Nous roulons dans l'Audi A5 décapotable du maire de Shawinigan en direction du Centre d'entrepreneuriat ...
Nous roulons dans l’Audi A5 décapotable du maire de Shawinigan en direction du Centre d’entrepreneuriat Alphonse-Desjardins, un trajet de quatre minutes depuis l’hôtel de ville que Michel Angers peut faire les yeux fermés.
«On a acheté ça, on va trouver quelque chose à faire avec», révèle-t-il en pointant sur la gauche la gare de train patrimoniale aux fenêtres placardées, alors qu’il s’engage à droite, dans l’entrée de l’incubateur d’entreprises. «Habituellement, c’est plein», dit-il voyant le stationnement clairsemé, ce qui ne l’empêche pas de se garer dans une place réservée aux femmes enceintes, près de la porte principale.
Aucun doute, il est ici chez lui.
Voilà l’épicentre du renouveau économique shawiniganais. Aménagé en plusieurs phases dans l’édifice d’une ancienne usine de textile toute de briques rouges, au coût de 16 millions de dollars, le Centre d’entrepreneuriat Alphonse-Desjardins abrite depuis quelques années la microbrasserie Le Trou du diable, un incubateur d’entreprises traditionnelles, et le DigiHub, une pépinière de jeunes pousses du secteur numérique qui fait la fierté du maire et de ses citoyens.
Avec raison. La conversion du vieil immeuble de la Wabasso est une réussite incontestable. Les architectes, «des gens de la région», insiste mon guide, ont créé un lieu fonctionnel, convivial et moderne, tout en préservant les éléments d’époque les plus évocateurs, comme les planchers de bois, les portes d’acier sur rail, les poutres à nu, les murs de briques et les fenêtres à carreaux. Ce vieil écrin renferme tout ce qu’on attend d’un accélérateur numérique : outre de la bande passante en-veux-tu-en-v’là, il y a bien sûr l’espace de travail partagé, la table de baby-foot, la glissade et le barista.
Plus d’une quarantaine d’entreprises en démarrage s’activent ici. Elles emploient quelque 250 personnes auxquelles s’ajoutera une trentaine d’employés de Desjardins. La coopérative a annoncé l’année dernière un investissement de 25 M$ et l’établissement ici d’une équipe consacrée au développement des technologies de l’information.
L’édifice rénové n’est pas seulement la manifestation concrète de la transformation économique de l’ancienne Company Town ; il est aussi le rouage central d’une machine à changer les mentalités. Il s’est pour ainsi dire substitué à l’église d’antan en instaurant une certaine cohésion sociale autour d’un projet commun. Il vise tout le monde, mais plus particulièrement les jeunes. On y propage la foi en l’avenir ; on y enseigne les vertus de l’esprit d’initiative, de la prise de risque, de l’innovation, de la créativité.
La nouvelle religion, ici, c’est l’entrepreneuriat.
Une mentalité enracinée
C’est toute une conversion pour une collectivité qui a toujours reposé sur les emplois manufacturiers. Durant des décennies, à moins d’oeuvrer dans une profession libérale ou de tenir un commerce, on a travaillé en usine de père en fils.
Entreprendre, ici, a longtemps été découragé, du moins futile. Pourquoi se démener pour lancer son affaire et créer des emplois moins payants que ce qu’offrait abondamment la grande entreprise ?
Tout le monde a au moins vaguement entendu parler du passé glorieux de Shawinigan, ne serait-ce que par la série historique Les Filles de Caleb, quand un Ovila Pronovost tout droit sorti du bois vient travailler «en ville» et découvre le nec plus ultra de la technologie de l’époque, l’éclairage électrique.
C’est l’histoire parmi d’autres de ces petites villes industrielles riches et florissantes du milieu du 20e siècle qui, après avoir touché leur apogée, glissent sur la pente plus ou moins raide du déclin. Partout, le même canevas, à quelques détails près : des entreprises s’amènent pour exploiter à fond une ressource, puis désertent la place pour laisser derrière elles une collectivité exsangue. Le récit qui s’est écrit sur les rives de la rivière Saint-Maurice représente sans contredit LE classique du genre.
