Une action collective déposée contre les permis de travail fermés
La Presse Canadienne|Publié le 15 septembre 2023La demande d’action collective exige aussi d’indemniser les travailleurs qui ont subi des préjudices en étant sous la contrainte d’un permis de travail fermé. (Photo: La Presse Canadienne)
L’Association pour les droits des travailleurs de maison et de ferme (DTMF) a déposé à la Cour supérieure du Québec, jeudi, une demande d’action collective pour s’opposer aux permis de travail fermés, qui lient les travailleurs étrangers à un employeur spécifique. Ce permis va à l’encontre de la Charte canadienne des droits et libertés, selon l’organisme.
La demande d’action collective réclame que ce type de permis de travail soit reconnu comme inconstitutionnel, puisqu’il place des travailleurs dans des situations de vulnérabilité alors qu’ils sont dépendants de leur employeur, et donc, plus susceptibles de recevoir de mauvais traitements.
La Confédération des syndicats nationaux (CSN) et la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) soutiennent l’initiative de l’association.
«Même s’ils ont des droits sur papier (les travailleurs), il y a toujours la crainte d’être retourné dans son pays, il y a toujours des menaces des employeurs, ils ont peur des représailles», a affirmé Katia Lelièvre, vice-présidente de la CSN, lors d’une conférence de presse devant le palais de justice de Montréal, vendredi matin.
Elle a souligné que le syndicat représente «des milliers» de travailleurs immigrants, dont plusieurs ont un statut temporaire, et que la CSN constate les enjeux liés aux permis fermés.
Le 6 septembre, le rapporteur spécial des Nations unies sur les formes contemporaines d’esclavages, Tomoya Obokata, a affirmé à la suite d’une visite de deux semaines au Canada que le système de permis de travail fermés rend les travailleurs étrangers vulnérables à une forme d’esclavage moderne, «car ils ne peuvent pas dénoncer les abus subis sans craindre d’être expulsés», peut-on lire sur le site web de l’ONU.
Mme Lelièvre a réitéré la conclusion faite par le rapporteur spécial. «C’est gênant pour le Canada de penser comment on va faire la morale à des pays comme la Chine sur les droits de la personne, quand nous-mêmes on n’est pas capable de respecter l’article un de la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui dit que tous les êtres humains naissent libres et égaux», a-t-elle affirmé.
«Pour nous, les gens doivent être libres de choisir leur employeur. Il n’y a pas un Québécois qui a à prouver qu’il est vulnérable dans son milieu de travail pour pouvoir changer d’emploi, et c’est ce qu’ils doivent faire (les travailleurs étrangers)», a-t-elle poursuivi.
Indemnisations
La demande d’action collective exige aussi d’indemniser les travailleurs qui ont subi des préjudices en étant sous la contrainte d’un permis de travail fermé.
«L’octroi de dommages-intérêts est approprié et juste, notamment pour compenser le préjudice subi par les travailleurs migrants liés à un employeur, pour faire valoir leurs droits garantis par la Charte et pour dissuader le gouvernement du Canada de les violer à l’avenir», peut-on lire dans le document, déposé en anglais, à Montréal.
«Les attitudes discriminatoires sous-jacentes à l’introduction des mesures de liaison avec l’employeur ont conduit le gouvernement du Canada à ignorer les droits de l’homme et la dignité des travailleurs concernés et le préjudice prévisible que les liaisons avec l’employeur leur causeraient», indique aussi l’Association DTMF dans la demande d’action collective.
Par Coralie Laplante