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Immobilier commercial: l’avenir appartient à ceux qui sont bien

Charles Poulin|Édition de la mi‑Décembre 2022

Immobilier commercial: l’avenir appartient à ceux qui sont bien

Les entreprises locataires à Montréal qui prévoient occuper leur bureau trois ou quatre jours par mois tueront le centre-ville, selon Brett Miller, chef de la direction de Canderel. (Photo: 123RF)

IMMOBILIER COMMERCIAL. En cette période d’incertitude économique, les entreprises immobilières qui s’en sortiront le mieux seront celles qui réussissent à être bien capitalisées.

C’est du moins la stratégie qu’ont adoptée plusieurs entreprises québécoises actives dans le domaine de l’immobilier commercial. Parmi elles, on retrouve Canderel, Otéra Capital et Groupe Mach, dont les représentants avaient été invités par l’Institut de développement urbain du Québec, le mois dernier, pour discuter de la manière dont ils abordaient la période d’instabilité économique liée à l’inflation et à la forte hausse des taux d’intérêt.

Une chose est claire, estime Laurent Dionne-Legendre, vice-président aux investissements et aux affaires juridiques de Groupe Mach:les gens qui ont fixé leurs taux seront les grands gagnants.

De son côté, il affirme que plus de 80% du portefeuille de Groupe Mach est fixé, et il avance qu’il s’agit d’un très bel outil pour faire face à une crise potentielle. De plus, le groupe est bien placé pour certains projets de développement et de construction.

«Si on dit que l’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt, en période de crise, l’avenir appartient à ceux qui sont bien capitalisés, laisse-t-il tomber. Notre stratégie est la conservation d’actifs existants. Ceux qui empruntent à ce moment le font à 7% d’intérêt. Est-ce vraiment le temps de dépenser de l’argent pour créer de la valeur? Moi, j’ai l’impression que non.»Le discours est le même du côté de Brett Miller, chef de la direction de Canderel. Depuis presque 25 ans, il explique que l’entreprise a eu une croissance enviable doublée d’une forte demande pour ses produits.

«Nous avons construit de beaux immeubles et nous avons été conservateurs côté financement, avoue-t-il. Nous étions très anxieux au début de l’année. Nous avons amorcé notre stratégie tôt:nous avons vendu trois immeubles de bureaux et avons diminué notre participation dans trois gros projets pour accroître nos liquidités. L’idée est que lorsqu’il y aura une correction de prix, ça s’en vient, ça va forcément redescendre, nous serons là pour réagir.»La vice-présidente au financement immobilier à Otéra Capital, Andrée Roy, indique pour sa part que l’entreprise a toujours été relativement conservatrice dans ses distributions et qu’elle continue dans le même sens.

«Le seul changement est que nous sommes un peu plus sélectifs dans nos investissements, explique-t-elle. On passe plus de temps dans les analyses de sensibilité:qu’est-ce qui arrive si les loyers baissent ? Est-ce que j’ai un peu d’élasticité ? Est-ce que mes réserves d’intérêt sont adéquates ? Les stratégies de sortie deviennent plus difficiles, les couvertures de dettes ne sont pas toujours adéquates. Nous continuons à faire une analyse complète de notre portefeuille de façon régulière et nous tentons de parler à nos clients un peu plus souvent pour nous tenir au courant de ce qui se passe et de prévenir les problèmes.»

 

Appréciation d’actifs

Les panélistes étaient également invités à se prononcer sur leur appréciation des catégories d’actifs immobiliers.

Laurent Dionne-Legendre dit regarder les propriétés commerciales de détail. À son avis, si l’acquéreur est en mesure de bien financer l’actif et d’acheter au bon prix, elles peuvent être «carrément des vaches à lait»si les ventes des locataires restent au rendez-vous. Andrée Roy aime bien le secteur industriel, même si elle anticipe une baisse du taux de croissance des loyers, ainsi que le multirésidentiel. Le commerce de détail demeure sur son radar. Pour ce qui est des immeubles de bureaux, le secteur demeure préoccupant et c’est du cas par cas pour Otéra. Brett Miller affirme ne pas jeter son dévolu sur les propriétés industrielles. Il croit que les locataires sont probablement au maximum de leur capacité, avec un loyer de 16 $à 18 $le pied carré, soit plus que les augmentations prévues, et que si une récession survient, plusieurs locateurs devront avoir de difficiles conversations.

Pour ce qui est des immeubles de bureaux, le chef de la direction de Canderel affirme être excessivement timide avec les grandes entreprises qui sont locataires, surtout à Montréal et dans sa couronne.

«Quand on entend certains dire qu’ils seront au bureau trois ou quatre jours par mois, ça ne fonctionnera tout simplement pas, tranche-t-il. Ça va tuer le centre-ville.»