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Sanctions contre Moscou après la reconnaissance des séparatistes

AFP|Publié le 22 février 2022

Sanctions contre Moscou après la reconnaissance des séparatistes

Le président russe Vladimir Poutine a en outre ordonné le déploiement de troupes dans l'est du territoire ukrainien. (Photo: Getty Images)

Kiev — Les pays occidentaux ont commencé mardi à frapper au portefeuille la Russie après la reconnaissance de régions séparatistes d’Ukraine auxquelles Moscou a promis une assistance militaire, des sanctions qui visent notamment un gazoduc et des banques.

Le président russe Vladimir Poutine a en outre ordonné le déploiement de troupes dans l’est du territoire ukrainien, mais ni l’ampleur ni le calendrier n’ont été révélés, alors que le spectre d’une guerre d’ampleur grandit, la Russie ayant 150 000 hommes aux frontières de son voisin. 

La mesure de représailles la plus forte pour le moment a été annoncée par Berlin, qui a gelé le gazoduc Nord Stream II reliant la Russie à l’Allemagne et promis que des sanctions européennes «massives et robustes» suivraient.

La crise, qui inquiète l’Europe depuis des mois, a pris une autre ampleur avec la reconnaissance par Vladimir Poutine, lundi, de l’indépendance des régions séparatistes prorusses de Donetsk et de Lougansk dans l’est de l’Ukraine.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a appelé ses alliés à réagir vite et fort et dit envisager une rupture des relations diplomatiques avec Moscou, accusé de poursuivre son «agression militaire».

Soupçonné aussi par Kiev de vouloir «ressusciter l’URSS», M. Poutine s’est défendu de chercher à «reconstituer un empire». Le Kremlin a assuré qu’il restait «ouvert» à la diplomatie.

Sourd aux critiques, le Parlement russe a approuvé comme un seul homme mardi les accords signés la veille par M. Poutine avec les séparatistes, qui combattent les forces de Kiev depuis 2014.

Dans la nuit de lundi à mardi, M. Poutine a ordonné à son armée de «maintenir la paix» dans ces régions, suscitant la crainte d’une escalade dans ce conflit qui a débuté après l’annexion de la Crimée, faisant plus de 14 000 morts.

Mardi, le vice-ministre russe des Affaires étrangères Andreï Roudenko a dit que la Russie ne prévoyait pas de déploiement «pour l’instant», mais qu’elle le ferait en cas de «menace».

 

Banques et oligarques visés

Des États-Unis à l’Union européenne, la décision russe a été largement condamnée par le camp occidental.

Joignant le geste à la parole, le chancelier allemand Olaf Scholz a annoncé la «suspension» du processus d’autorisation du gazoduc Nord Stream II dont la mise en service apparaît très hypothétique désormais. Washington, qui avait multiplié les pressions sur Berlin, a «salué» cette décision.

Le premier ministre britannique Boris Johnson a annoncé des sanctions visant trois oligarques proches du Kremlin et cinq banques russes, des mesures a minima pour Londres, la place forte financière des grandes fortunes russes.

L’Union européenne planchait aussi sur des sanctions économiques. La Maison-Blanche, qui a interdit toute transaction par des personnes américaines avec les régions séparatistes, devait aussi en prendre.

Ces mesures restent pour l’instant modestes par rapport à celles promises en cas d’invasion d’ampleurs. Les Occidentaux semblent attendre de voir comment évoluera la situation.

 

Quelles limites?

M. Poutine, qui dicte depuis le début le tempo, entretient le mystère sur ses intentions et a plusieurs options devant lui.

Outre l’ampleur du déploiement des forces russes, une question cruciale sera celle des frontières des «républiques» séparatistes reconnues par Moscou: la ligne de front actuelle ou les limites des régions administratives de Donetsk et de Lougansk définies par Kiev, bien plus vastes, que revendiquent les sécessionnistes.

Dans ce dernier cas, la Russie appuierait-elle militairement une expansion? Plusieurs hauts responsables russes ont fait des déclarations floues à ce sujet mardi.

Dans les rues de Kiev, le geste de Moscou suscite de l’inquiétude.

«Je suis vraiment sous le choc», déclare à l’AFP Artem Ivaschenko, 22 ans et originaire de Donetsk. «Cela fait huit ans que je vis à Kiev» et «c’est la nouvelle la plus terrifiante».

Le ministre ukrainien de la Défense Oleksiï Reznikov a prévenu que des «épreuves difficiles» attendaient l’Ukraine.

 

Frappes nocturnes

Ajoutant aux craintes d’escalade, M. Poutine a sommé lundi l’Ukraine de cesser ses «opérations militaires» ou d’assumer la poursuite des «effusions de sang», des déclarations aux accents menaçants.

Sur la ligne de front, des tirs avaient toujours lieu, mais la situation semblait plus calme que la veille. Néanmoins, les séparatistes ont affirmé dans l’après-midi qu’un de leurs combattants avait été tué.

Kiev dément toute action offensive, accusant ses adversaires de propager de fausses informations visant à tenter de justifier une intervention russe.

À Chtchastia, une petite ville située près des zones aux mains des séparatistes, des habitants nettoyaient mardi les dégâts causés par des obus tombés la nuit précédente sur un quartier d’habitation.

Valentyna Chmatkova, 59 ans, dormait quand les projectiles ont explosé, soufflant les vitres de son deux-pièces. «On ne s’y attendait pas. On ne pensait pas que l’Ukraine et la Russie n’arriveraient pas à s’entendre au final», déplore-t-elle. 

«Je pensais que notre président et le président russe étaient intelligents et prudents».