Il s’ouvre en 1898. Cette année-là, la Shawinigan Water and Power Company est constituée pour exploiter le potentiel hydraulique exceptionnel de la rivière, dont le dénivelé à cet endroit forme une chute spectaculaire. Autour des barrages hydroélectriques s’érige avec les années le plus important complexe industriel du pays : aluminium, pâtes et papiers, électrochimie, textile… Il y a des cheminées partout. Les employés sont si bien payés qu’on trouvera ici les revenus par personne les plus élevés d’un océan à l’autre.
Le bâtiment hydroélectrique Shawinigan-2, propriété d’Hydro-Québec, est situé sur la rivière Saint-Maurice. Il a été érigé en 1910 et 1911 par la Shawinigan Water and Power. (Photo: Hydro-Québec)
Shawinigan est alors la ville de la compagnie d’électricité. Celle-ci fixe les règles du plan d’urbanisme, calqué sur New York, avec ses rues, ses avenues et son parc dessiné par la firme d’architecture new-yorkaise de Frederick Law Olmsted, paysagiste qui a signé le Central Park. À une certaine époque, le «maire» de Shawinigan est un employé de la société.
En dépit du ralentissement d’après-guerre, Shawinigan reste une sorte de Klondike jusque dans les années 1960, quand survient la nationalisation de l’électricité, dont l’un des effets est l’uniformisation du prix d’électricité partout au Québec. Ce sera le coup fatal.
Au cours des années 1970, les usines commencent à réduire leurs activités avant de plier définitivement bagage, les mises à pied se comptent par milliers, l’hécatombe se poursuit durant la décennie suivante. La dernière phase reste encore fraîche dans les mémoires : la Belgo (AbitibiBowater – 550 emplois) ferme en 2007, l’Alcan (Rio Tinto – 425 emplois) suit en 2013, puis la Laurentide (Résolu – 275 emplois) éteint ses machines en 2014.
Après des décennies glorieuses, Shawinigan venait de toucher le fond.
Le super maire
Pour y avoir goûté, Michel Angers garde de bons souvenirs des dernières «grandes années» industrielles de Shawinigan. Montrant des habiletés manuelles, le natif de la région s’est rapidement fait orienter vers la filière électrotechnique. «Mais je voulais devenir avocat», dit aujourd’hui l’homme de 59 ans, un type trapu qui lève de la fonte depuis sa jeunesse. Si sa formation d’électricien ne l’a pas immédiatement convaincu d’abandonner ses ambitions juridiques, son premier emploi d’été à l’usine Alcan aura tôt fait d’y arriver. «En entrant, on gagnait l’équivalent de 80 000 $ par année en dollars d’aujourd’hui.» Même sur le déclin, c’était ça, Shawinigan.
Nous sommes en 1980. C’est dans le mouvement syndical, à la CSN, que le futur maire trouve sa voie. «Je m’y suis beaucoup investi, pas tant du côté de la négociation des conventions collectives que dans ce qu’on appelait le « deuxième front de lutte », la réorganisation du travail, l’implication dans la collectivité, le développement social», raconte ce fils spirituel du syndicaliste Gérald Larose.
Jusqu’en 2009, le père de deux enfants reste très actif au sein du syndicat, où il occupe successivement les postes de président de la section locale, président du Conseil central de Shawinigan, puis président du Conseil central du Coeur du Québec. En parallèle, il s’investit dans le développement économique de la région par l’intermédiaire du Conseil régional de développement de la Mauricie, du CLD du Centre-de-la-Mauricie et du Conseil régional des partenaires du travail d’Emploi-Québec Mauricie, où il sera président. Son couple n’y survivra pas.
Durant ces années, il constate de plus en plus les limites du modèle de développement économique qui repose sur l’implantation de grandes industries, encore préconisé par Québec. D’un autre côté, il est admiratif de ce qui est accompli en Beauce, pépinière d’entrepreneurs, et à Drummondville, qui relance son économie grâce à la PME.
En 2007, le syndicaliste connaît une sorte d’épiphanie. Lorsqu’il accompagne une délégation régionale lors d’un voyage d’affaires à Lille, en Belgique, il est amené à visiter l’ancienne charbonnerie de Monceau-Fontaines convertie en site associatif d’économie sociale. Il a une révélation. «Tout de suite, je me suis dit qu’on pouvait faire ça chez nous, on avait ce qu’il fallait», se remémore-t-il en parlant de l’ancienne usine Wabasso.
Au retour, il a beau supplier les élus de la ville d’implanter ce concept à Shawinigan, il parle dans le vide.
