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Buy America: un «espoir» d’exemptions pour le Canada

François Normand|Publié le 01 septembre 2021

Buy America: un «espoir» d’exemptions pour le Canada

Le président des États-Unis Joe Biden veut favoriser la création d'emplois aux États-Unis en renforçant les politiques d'achat local. (Photo: Getty Images)t

ANALYSE. L’administration Biden est en train d’élaborer une nouvelle législation pour renforcer les politiques d’achat local du Buy American et du Buy America. Or, il se pourrait bien qu’on y retrouve des exemptions pour les entreprises canadiennes, estime un cabinet montréalais spécialisé en commerce international.

«La nouvelle mouture du « Buy America Act » prend forme. Il y a bon espoir que les entreprises canadiennes bénéficient d’exemptions», écrit Bernard Colas, avocat spécialisé sur ses enjeux au cabinet CMKZ, dans ses prévisions mi-2021 en droit du commerce international.

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Le cas échéant, les entreprises canadiennes seraient en quelque sorte considérées comme des sociétés américaines. Ainsi, les exportateurs canadiens de biens et de services n’auraient pas à se soumettre au Buy American et au Buy America, deux mesures visant à créer des emplois aux États-Unis.

Adopté en 1933 lors de la Dépression, le Buy American Act favorise les achats de biens du gouvernement fédéral destinés à l’usage public (articles, matériaux ou fournitures) dont la valeur est supérieure au seuil des micro-achats.

Adoptées en 1982 au sortir de la récession de 1981-1982, les dispositions du Buy America s’appliquent pour leur part aux achats afférents aux transports évalués à plus de 100 000 $US.

Depuis qu’il est en poste à la Maison-Blanche, le président américain Joe Biden a promulgué deux initiatives qui renforceront à terme le Buy American et le Buy America :

 

 

En entrevue à Les Affaires, l’avocat Bernard Colas affirme probable qu’il y ait des exemptions pour les entreprises canadiennes, car le gouvernement du Canada fait un lobby intense à ce propos auprès de Washington.

L’avocat se dit aussi optimiste en raison du précédent de février 2010.

 

Comment le marché est resté ouvert pour le Canada

La nouvelle administration démocrate de Barack Obama (dont Joe Biden était le vice-président) avait alors accordé des exemptions aux entreprises canadiennes dans son plan de relance de l’économie américaine, dans la foulée de la Grande récession aux États-Unis (de décembre 2007 à juin 2009).

L’Accord sur les marchés publics entre le Canada et les États-Unis permettait aux entreprises canadiennes de participer aux projets d’infrastructures américains financés en vertu de l’American Recovery and Reinvestment Act.

En contrepartie, le Canada avait ouvert ses marchés d’approvisionnement infranationaux (c’est-à-dire, l’ensemble des provinces et des territoires, à l’exception du Nunavut) aux entreprises américaines.

L’accès aux marchés publics aux États-Unis est un enjeu de taille pour les entreprises canadiennes, et ce, en raison de l’intégration des chaînes logistiques nord-américaines, souligne un rapport publié en juin par le Comité spécial sur la relation économique entre le Canada et les États-Unis de la Chambre des communes, à Ottawa.

Lors des audiences qui ont mené à la publication de ce rapport, plusieurs entreprises et organisations ont dit craindre l’impact du renforcement du Buy American et du Buy America sur les entreprises canadiennes si celles-ci n’avaient pas d’exemptions.

Par exemple, l’ontarienne IPEX, qui fabrique des systèmes de tuyauteries thermoplastiques pour le secteur municipal, a laissé entendre qu’elle pourrait construire des usines aux États-Unis si le Canada n’obtient pas une exemption.

Pour sa part, le syndicat Unifor a rappelé que la hausse du contenu américain exigé imposée en 2018 pour les « achats des transports en commun financés par le gouvernement fédéral » des États-Unis a forcé une entreprise canadienne à mettre à pied des dizaines de membres d’Unifor.

Ceux-ci travaillaient dans une usine d’assemblage de Winnipeg.