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L’industrie n’améliore pas sa performance énergétique

François Normand|Publié le 08 février 2024

L’industrie n’améliore pas sa performance énergétique

Au Canada, on ne compte qu’environ 26 entreprises qui ont la norme internationale de système de gestion de l’énergie (ISO 50001), dont environ cinq au Québec. (Photo: Marek Piwnicki pour Unsplash)

Malgré les nombreux programmes et les campagnes de sensibilisation, les industriels et les Québécois n’ont pas encore changé leur habitude de consommation d’énergie, conclut le nouvel État de l’énergie au Québec 2024, dévoilé ce jeudi par la Chaire de gestion du secteur de l’énergie à HEC Montréal.

«Depuis 2014, le parc automobile et la grandeur des bâtiments à chauffer ont continué d’augmenter plus vite que la population, sauf en 2022 où un ralentissement de la croissance a été observée. La performance énergétique globale des industries demeure stable et la consommation énergétique par habitant reste l’une des plus élevées au monde», peut-on lire dans le document de 68 pages.

Johanne Whitmore et Pierre-Olivier Pineau, respectivement chercheure principale et professeur titulaire à la Chaire de gestion du secteur de l’énergie à HEC Montréal, ont coécrit ce rapport qui en est à sa dixième année de publication.

Selon eux, il est encore trop tôt pour distinguer les effets de la pandémie de COVID-19 des prix et de la transition énergétique au Québec dans les données de production et de consommation.

Par exemple, les ventes de produits pétroliers ont augmenté de 7% de 2021 à 2022, et on ajoute toujours plus de gros véhicules au parc automobile.

Pour autant, les deux spécialistes soulignent que les données qu’ils ont récoltées démontrent l’écart entre nos habitudes de consommation d’énergie et les cibles de réduction, qui sont encore loin d’être atteintes.

On parle notamment ici de celle de réduire de 40% de la consommation de produits pétroliers

Aux yeux des deux spécialistes, les tendances relatives à la consommation d’énergie «devront changer» pour permettre au Québec d’atteindre les cibles de 2030, notamment pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES).

Et cela inclut l’industrie.

 

60% de l’énergie perdue dans l’industrie

Selon le rapport, près de 60% de l’énergie consommée par le secteur industriel est perdue.

Le faible intérêt des industriels québécois et canadiens pour les certifications énergétiques les plus ambitieuses peut sans doute expliquer cette situation.

Ainsi, au Canada, on ne compte qu’environ 26 entreprises qui ont la norme internationale de système de gestion de l’énergie (ISO 50001), dont environ cinq au Québec.

Or, en Allemagne (un pays de 84 millions d’habitants comparativement à 40 millions au Canada), pas moins de 5 523 industriels détiennent cette certification.

En revanche, par rapport à l’industrie américaine, le Canada fait beaucoup mieux, car seulement 68 entreprises ont la certification (ISO 50001) aux États-Unis, un pays de 341 millions d’habitants.

L’évolution de l’intensité énergétique des secteurs industriels au Québec depuis une trentaine d’années indique aussi qu’il y a encore place à l’amélioration, soulignent Johanne Whitmore et Pierre-Olivier Pineau.

«L’intensité en émissions de GES industrielles par unité d’énergie consommée a diminué depuis 1990 (-6%), ce qui laisse croire que le secteur industriel en général a peu décarboné ses sources d’approvisionnement», soulignent les deux spécialistes.

 

Des industries ont baissé leur intensité énergétique

Cela dit, certains secteurs ont connu des baisses importantes d’intensité d’énergie, comme les pâtes et papiers (-52%), le manufacturier (-33%), ainsi que l’aluminium, la fonte et l’affinage (-32%).

En revanche, d’autres secteurs ont vu l’intensité de leur GES augmenter, dont la fabrication de produits chimiques (+40%), la sidérurgie (+13%), l’agriculture (+12%) et les mines (+12%).

Au Québec, les industriels consomment diverses sources d’énergie, dont la moitié est de la l’électricité:

  • Électricité: 51%
  • Gaz naturel: 21%
  • Produits pétroliers: 16%
  • Charbon: 2%
  • Autres: 1%

Le rapport documente aussi plusieurs autres tendances.

Par exemple, la consommation d’essence, de diesel et d’autres produits pétroliers a continué sa remontée, mais sans rattraper en 2022 les niveaux qui prévalaient avant la pandémie, à la fin des années 2010.

Par ailleurs, la part des ventes des véhicules utilitaires sport (VUS) et autres camions à essence continue d’augmenter au Québec. Depuis une trentaine d’années, leur part de marché a été multipliée par trois, pour passer de 24%, en 1990, à 70% en 2022.

Enfin, la vente de véhicules électriques poursuit son ascension. En 2022, ils comptaient pour 13% des ventes de nouveaux véhicules au Québec.

 

 

 

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