Il faut se remettre dans le contexte. La population est alors vieillissante, les jeunes les plus mobiles, souvent les plus éduqués, s’expatrient en masse depuis 20 ans, les pertes d’emplois et la disparition des usines au cours des 30 dernières années pèsent sur les finances de la Ville, qui digère encore difficilement les fusions municipales réalisées quelques années plus tôt.
Le développement économique ne fait pas partie de la culture de l’hôtel de ville. Encore récemment, la fonction de maire était occupée par des notables, souvent à temps partiel, et non par des administrateurs ou des développeurs économiques, comme on en voit aujourd’hui de plus en plus. Au tournant du millénaire, les priorités de la Ville sont d’assurer les services et, surtout, de ne pas augmenter les taxes.
L’élection du leader de la CSN au poste de maire, en 2009, marque un tournant, mais ce qui l’attend a de quoi faire peur. Les gens sont encore traumatisés par la fermeture de la Belgo deux ans plus tôt, les jours de l’Alcan à Shawinigan sont comptés et l’avenir de la Laurentide ne paraît guère plus brillant.
Le réseau d’aqueduc de Shawinigan n’a alors rien à envier à celui de Montréal en matière de vétusté. La Ville doit se conformer aux nouvelles normes du traitement de l’eau potable, un dossier qui traîne en raison des coûts astronomiques de la solution que veut imposer Québec. La question fera l’objet d’un acrimonieux litige entre le gouvernement provincial et l’administration municipale, une bataille que gagnera Shawinigan.
Ce n’est pas le genre d’affaire qui retentit hors des limites d’une ville, mais sur la scène locale, sa résolution a permis au nouveau maire de démontrer son leadership et sa combativité qu’il a développés durant ses années syndicales. «C’est un des plus grands faits d’armes de Michel Angers», croit Luc Trudel, natif du coin, très actif dans le développement régional ; il a été député péquiste dans Saint-Maurice durant le court règne de Pauline Marois. Cela a nourri la cote du maire, reporté deux fois au pouvoir.
Les citoyens ont le sentiment que ça bouge, enfin. La Ville investit des millions dans les infrastructures, notamment dans la réfection de la rue principale et dans l’aménagement d’une grande place au centre-ville, avec l’aide de Québec et d’Ottawa. Shawinigan se met à racler tous les programmes de subvention possible, il n’est pas question de laisser de l’argent sur la table. «Depuis 10 ans, nous sommes allés chercher quelque 250 M$ des deux ordres de gouvernement», se targue Michel Angers, qui reconnaît qu’il y a un coût pour la Ville à ce ratissage. La dette de la ville de 49 000 habitants s’est mise à gonfler, tout comme les taxes foncières.
Ça reste jusqu’à aujourd’hui le principal objet des critiques à son endroit.
Entrepreneuriat tous azimuts
La relance économique de Shawinigan ne s’annonce pas non plus facile. En fait, le nouveau maire a un problème intangible auquel s’attaquer, ce qu’il appelle une «mentalité de boîte à lunch» qui s’est forgée dans les esprits sur un siècle.
Peu de temps après son arrivée à l’hôtel de ville, il convoque une rencontre avec tous les intervenants sociaux et économiques pour déterminer un plan de relance et de diversification de l’économie locale : la SADC, la chambre de commerce, la commission scolaire, le Cégep, des institutions financières, des représentants des secteurs culturel et touristique… La réunion est fixée à 9 h.
«Les gens arrivaient à 9 h 05, se souvient Michel Angers. Je les ai avertis que si ces rencontres allaient être les premières à sauter de leur agenda, qu’il valait mieux qu’ils partent à la pause, je ne voulais pas les voir ici. Puis, je leur ai fait remarquer que s’il y avait beaucoup de chaises dans la salle, celles autour de la table étaient limitées. Alors ceux qui veulent participer aux décisions devaient arriver de bonne heure.» Le ton était donné.
L’idée de diversifier l’économie et d’encourager l’entrepreneuriat à Shawinigan n’est pas nouvelle, mais elle ne dépassait guère, jusque-là, les bonnes intentions. Cela n’a pas empêché de voir émerger de belles entreprises au cours des années, comme Camoplast (Camso), Deslastek, Mégatech Électro et, plus récemment, Cognibox et AddÉnergie. La plus connue reste la microbrasserie Le Trou du diable, installée rue Willow, à proximité de laquelle se développe depuis une effervescente activité commerciale. Le «Trou» participera à une nouvelle perception qu’on se fera de «Shawi», plus jeune, un peu «trad», une bénédiction pour une ville où les principaux projets immobiliers visent les retraités et qui subit les railleries de l’humoriste Sugar Sammy.
