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Immigration: des PME veulent plus d’employés non qualifiés

François Normand|Publié le 10 juin 2021

Immigration: des PME veulent plus d’employés non qualifiés

Plusieurs PME manufacturières manquent de main-d'oeuvre peu qualifiée pour combler des postes qui sont souvent délaissés par les gens qui habitent déjà au Québec. (Photo: 123RF)

Confrontées à une grave pénurie de main-d’œuvre, des PME manufacturières demandent à Ottawa d’abolir ou d’augmenter la limite de la proportion des postes à bas salaire permise, et ce, afin de pouvoir embaucher davantage de travailleurs étrangers peu qualifiés.

Actuellement, une loi fédérale fixe à 10% la part maximale de travailleurs étrangers à bas salaire que peuvent embaucher les entreprises manufacturières au Canada. Par la notion de bas salaire, le fédéral entend une rémunération inférieure au salaire moyen horaire dans une province.

Au Québec, le salaire moyen s’élève à 23$ de l’heure. Par conséquent, les postes à bas salaire dans la province représentent les emplois ayant une rémunération inférieure à ce niveau.

Ainsi, si une entreprise manufacturière emploie par exemple 100 personnes (50 employés d’usine et 50 employés administratifs), elle pourra embaucher un maximum de 10 travailleurs étrangers.

Auparavant, la limite était de 20%, mais le précédent gouvernement conservateur de Stephen Harper l’a réduite à 10% pour des «raisons idéologiques», affirme Denis Hamel, vice-président aux politiques de développement de la main-d’œuvre au Conseil du patronat du Québec (CPQ).

Louis Veilleux, fondateur du Groupe Mundial, en Beauce, qui réunit sept entreprises manufacturières québécoises spécialisées dans la sous-traitance industrielle, estime que le gouvernement canadien devrait carrément abolir même cette notion de limite ou de quota.

«On devrait laisser le marché s’autoréguler pour aider les entreprises à pourvoir leurs postes vacants», dit-il.

À ses yeux, il faudrait également permettre aux travailleurs qui le souhaitent de venir s’établir au Québec avec leur famille, dont les conjoints ou conjointes peuvent eux-mêmes à combler des postes dans d’autres secteurs de l’économie.

«On passe en ce moment à côté de bons candidats», estime Louis Veilleux, qui a lui-même travaillé à l’étranger avec femme et enfants, à la fin des années 1990, quand il était le directeur des opérations d’un établissement de la multinationale québécoise Canam en Roumanie.

Le CPQ est aussi en faveur de l’abolition pure et simple de cette limite. Et si Ottawa n’est pas prêt à le faire, le gouvernement pourrait à tout le moins rétablir l’ancienne limite de 20%, insiste Denis Hamel.

«Quand le gouvernement Harper l’avait réduite, c’était purement pour des raisons idéologiques, et non pas économiques, dit-il. Le taux de chômage était bas, et les entreprises avaient de plus en plus besoin de main-d’œuvre.»

 

Moduler en fonction du taux de chômage

Pierre Fréchette, vice-président des ventes chez l’imprimeur Marquis, à Montmagny, propose quant à lui de moduler la limite en fonction du taux de chômage régional.

Ainsi, plus le taux de chômage d’une région serait bas, plus le quota devrait être élevé pour cette région.

En mai, le taux de chômage pour l’ensemble du Québec était de 6,5%, selon l’Institut de la statistique du Québec. Par contre, en Chaudière-Appalaches, où se situe la ville de Montmagny, ce taux était beaucoup moins élevé à 3,8%.

Une situation qui a un impact majeur sur Marquis, qui a trois usines, soit à Montmagny (où est situé le siège social), à Louiseville, en Mauricie, et à Toronto.

«Uniquement à notre établissement de Montmagny, nous avons 21 postes à combler sur un total de 150 personnes, dont une centaine travaillent dans l’usine», dit-il, en précisant que six travailleurs de l’île Maurice, dans l’Océan Pacifique, se joindront à son équipe en juillet.

Pierre Fréchette affirme que plusieurs entreprises de la région pâtissent grandement de la pénurie de main-d’œuvre, comme Marquis à l’heure actuelle.

«Si nous pouvions recruter le nombre d’employés dont nous avons besoin, nous pourrions augmenter nos ventes de 10 à 15% cette année. Toutefois, en raison de la pénurie de main-d’œuvre, elles vont plutôt stagner autour de zéro pour cent.»

IMS, une PME de Montréal spécialisée dans l’impression pour des produits de consommation, demande également davantage de flexibilité pour embaucher des travailleurs peu qualifiés en provenance de l’étranger.

«J’ai la conviction que les gens déjà établis au Québec délaissent les emplois manufacturiers peu qualifiés», déplore le président de l’entreprise Jean Éthier.

La PME emploie actuellement près de 70 personnes. Elle a quatre postes à combler, mais elle n’y arrive pas actuellement. «J’ai fait appel à quatre agences de placement, mais cela ne donne pas de résultats pour l’instant.»