », annonce Suzie Dubé.
De meilleures étiquettes
L’investissement privé de 1 M$ d’Imprimerie Ste-Julie pour acquérir la technologie Linerless, de l’entreprise britannique Ravenwood, s’inscrit, lui aussi, parmi les efforts d’offrir des produits d’emballages locaux. « Ce procédé exclusif au Canada, qui permet de produire une nouvelle génération d’étiquettes destinées aux produits frais et surgelés, a l’avantage de réduire l’utilisation de colle et de silicone à plus de 80 % », soutient Éric Thibault, directeur du développement des affaires de l’imprimerie spécialisée dans les étiquettes autocollantes.
« Le centre de tri de Drummondville, qui collabore avec Cascades Environnement, nous a fourni un document qui certifie la recyclabilité de nos étiquettes en papier », ajoute-t-il. En fonction des vertus recyclables du nouveau procédé, le gestionnaire prévoit engendrer des ventes d’au moins 1 M$ par an au cours des six prochaines années. Une dizaine de clients, notamment dans le domaine du prêt-à-manger, des protéines et des fruits et légumes, ont déjà commencé à utiliser les nouvelles étiquettes plus écologiques, précise-t-il.
Indispensable communication
L’avènement d’une meilleure communication avec les consommateurs est une autre innovation notable dans l’industrie. « De plus en plus d’entreprises de biens de consommation indiquent sur leurs produits comment disposer des emballages postconsommation », observe Geneviève Dionne, directrice de la Division de l’écoconception et de l’économie circulaire à Éco Entreprises Québec (EEQ). Elle cite notamment les emballages de riz Dainty, qui a récemment entamé un dialogue sur ses nouveaux emballages allant beaucoup plus loin que la seule apposition du logo de recyclabilité. Le manufacturier y indique les matières utilisées en plus de mentionner comment en disposer. Un geste qu’elle qualifie d’« honnête et transparent » à l’égard des consommateurs.
Cette communication plus constante commence également à être palpable entre les acteurs d’une même industrie qui souhaitent améliorer leurs emballages en commun, note Stéphane Crevier, de l’agence Pigeon. L’industrie brassicole fait par exemple partie de ces regroupements d’entreprises qui ont opté pour des bouteilles et des canettes similaires afin d’en faciliter la réutilisation ou le recyclage.
« Il est évident que l’industrie de l’emballage marquera un grand coup lorsque tous les intervenants liés à ses processus de création, que ce soit les fournisseurs de composants, les équipes de stratégie et de marketing, les fabricants de produits eux-mêmes — sans oublier les centres de tri — se réuniront systématiquement autour d’une table avant que tout nouvel emballage soit introduit sur le marché », soutient pour sa part Sylvain Allard, professeur à l’École de design de l’Université du Québec à Montréal (UQAM).
L’enseignant, qui dirige également l’atelier de recherche et de création en écoconception des emballages PackPlay, à l’UQAM, a collaboré avec l’EEQ pour réaliser le documentaire « Tout déballer », dont la diffusion est prévue cet automne sur les réseaux sociaux.
Ce documentaire d’une cinquantaine de minutes se veut une réflexion sur les types d’emballages qui ont envahi le marché au cours des dernières années. « Est-ce normal qu’il existe au moins six types de contenants de lait sur nos tablettes en supermarché ? Ne serait-ce pas mieux que ces producteurs n’en favorisent qu’un ou deux pour en faciliter les avenues de postconsommation ? » se questionne Sylvain Allard.
Geneviève Dionne ne croit pas que les entreprises soient mal intentionnées dans leur processus. En fait, l’une des meilleures innovations en matière d’emballage serait à son avis que les différents gouvernements du Canada fassent preuve d’une réelle volonté politique et sociétale afin faire bouger les choses. En attendant, dit-elle, les entreprises de biens de consommation doivent apprendre à déprogrammer tout ce qui été véhiculé depuis les trente dernières années. « Et ça, c’est tout un défi ! »