Il faut néanmoins un électrochoc, un effort concerté, tous azimuts. Shawinigan se met à multiplier les actions pour pousser ses citoyens à se lancer en affaires. Dès le CPE, les enfants sont initiés aux concepts de leadership, de persévérance et de solidarité sociale. On organise des journées pour les jeunes entrepreneurs et des concours d’entrepreneuriat dans les écoles, on met sur pied des programmes de bourse, un Startup Weekend…
Michel Angers reste obsédé par ce qu’il a vu en Belgique. Il arrive à l’hôtel de ville résolu à réaliser son idée d’incubateur. Malgré les sceptiques, il se lance en 2011. La Ville acquiert l’ancien immeuble de la Wabasso et le rénove à grands frais, une opération en bonne partie financée avec ses fonds, ce qui ne comprend même pas le budget de fonctionnement.
Le nouveau Centre d’entrepreneuriat ouvre ses portes à l’automne de l’année suivante avec, comme principal locataire, Le Trou du diable, en pleine expansion. Pour le reste, l’idée est d’offrir des espaces et du soutien logistique à des entreprises en démarrage en plus d’offrir de la formation pour créer de nouveaux entrepreneurs. Seule une fraction des projets sera viable. Quant aux autres, leurs porteurs auront au moins été exposés aux principes d’entrepreneuriat, ce qui répond à l’objectif, non moins important, de prosélytisme.
L’idée d’y aménager un accélérateur dans le domaine numérique n’émergera qu’en 2013, quand Michel Angers accompagne un entrepreneur local, Philippe Nadeau, à un congrès international de l’industrie du jeu vidéo, à Tokyo.
Philippe Nadeau a discrètement bâti, à partir de Shawinigan, une entreprise de services, Alchemic Dream, dont les clients sont les principales sociétés du secteur du jeu vidéo de la planète. Comme il assiste depuis des années à tous les rassemblements de l’industrie partout dans le monde, il est au fait des dernières tendances ; son réseau de contacts est aussi particulièrement bien garni.
Son rôle sera déterminant.
C’est en effet à Tokyo que Michel Angers connaîtra, après Lille, une seconde illumination. Il atterrit alors dans un décor futuriste envahi par des essaims étourdissants de jeunes technophiles penchés sur leur téléphone intelligent ; il fera des rencontres «stimulantes» et assistera à des démonstrations qui le laisseront bouche bée. Il rentre dans ses terres encore fébrile avec la conviction de pouvoir y reproduire un peu de cette magie.
Pour qui connaît un peu Shawinigan, cette ambition a de quoi laisser songeur. On peine à y imaginer le moindre bouillonnement dans le secteur des technos. La plupart des employés d’Alchimic Dream, plus de 400, sont partout sauf en Mauricie. Le programme d’informatique du Cégep est en lambeaux : «Il était sur le bord de fermer», dit Michel Angers. Qu’à cela ne tienne, le maire confie à Philippe Nadeau, lui-même sceptique au départ, le mandat de créer à partir de rien le troisième pôle numérique de la province après Montréal et Québec.
Il faut la foi, inébranlable. De la folie aussi.
Pari gagné
À la fin de l’année 2014, le DigiHub est inauguré au deuxième étage du Centre d’entrepreneuriat Alphonse-Desjardins. Une dizaine de jeunes pousses ont déjà réservé leur place. Tous les espoirs sont alors permis, une presse locale emphatique évoque alors la création, à Shawinigan, de grandes franchises du jeu vidéo. «Au départ, l’idée était de mettre en place un incubateur destiné aux entreprises du jeu, mais le concept a rapidement évolué», raconte Philippe Nadeau, qui a vendu sa firme pour développer et diriger le DigiHub. L’organisme à but non lucratif s’est repositionné pour se concentrer sur quatre pôles numériques : le patrimoine et la muséologie, le divertissement, l’usine 4.0 et la santé.
