Allison Venditti, coach de carrière établie à Toronto, a vu de nombreuses clientes se débattre dans l’indécision quant à la possibilité de quitter leur emploi stable actuel pour un nouveau travail mieux rémunéré. (Photo: La Presse Canadienne)
Allison Venditti sait à quel point la question «devrais−je partir ou bien rester?» peut être difficile.
La coach de carrière établie à Toronto et fondatrice de Moms at Work, une communauté de réseautage en ligne de femmes au travail, a vu de nombreuses clientes se débattre dans l’indécision quant à la possibilité de quitter leur emploi stable actuel pour un nouveau travail mieux rémunéré.
Pour la plupart, la peur de l’inconnu est un facteur de retenue, mais Mme Venditti affirme que les personnes qui font le saut en quête d’un salaire plus élevé ne le regrettent généralement pas.
«Quand les gens y vont, la plupart du temps, le premier commentaire que j’entends est: “J’aurais aimé faire ça plus tôt”», a soutenu Mme Venditti, ajoutant qu’une augmentation de salaire significative peut changer une vie.
«Recevoir 30 000 dollars ($) de plus par an, c’est beaucoup d’argent sur cinq ans. Cela peut signifier un acompte pour une maison, cela peut signifier des camps chics pour vos enfants. Cela fait une différence», a-t-elle souligné.
Il peut être difficile de savoir quand il est temps de quitter un emploi que l’on aime ou une entreprise à laquelle on se sent fidèle pour un salaire plus élevé ailleurs. La satisfaction au travail, la relation avec son patron et la culture du lieu de travail sont des éléments importants et, dans certains cas, ils l’emportent sur une éventuelle augmentation de salaire.
Mais des experts estiment qu’étant donné le coût de la vie actuel, il est peut−être temps d’envisager de chercher ailleurs si l’on estime que son potentiel de revenus s’est stabilisé.
Une enquête récente menée auprès de 4000 cols blancs canadiens et de 2000 employeurs par le cabinet de conseil en recrutement mondial Robert Walters a révélé qu’en 2024, l’employeur moyen prévoit d’offrir des augmentations de salaire comprises entre 3,5 et 4%.
Compte tenu de la persistance d’une inflation élevée au cours des deux dernières années, cela signifie que les augmentations auxquelles de nombreux travailleurs canadiens peuvent s’attendre cette année ne feront guère plus que les empêcher de régresser financièrement.
«Si vous regardez l’histoire, les augmentations de salaire ont été utilisées comme mesure pour récompenser le travail assidu, la loyauté et la progression, a déclaré Martin Fox, directeur général de Robert Walters Canada. Mais ce à quoi nous assistons actuellement est une situation vraiment unique et difficile. De nombreuses entreprises proposent actuellement des salaires qui correspondent à cette hausse inflationniste juste pour garder les gens à flot — et elles n’ont probablement pas le budget ou n’ont pas prévu de payer plus que ça.»
D’un autre côté, les entreprises creusent souvent plus profondément dans leur budget pour attirer une nouvelle recrue intéressante, a souligné M. Fox.
«Nos données et recherches internes montrent que les professionnels qui changent d’organisation connaissent souvent une augmentation de salaire substantielle, a-t-il déclaré. C’est de l’ordre de 10 à 15%, voire jusqu’à 20% pour certains postes très demandés.»
«Nous savons que les gens qui recherchent toujours une occasion d’emploi plus intéressante gagnent plus d’argent. Cela a été prouvé», a déclaré Mme Venditti, ajoutant que les travailleurs peuvent bénéficier financièrement d’un changement d’emploi, mais aussi d’un changement complet de secteur d’activité.
«Cette idée selon laquelle changer trop souvent d’emploi serait mauvais d’une manière ou d’une autre n’est vraiment plus une réalité. Ce que nous constatons chez les personnes salariées à haut potentiel, c’est qu’elles passent environ deux ans et demi à occuper le même emploi.»
Le salaire, une partie de l’équation
Bien qu’une augmentation de salaire de 15% corresponde à ce qu’un employeur devrait s’attendre à offrir s’il tente d’inciter un professionnel expérimenté à quitter son poste actuel, Mme Venditti a déclaré qu’il est important de se rappeler que le salaire n’est qu’une partie de l’équation.
«Si vous êtes payé 50 000 $ pour travailler 42 heures par semaine, ou 50 000 $ pour travailler 35 heures par semaine, c’est une différence significative», a-t-elle souligné, ajoutant que les gens devraient également analyser les chiffres et comparer des choses comme les options d’achat d’actions, les régimes de retraite et les compléments de REER.
M. Fox a affirmé que l’emploi le moins bien rémunéré pourrait également arriver en tête si l’on prend en compte des facteurs tels que la formation et le développement professionnel, les avantages sociaux et les programmes de bien−être, ainsi que la possibilité de travailler à distance ou sur une base hybride.
L’enquête de Robert Walters révèle que 93% des employés interrogés sont prêts à quitter leur organisation actuelle pour une augmentation de salaire de 10% ou plus.
L’étude a également révélé que le principal facteur qui pousse les employés à conserver leur poste actuel est une rémunération compétitive: seuls 9% des employés interrogés ont cité l’appréciation de leur entreprise comme l’une des principales raisons de leur décision de rester.
Mais Mme Venditti a déclaré que les femmes, en particulier, hésitent souvent à postuler à des postes mieux rémunérés en raison de la fausse croyance selon laquelle des emplois mieux rémunérés signifient automatiquement une perte de flexibilité et d’équilibre entre vie professionnelle et vie privée.
«C’est le facteur de retenue numéro un que je vois, a-t-elle déclaré. Ne faites pas cette supposition: “Oh, je ne peux pas partir parce qu’ils sont vraiment gentils avec moi”. Il y a beaucoup d’environnements de travail agréables.»
Si l’on aime vraiment son travail, mais qu’on a l’impression de ne pas être rémunéré à sa juste valeur, on peut envisager de demander une augmentation ou une promotion avant de rechercher des occasions ailleurs, a rappelé Mme Vendetti.
Même si son employeur ne peut pas offrir plus d’argent, il peut être prêt à proposer des vacances plus longues, des horaires flexibles, une semaine de travail condensée ou une autre forme de rémunération non monétaire.
Néanmoins, Mme Venditti estime que les gens déterminés à améliorer leur situation financière doivent «lire la situation» et décider si cela est possible dans leur entreprise actuelle.
«Si votre employeur a publié une note disant que tout le monde a déjà eu une augmentation en phase avec le coût de la vie et qu’il licencie maintenant, n’allez pas demander une augmentation, la réponse sera non, a-t-elle exposé. Parfois, il n’y a tout simplement aucune opportunité. Parfois, il faut vraiment quitter son entreprise si l’on veut progresser.»
Amanda Stephenson, La Presse Canadienne