EXPERTE INVITÉE. J'ai régulièrement écrit dans ces pages sur les enjeux de main-d'oeuvre qu'entraînent le ...
EXPERTE INVITÉE — J’ai régulièrement écrit dans ces pages sur les enjeux de main-d’oeuvre qu’entraînent le vieillissement de la population et l’accélération des changements technologiques. C’est également un des thèmes centraux des travaux de l’Institut du Québec (IDQ), qui a développé divers outils d’analyse du marché du travail et qui s’est penché sur des enjeux comme l’intégration des immigrants, la rétention des étudiants internationaux, la reconnaissance des diplômes étrangers et l’impact de l’automatisation sur les travailleurs.
Fort de cette expérience, l’IDQ développera, en collaboration avec BMO, de nouveaux paramètres pour analyser la qualité et la performance du marché du travail québécois.
On sait depuis des décennies que la tempête du vieillissement de la population frappera le Québec. Pourtant, on tarde à adapter nos façons de faire. Alors que le taux de chômage du Québec est passé sous la moyenne canadienne, que l’augmentation du nombre de postes vacants est la plus rapide du pays, que le taux d’emploi des personnes de 25 à 54 ans atteint des sommets, le temps est venu de revoir les paradigmes traditionnels. Dans un contexte où le manque de travailleurs est le principal frein au développement économique de certaines régions et de certains secteurs, la création d’emplois et la baisse du taux de chômage ne sont plus aussi pertinentes et ne suffisent plus pour bien comprendre l’état du marché du travail. Ces indicateurs doivent être repensés et adaptés pour mieux tenir compte des défis contemporains.
Un outil d’analyse mieux adapté
C’est dans ce contexte que l’IDQ et BMO ont récemment démarré des travaux qui visent à proposer de nouveaux paramètres pour mesurer la qualité du marché du travail. Nous présenterons, dès le printemps 2019, un indice de qualité des emplois qui sera plus complet que la simple création d’emplois. En plus de suivre l’évolution de la qualité de l’emploi, nous voulons que cet outil puisse servir à alimenter la prise de décision des différents acteurs de la société.
Bien que la réflexion soit encore à ses débuts, nos objectifs sont déjà clairs et ambitieux. Nos analyses devront tenir compte tant de la performance du marché du travail que de son degré d’inclusion. Il devra être tourné vers les grands défis de demain plutôt que ceux du passé : les emplois créés contribuent-ils à développer une économie sobre en carbone et à accélérer la transition énergétique ? Correspondent-ils aux besoins locaux les plus pressants pour assurer la qualité des services à la population ? Sont-ils dans des secteurs à forte valeur ajoutée ou stratégique pour le développement économique du Québec ? Permettent-ils d’accélérer le virage numérique des entreprises ?
Un élément central de la réflexion portera sur les compétences et la résilience de la main-d’oeuvre, c’est-à-dire sa capacité à s’adapter aux changements à venir. Une main-d’oeuvre bien formée est au coeur d’un marché du travail durablement efficace et performant sur les plans économique et environnemental.
Nous tenterons de répondre à ces questions en proposant des outils de mesure, qui incluent tant des indicateurs plus traditionnels, actuellement utilisés pour mesurer la qualité de l’emploi, que d’autres, plus novateurs, qui restent à être développés.
Dans le meilleur des cas, nos travaux serviront à élaborer une feuille de route pour mesurer le succès du virage à entreprendre. Certes, le défi est de taille. Mais nous préférons nous lancer dans l’aventure avec humilité et ouverture, plutôt que de fermer les yeux et attendre que la tempête soit terminée.
EXPERTE INVITÉE
Mia Homsy est directrice générale de l’Institut du Québec (IDQ) depuis sa fondation, en février 2014.