Le premier secteur s’est particulièrement bien développé. Plus d’une vingtaine de petites entreprises s’activent maintenant dans ce domaine, aidées en bonne partie par le démarchage de l’administration municipale et la direction du DigiHub. C’est là, justement, une des particularités de cet incubateur : il est alimenté par des missions économiques et des partenariats développés par le tandem Angers-Nadeau. Oui, le maire et son acolyte partent à la chasse aux contrats pour faire tourner le DigiHub !
Cela a commencé par un mandat du musée d’Ottawa décroché en 2017, lequel a fait boule de neige par la suite. Au printemps dernier, les deux hommes ont annoncé des ententes de collaboration avec deux villes françaises : Cannes et sa voisine, Sophia Antipolis, présentée comme la plus importante technopole d’Europe. L’objectif est d’amener les entreprises numériques françaises à faire des affaires ici et les québécoises à décrocher des contrats dans l’Hexagone. Philippe Nadeau est exalté. Il parle désormais de jeter les bases, à partir de Shawinigan, d’une «francophonie numérique», rien de moins !
En un rien de temps, l’ancienne usine Wabasso gagne une telle notoriété qu’elle se transforme en un lieu de pèlerinage économique. On vient de Saint-Hyacinthe, Dolbeau-Mistassini, Lac-Mégantic, la Beauce, Magog, Nicolet, Laval pour s’inspirer. «Il y a beaucoup d’intérêt de la part des autres régions pour ce que nous avons fait avec le Centre d’entrepreneuriat et le DigiHub. Les gens viennent chez nous pour voir ce qu’on a accompli», dit Luc Arvisais, directeur du Service de développement économique de la Ville.
L’initiative shawiniganaise s’est révélée suffisamment impressionnante pour que le gouvernement libéral de Philippe Couillard confie alors au DigiHub le mandat de la reproduire ailleurs au Québec. Doté d’un budget de 32 M$, le Réseau de pôles régionaux d’innovation, de son nom officiel, a toutefois été abandonné peu de temps après l’arrivée des caquistes au gouvernement. C’était un deuxième revers pour Shawinigan et son DigiHub, qui étaient sur les rangs, en 2017, pour accueillir un studio d’Ubisoft. La société de jeux vidéo s’est plutôt tournée vers Saguenay pour réaliser son investissement de 135 M$.
Rum & Code est l’une des trois entreprises qui ont quitté DigiHub pour voler de leurs propres ailes. La boîte conçoit des applications web et mobiles sur mesure. Fondée par trois jeunes hommes de la région, Ian Bussières et les frères Alexis et Félix-Antoine Huard, la firme et ses 12 employés se sont depuis installés ailleurs en ville. Avec sa raison sociale bien en vue sur un vaste panneau qui surplombe la rue de la Station, au coeur de la ville, la petite société s’est, en moins de trois ans, imposée dans le paysage shawiniganais.
Les trois entrepreneurs incarnent parfaitement le nouvel esprit qu’on tente implanter dans la région. Ils sont jeunes, sympathiques, entreprenants, engagés dans la collectivité et surtout fiers d’être Shawiniganais. «On a tous participé à la course du 5 km de la Série du Diable. Il faut voir ça. Au tout début, il y a une douzaine d’années, il y avait peut-être 150 personnes. L’année dernière, on était presque 1 000 participants. C’était impressionnant de voir ça à Shawi», s’enthousiasme Félix-Antoine Huard en parlant d’une série de courses à pied organisée par la microbrasserie Le Trou du diable.
Nouveaux visages de l’entrepreneuriat techno local, les fondateurs de Rum & Code consacrent une partie de leur temps à initier les élèves du primaire aux rudiments du codage en plus de participer à la formation des étudiants du Cégep, dont le programme d’informatique a échappé à une mort lente après avoir subi une refonte en profondeur et déménagé dans les murs du DigiHub. Depuis trois ans, elle accueille un nombre croissant d’étudiants.
Les jeunes ne tarissent pas d’éloges pour leur ville; ils évoquent la qualité des restaurants du secteur villageois de Sainte-Flore, la proximité du Parc national de la Mauricie, le Cirque Éloize installé pour l’été à la Cité de l’énergie, le Tribal Fest, Le Trou du diable, le salon de jeux de société Les Dés Truqués…
«On peut rouler notre affaire d’ici, servir les clients d’où qu’ils soient. Alors pourquoi on irait à Montréal ou à Québec ?» demande Alexis Huard.
Mission accomplie.