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Stagiaires en entreprise: un investissement présent pour l’avenir

Ruby Irene Pratka|Édition de la mi‑mars 2021

Stagiaires en entreprise: un investissement présent pour l’avenir

«Selon leurs connaissances préalables, on commence avec une phase d’apprentissage, et après, on les met sur des projets», assure son président, Simon Dansereau, qui est aussi enseignant au Collège de Bois-de-Boulogne. (Photo: Marie-Ève Rompré)

Un stagiaire, dans l’imaginaire collectif, est un étudiant qui sacrifie son été pour faire des photocopies et aller chercher le café pour ses collègues. Sauf que chez Triple Boris, un studio de développement de jeux vidéo d’une trentaine d’employés basé à Varennes, si un stagiaire s’attend à livrer du café, il sera surpris.

«Selon leurs connaissances préalables, on commence avec une phase d’apprentissage, et après, on les met sur des projets», assure son président, Simon Dansereau, qui est aussi enseignant au Collège de Bois-de-Boulogne. Triple Boris a accueilli 14 stagiaires depuis 2017. «C’est une façon de leur permettre d’apprendre, de toucher à du vrai code et de faire avancer nos projets, remarque Simon Dansereau. On voit des progressions impressionnantes.»

 

 

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D’ailleurs, les stages dans les PME ont de plus en plus la cote chez les étudiants. À l’Université de Sherbrooke (UdeS), où se trouve le plus vieux programme de placement en stage du Québec, quatre stages sur cinq y ont maintenant lieu. L’Université Laval observe une trajectoire similaire. «Historiquement, les grosses entreprises et le secteur public sont nos plus grands donneurs de stages, mais il y a de plus en plus de PME qui cherchent des stagiaires», note André Raymond, directeur du Service de placement de l’établissement.

«Pour qu’un stage réussisse, il faut que le stagiaire ait un mandat clair et que le stage corresponde à son niveau», fait-il valoir en soulignant que dans ces conditions, «c’est beaucoup moins de travail que pensent»les entreprises.

Certains établissements d’enseignement, comme le T:10″ Cégep Limoilou, demandent aux employeurs de désigner un superviseur.

Toutefois, souligne le responsable de stages, Daniel Lantagne, les superviseurs n’auront pas à faire le travail d’un professeur:«On ne parle pas d’un stage pédagogique, mais d’intégration de compétences, précise-t-il. Les stagiaires doivent être productifs, et ils sont rémunérés.»À l’UdeS, tous les stages offerts dans le cadre du régime coopératif (alternance études et stages) doivent également être rémunérés.

Alain Tremblay, directeur général du Service des stages et du développement professionnel de l’établissement estrien, précise qu’il existe plusieurs programmes de subvention pour les petites entreprises qui embauchent des stagiaires. Le Programme de stages pratiques pour étudiants, chapeauté par le gouvernement fédéral, peut par exemple couvrir jusqu’à 50 % du coût salarial du stage (à concurrence de 5 000 $). La proportion couverte monte jusqu’à 70 % (à concurrence de 7 000 $) si les stagiaires sont des étudiants de première année et des membres des groupes sous-représentés (étudiants autochtones, personnes en situation de handicap, nouveaux arrivants et femmes en sciences).

Le crédit d’impôt pour stage en milieu du travail de Revenu Québec subventionne quant à lui entre 24 % et 40 % du salaire d’un stagiaire étudiant, avec des subventions plus élevées pour les nouveaux arrivants et les personnes ayant un handicap.

 

Des équipes de rêve

Matthieu Lirette-Gélinas est le fondateur de Maverick Analytik, une entreprise magogoise de service-conseil en analyse de données. Tout comme Simon Dansereau, il a bénéficié, durant ses études, de plusieurs stages coordonnés par l’UdeS. Il a embauché un premier stagiaire par le biais de l’université en 2018.

En 2020, l’un des trois stagiaires qu’a accueillis Matthieu Lirette-Gélinas est devenu son premier employé. «J’ai l’intention de bâtir une équipe, et embaucher un stagiaire, c’est un moyen de tester des candidats, constate-t-il. Ça m’aide aussi à être un meilleur coach, un meilleur dirigeant.»L’embauche des stagiaires permet d’une certaine façon aux dirigeants de PME de construire l’équipe de leurs rêves. Selon André Raymond, un stagiaire de l’Université Laval sur quatre trouve ainsi son premier emploi dans une entreprise où il a fait son stage. À l’UdeS, cette proportion dépasse les 50 %.

Chez Triple Boris, quatre employés sont d’anciens stagiaires. Pour Simon Dansereau, ce type de recrutement est un investissement dans l’avenir de l’entreprise. «On vit dans un contexte de pénurie de main-d’oeuvre, donc si une entreprise ne recrute pas de stagiaires, elle aura de la difficulté à recruter des employés.»En prime, les anciens stagiaires devenus employés «seront très fidèles, croit-il, parce qu’ils savent que l’entreprise leur a donné une première chance».

 

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Jacques Arsenault (à gauche) est le copropriétaire de Demtroys Technologies. Nicolas Boucher-Lalonde (centre) est ancien stagiaire devenu directeur de recherche et développement. Yan Corriveau (à droite) est l’autre copropriétaire. (Photo : courtoisie)

Trois questions à un stagiaire recruté

Nicolas ­Boucher-Lalonde est diplômé de l’Université de ­Sherbrooke en génie électrique. Dans le cadre de son programme, il a effectué cinq stages, dont deux à ­Technologies ­Demtroys, une ­PME sherbrookoise spécialisée dans les systèmes de contrôle de chauffage. Il y est actuellement directeur de la recherche et du développement.

Pendant vos stages à ­Demtroys, qu’­est-ce qui vous a donné envie d’y rester ?

 J’aimais le fait que c’était une petite entreprise. Nous étions 12 ou 13 personnes et je voyais l’impact de mon travail rapidement. Pendant mon dernier stage, j’ai supervisé un autre stagiaire et c’était ma première expérience de supervision.

 

Quels conseils donneriez-vous à une PME qui encadre des stagiaires pour la première fois ?

Les stagiaires ne seront pas égaux à des employés sur le plan des compétences, surtout s’ils en sont à leur premier stage. Ils n’auront pas les mêmes réflexes. Ils découvrent comment les choses fonctionnent. L’idéal serait de désigner un superviseur qui aime répondre à des questions.

 

Quels seraient vos conseils pour les stagiaires en entreprise ?

Essayez de rencontrer tout le monde et de vous intégrer. De manière générale, faites autant de stages que possible pendant vos études; ils sont votre meilleure préparation pour le marché du travail.