GROSSE DÉPENSE. Au Québec, plus que partout ailleurs au pays, plus du tiers des transactions automobiles se soldent...
GROSSE DÉPENSE. Au Québec, plus que partout ailleurs au pays, plus du tiers des transactions automobiles se soldent par une location. Est-ce pour autant la meilleure option ? Explications.
Nos voitures nous coûtent cher. Un véhicule représente annuellement une dépense qui varie entre 5500 $ et 11 000 $ incluant l’assurance, les immatriculations, l’essence (ou l’électricité), l’entretien, sans oublier la dépréciation de la voiture en soi, selon CAA-Québec. Pas étonnant qu’elles soulèvent des questions d’ordre financier, notamment quant à la meilleure option entre l’achat ou la location.
Si vous avez l’argent comptant, achetez, suggère le chroniqueur automobile Benoit Charette qui suit cette industrie depuis plus de 30 ans. L’argent comptant, dit-il, permet, en général, de négocier un prix de 4 % à 5 % plus bas que le montant annoncé. Remarquez, cette réduction au comptant peut laisser supposer que le concessionnaire ajoute des frais de crédit indirects à l’achat ou à la location. Particulièrement, si le concessionnaire annonce une promotion de 0 % d’intérêt à l’achat et la location. «Dans ce cas-ci, il s’agit d’une fausse promotion», soulève le comptable et planificateur financier Éric Brassard.
Le conseiller en placement chez BGY services financiers intégrés préconise plutôt le financement du véhicule. «Si le taux d’intérêt à l’achat ou à la location est plus bas que le pourcentage que peuvent rapporter vos placements financiers, mieux vaut financer la voiture», conseille Éric Brassard. Depuis déjà 20 ans que cet expert s’intéresse au financement du deuxième bien de consommation le plus important après la maison. Il est d’ailleurs l’auteur du livre Finance au volant, publié aux éditions Éric Brassard.
De nos jours, poursuit-il, les taux en vigueur font en sorte qu’il vaut mieux favoriser l’achat par emprunt ou la location… et de choisir parmi ces deux options celle qui offre le taux d’intérêt le plus faible. «Même une différence de 1 % peut être suffisante», soutient-il.
L’important, insiste Éric Brassard, est de comprendre que la location et l’achat par emprunt s’équivalent. «La confusion qui entoure la location est bien souvent le fruit de malentendus et de mythes sur la nature réelle de ce mode de financement. Non seulement la location se veut une façon de financer le véhicule par emprunt, elle constitue, elle aussi, une dette, tout comme l’achat par emprunt», rappelle le conseiller.
En fait, le conducteur doit rembourser le solde de sa dette à la fin du contrat, soit en retournant la voiture, soit en la rachetant au prix de sa valeur résiduelle, explique le conseiller. «Même si la durée du bail est de 36 ou de 48 mois, la location est une dette dont la période d’amortissement réelle est de 65 à 85 mois», précise le planificateur financier. Certes, dit-il, les mensualités seront plus petites parce que la période d’amortissement est plus longue pour la location que celle de l’emprunt.
À ce propos, un des avantages de la location, ajoute Éric Brassard, réside justement dans l’absence de risque lié à la valeur résiduelle du véhicule à son retour en concession. «La location est une police d’assurance qui limite la dépréciation à un montant convenu d’avance. Ce montant est égal à la différence entre le prix négocié de la voiture et la valeur résiduelle à la fin du bail», souligne-t-il.
Attention, toutefois, il ne faut pas en déduire que la location est une option peu coûteuse, avertit-il. «Peu importe que vous louiez ou achetiez votre véhicule neuf en le finançant, si vous le changez à une fréquence de trois ans et moins, vous assumez un coût beaucoup plus élevé qu’un consommateur qui conservera son véhicule pendant plus de six ans. Notamment en raison de la forte dépréciation des premières années», indique le comptable. «En fait, il est plus juste d’affirmer que, pour ceux qui changent régulièrement de voiture, la location représente la plus avantageuse des options parmi les deux plus coûteuses», dit-il.
Un marché dicté par les constructeurs
Vous êtes encore ambivalent quant à la question «acheter ou louer» ? C’est normal, poursuit le chroniqueur Benoit Charette. «La réponse à cette question n’est jamais simple à cerner parce qu’elle varie d’une année à l’autre. Tout dépend du contexte économique et des cycles que vont dicter les constructeurs en fonction de la gestion de leurs stocks de véhicules», avise-t-il.
Actuellement, au Québec, 36 % des transactions annuelles de véhicules relèvent d’une location par emprunt. «C’est plus que partout ailleurs au pays, où la location ne compte que pour 26 % des transactions», signale Robert Karwel, gestionnaire principal du réseau de l’information chez JD Power, Division Auto Canada, une firme d’analyse de données et d’intelligence grand public.
Ces statistiques, indique l’analyste, pourraient changer à cause de l’actuelle pandémie. Tout comme elles ont d’ailleurs changé en 2008-2009. «Avant la crise financière, près d’un consommateur sur deux (45 %) au pays favorisait la location», tient-il à rappeler. Ce mode de financement s’est toutefois effondré au moment de la récession. «Les sociétés responsables de ces baux n’ont plus été en mesure de soutenir ce type de transaction. Ce qui a favorisé l’avènement des contrats d’achat de financement à long terme et leur faible taux d’intérêt», mentionne Robert Karwel.
D’ailleurs, en raison de la COVID-19, les constructeurs automobiles se montrent de plus en plus réticents à proposer des contrats de location attrayants, notamment en raison de l’incertitude qui plane sur les valeurs résiduelles, observe l’analyste de JD Power. Les mensualités ont augmenté de quelques dizaines de dollars et les taux d’intérêt sont moins avantageux. «En fait, conclut Robert Karwel, les consommateurs québécois ont tendance à être plus frugaux envers leurs achats de véhicules. Ils vont ainsi privilégier leur mode de financement de véhicule en fonction du prix que leur proposent les constructeurs.» Au bout du compte, c’est ce qui les incitera à acheter… ou à louer.
Petits conseils d’Éric Brassard
Louer… et acheter
Pourquoi ne pas acheter le véhicule que vous venez de louer ? avance le planificateur financier Éric Brassard. «C’est la voiture d’occasion que vous connaissez le mieux. Même si vous gardez vos véhicules 10 ans, rien ne vous empêche de louer au départ et d’acheter le véhicule à la fin du bail.»
Pour usage professionnel
À des fins professionnelles, faut-il acheter ou louer votre véhicule ? Si la voiture est utilisée au sein d’une société, mieux vaut la louer, avise Éric Brassard. Si la voiture est utilisée pour affaires (sans société), les deux options sont ouvertes, dit-il.
33 465 $
Selon le site AutoHebdo, le Québec demeure l’endroit le plus économique du pays pour l’achat d’un véhicule, qu’il soit neuf ou usagé. Actuellement, la province affiche les prix médians les plus bas, soit 33 465 $ pour le neuf (le prix médian national est de 37 401 $) et de 15 995 $ pour le véhicule d’occasion (18 450 $ pour le prix médian national d’occasion).