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Fonderie Horne: le gouvernement dévoile ses exigences

La Presse Canadienne|Publié le 15 août 2022

Fonderie Horne: le gouvernement dévoile ses exigences

Le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, s’adressera aux médias à 13h30 lundi. (Photo: La Presse Canadienne)

Le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, a confirmé que la Fonderie Horne devra atteindre un seuil d’émission d’arsenic de 15 nanogrammes par mètre cube (ng/m3) d’ici les cinq prochaines années, comme l’a demandé la santé publique.

C’est ce qu’il a indiqué lors d’une conférence de presse à Rouyn-Noranda lundi où il a présenté les principales exigences environnementales que le gouvernement propose d’imposer à la Fonderie Horne.

La semaine dernière, le directeur national de santé publique, le Dr Luc Boileau, avait proposé que les émissions d’arsenic ne dépassent pas 15 nanogrammes par mètre cube (ng/m3).

«C’est la balle qu’on met en jeu, maintenant on veut savoir si la population se sent écoutée dans cette proposition», a indiqué le ministre Charette en faisant référence à la consultation publique qui se tiendra dans les prochaines semaines.

«Un régime de sanctions» s’appliquera si l’entreprise est incapable d’atteindre ce seuil.

«On le réitère, si Glencore ne réussit pas à se conformer aux exigences gouvernementales, la Fonderie Horne devra fermer ses portes», a indiqué le ministre.

Le ministre de l’Environnement a ajouté que la fonderie devra éventuellement atteindre la norme québécoise de 3 ng/m3, en précisant qu’il «sera toutefois impossible» d’atteindre cette norme d’ici cinq ans.

Glencore, propriétaire de la Fonderie Horne, devra également respecter «des concentrations moyennes annuelles et journalières pour l’arsenic, le cadmium et le plomb».

La fonderie devra aussi réduire «progressivement ses émissions en atteignant des cibles annuelles intermédiaires à l’égard de l’arsenic, du plomb et du cadmium», et elle sera obligée de réduire «l’ampleur et la fréquence des pics de dioxyde de soufre».

Glencore présentera un plan

Dans un communiqué, Glencore Canada a indiqué qu’elle accueillait «avec ouverture les orientations présentées aujourd’hui par le ministre» et demeurait engagée à atteindre les objectifs les plus «ambitieux possible».

La multinationale a également mentionné que ses équipes étaient «pleinement mobilisées autour d’un projet de transformation majeur, qui fera de la Fonderie Horne l’une des plus efficientes au monde», tout en promettant de poursuivre ses efforts «pour répondre aux exigences qui figureront à notre prochaine attestation d’assainissement».

Glencore compte présenter un plan d’action «dans les jours à venir».

Consultation publique

Actuellement, une entente avec le gouvernement permet que les émissions de la fonderie atteignent une moyenne annuelle de 100 ng/m3, soit 33 fois plus que la norme québécoise de 3 ng/m3.

Le ministère de l’Environnement doit renouveler la nouvelle attestation «d’ici la fin novembre ou la fin de l’année», a mentionné Benoit Charette.

La population pourra se prononcer par écrit sur les nouvelles exigences présentées lundi, du 6 septembre au 20 octobre 2022.

Cette consultation en ligne, d’une durée de 45 jours, se tiendra sur la plateforme gouvernementale de consultation de Québec.ca, sur laquelle les citoyens pourront donner leurs opinions.

«Une séance se tiendra à Rouyn-Noranda en présentiel», pour les personnes qui n’auraient pu participer à la consultation en ligne.

Déception pour la Dre Naud-Bellavance

La docteure Claudel Naud-Bellavance, qui pratique à Rouyn-Noranda et qui a grandi dans cette ville de l’Abitibi-Témiscamingue, se dit déçue de l’annonce du ministre Charette.

«La consultation publique à venir sera très importante parce que, à mon sens, comme professionnelle de la santé, il y aura des modifications à faire au plan», a mentionné la médecin à La Presse Canadienne.

C’est l’échéancier de cinq ans qui fait surtout sourciller Claudel Naud-Bellavance.

Elle a rappelé que si la santé publique a proposé un seuil de 15 ng/m3, c’est pour protéger les plus vulnérables comme «les enfants et les enfants à naître» contre des «troubles neurodéveloppementaux», notamment.

«La santé publique mentionnait que 15 nanogrammes ou moins étaient jugés sécuritaires à leur sens, donc tout ce qui se trouve en haut de 15 ne l’est pas à mon avis et ce n’est pas raisonnable d’envisager que les quatre prochaines années, les cinq prochaines années, vont se passer en haut de 15 nanogrammes», a fait valoir la docteure en ajoutant que «cinq ans, c’est long dans la vie d’un enfant».

Elle félicite toutefois le ministère de l’Environnement qui a proposé des seuils pour les émissions de certains autres minéraux et l’ajout de bornes pour augmenter la surveillance des émissions d’arsenic.

La poursuite de la caractérisation et la décontamination des terrains annoncées par Benoit Charette et «la réduction de l’ampleur et de la fréquence des pics» d’émission proposée par le ministre représentent également «des gains» pour la population, selon elle.

QS exigerait 3ng dans un premier mandat

Selon la députée de Québec solidaire (QS) Émilise Lessard-Therrien, «la CAQ a choisi son camp», et c’est celui «de la multinationale Glencore et de ses profits mirobolants».

Elle a indiqué que QS exigerait un seuil de 3ng/m3 dans un premier mandat s’il formait le gouvernement aux prochaines élections.

Lors d’un point de presse, la députée de la région a souligné que «Glencore a versé plus de 8,5 milliards de dollars à ses actionnaires» et que «l’entreprise a les moyens de diminuer ses émissions».

Émilise Lessard-Therrien croit que Glencore peut rapidement «moderniser ses systèmes de ventilation, rendre ses bâtiments étanches, augmenter les manipulations sous couverts et en attendant que ces améliorations se fassent, il faut réduire à la source en diminuant l’apport de complexes trop toxiques».

Le co-porte-parole de QS, Gabriel Nadeau-Dubois, qui accompagnait sa députée, a ajouté que «si la fonderie était à Westmount, ça ferait longtemps que le problème serait réglé».

Un seuil qui «protège la santé»

La semaine dernière, le Dr Boileau avait indiqué que le seuil de 15 nanogrammes par mètre cube (ng/m3) permet «de protéger solidement la santé des bébés à naître et des enfants en bas âge» et de réduire les risques pour l’ensemble de la population de développer un cancer du poumon.

Il y a quelques semaines, un rapport de l’INSPQ révélait que, sur une période de 70 ans, entre un et 14 citoyens de Rouyn-Noranda de plus développeraient un cancer si l’entreprise Glencore ne diminue pas la concentration d’arsenic dans l’air produit par la Fonderie Horne.

Avec le nouveau seuil d’arsenic proposé par le ministre et la santé publique, le risque de cancer serait de «trois cas pour 100 000 habitants sur 70 ans», si les normes sont respectées pour les émissions de nickel et de cadmium selon l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), pour qui un «risque inacceptable» correspond à «10 cas sur 100 000 habitants».

Comme il y a environ 40 000 habitants à Rouyn-Noranda, trois cancers pour 100 000 habitants représentent 1,2 cancer sur une période de 70 ans d’exposition.