Un rapport compare les travailleurs étrangers du Canada à des esclaves modernes
La Presse Canadienne|Publié le 14 août 2024Le statut des travailleurs dépend d’un permis de travail fermé propre à un employeur. Si les personnes sont licenciées, elles peuvent être expulsées du Canada. (Photo: Graham Hughes La Presse Canadienne)
Ottawa — Un rapport international récemment publié indique que le programme canadien pour les travailleurs étrangers temporaires est un «terreau fertile» pour l’esclavage contemporain.
Le document final d’un rapporteur spécial des Nations unies, qui s’est rendu au Canada l’année dernière, souligne qu’un déséquilibre des pouvoirs empêche les travailleurs d’exercer leurs droits.
Le statut des travailleurs dépend d’un permis de travail fermé propre à un employeur. Si les personnes sont licenciées, elles peuvent être expulsées du Canada.
Le rapport indique que les travailleurs sont soumis à un large éventail d’abus et ne sont pas toujours conscients de leurs droits. Il souligne que le gouvernement confie une grande partie de la responsabilité d’informer les travailleurs de leurs droits à l’employeur, «malgré le conflit d’intérêts évident».
Le rapporteur spécial Tomoya Obokata énumère divers problèmes vécus par les travailleurs, tels que le vol de salaire, de longues heures de travail avec des pauses limitées et un équipement de protection individuelle insuffisant. Le rapport fait également état d’allégations de harcèlement et d’exploitation sexuels, ainsi que de violences physiques, émotionnelles et verbales.
M. Obokata a également constaté que les travailleurs ont du mal à accéder aux soins de santé. Dans certains cas, les employeurs ont empêché les gens de se faire soigner, indique le rapport, et certains travailleurs se sont vu refuser le congé nécessaire, ont été encouragés à «prendre des analgésiques ou des remèdes maison à la place» ou ont même été licenciés.
Le rapport note que les règles mises en œuvre en 2022 obligent les employeurs à faire un effort raisonnable pour fournir aux travailleurs un accès aux soins de santé s’ils sont malades ou blessés.
Il souligne également que de nombreux employeurs fournissent un logement à leurs travailleurs, mais que cela peut entraîner une surpopulation, par exemple 20 à 30 personnes partageant une seule salle de bain, illustre-t-il.
Le rapport appelle le Canada à «mettre fin aux accords de migration de main-d’œuvre qui favorisent l’exploitation en créant des situations de dépendance qui lient les travailleurs à leurs employeurs» et dans lesquelles ces derniers contrôlent le logement, les soins de santé et le statut du travailleur.
Le nombre de permis dans le cadre du programme a augmenté de 88% entre 2019 et 2023, bien qu’Ottawa ait récemment indiqué qu’il prévoyait de réduire le nombre de ces travailleurs au Canada.
Mathis Denis, porte-parole du ministre de l’Emploi Randy Boissonnault, a affirmé que le gouvernement avait augmenté les amendes pour non-conformité des employeurs au programme. Il a ajouté que le gouvernement avait imposé 2,1 millions $ d’amendes pour violation des règles du programme au cours du dernier exercice financier, contre 1,54 million $ l’année précédente.
Il a annoncé que le ministre envisageait d’augmenter les frais pour financer «des activités supplémentaires d’intégrité et de traitement» et qu’il cherchait à mettre en place de nouvelles réglementations concernant l’admissibilité des employeurs.
Anja Karadeglija