Avant la création de la coentreprise, chacune des trois PME pouvait réaliser un contrat pour un donneur d’ordres industriel, mais uniquement en partie, jamais en totalité. (Photo : Michaël Drapeau)
Trois PME de la région de Québec ont trouvé une solution originale pour trouver des employés et décrocher de plus gros contrats, avec une offre commerciale plus complète : elles ont créé une coentreprise, Clé en main industriel Québec (CEMIQ). Les avantages sont nombreux, mais il y a aussi des défis importants.
Ces trois PME sont Québec soudure, CURE ing. et DAM Industrie. La première réalise des travaux de montage et de soudage, la deuxième est spécialisée dans la gestion de projets en mécanique industrielle, tandis que la troisième offre des services de construction, de logistique et de maintenance industrielle.
Contrairement à une fusion, une coentreprise permet à des organisations de mettre en commun des ressources (humaines, matérielles, financières) afin d’accroître leurs parts de marché, mais sans renoncer pour autant à leur marque respective.
En outre, mettre fin à une coentreprise est aussi beaucoup plus simple que de défusionner des organisations.
CEMIQ est active depuis le mois d’octobre. Pour sa première année d’opération (soit d’octobre 2022 à octobre 2023), la coentreprise devrait réaliser des revenus de trois millions de dollars et employer une quarantaine de personnes.
Ce sont les conditions du marché qui ont incité les trois chefs d’entreprise – avec l’aide du stratège et entrepreneur Simon Lafrance, qui a notamment fondé la firme-conseil Strategeum, et qui est président exécutif du conseil de CEMIQ – d’unir leurs forces.
« Nous avons accès à un plus grand bassin de main-d’œuvre, nous sommes plus agiles et nous pouvons soumissionner sur de plus gros contrats », souligne le PDG de Dam Industrie, David Poirier, et directeur de la maintenance et de la mécanique industrielles de la coentreprise.
Réaliser désormais des projets de A à Z
« Nous sommes aussi plus complémentaires, parce qu’on peut désormais gérer un projet d’un bout à l’autre, pour tout faire de A à Z », ajoute pour sa part Félix Curodeau, PDG de Cure ing., et directeur génie-conseil et gestion de projets chez CEMIQ.
Avant la création de la coentreprise, chacune des trois PME pouvait réaliser un contrat pour un donneur d’ordres industriel, mais uniquement en partie, jamais en totalité.
Cette situation pouvait même parfois inciter une grande entreprise manufacturière à recourir aux services d’un fournisseur avec une offre plus intégrée plutôt que de faire des affaires avec l’une de ces trois PME de la région de Québec.
La création de la coentreprise a aussi eu un impact financier positif, explique Philippe Lavoie, PDG de Québec soudure, et directeur de la soudure et de la fabrication chez CEMIQ.
« Les marges bénéficiaires sont meilleures », assure-t-il.
Bref, les activités de CEMIQ ajoutent une marge supplémentaire aux trois entreprises, mais celles-ci préfèrent ne pas partager cette information.
Une rentabilité accrue
Cette rentabilité accrue tient à plusieurs facteurs.
- Les revenus sont plus élevés puisque les contrats sont plus importants;
- Les trois PME partagent des équipements et du savoir-faire;
- Les temps morts (l’ensemble des heures pendant lesquelles la production d’une entreprise est interrompue, par exemple en raison de l’absence de matière première) sont moins nombreux;
- Les coûts fixes (qui ne varient pas en fonction de la production, comme le loyer d’une entreprise) ont diminué.
Simon Lafrance, qui a organisé le financement de la coentreprise, fait remarquer que le regroupement des trois PME aussi fait baisser les coûts en capital. « Les institutions financières nous offrent des taux d’intérêt plus bas », dit-il.
Depuis la création de CEMIQ, les trois entreprises continuent d’utiliser leur usine respective pour réaliser des contrats.
Cela dit, la demande pour leur expertise collective est si grande que les entrepreneurs ont entamé « des discussions » à propos de la possibilité de se doter d’installations supplémentaires.
« De plus petites entreprises pourraient même se greffer à nous un jour », précise Simon Lafrance.
Le défi d’avoir une vision commune
Fonder une coentreprise – avec trois entreprises – représente toutefois des défis importants, admettent les entrepreneurs, à commencer par la nécessité de s’entendre sur une stratégie commerciale cohérente.
« On se connaissait déjà, mais l’élaboration de la vision commune a quand même représenté un défi », explique David Poirier, en ajoutant que la gestion de la main-d’œuvre en temps réel peut aussi occasionner certaines difficultés.
Et ces enjeux sont sans doute là pour rester au fur et à mesure que la coentreprise continuera grandir.
Si les entrepreneurs s’entendent pour dire que la collaboration entre les trois PME se passe bien actuellement, ils sont néanmoins conscients que rien n’est acquis.
Selon eux, les prochains mois seront déterminants pour l’avenir CEMIQ, dont le capital-actions est séparé à parts égales (25%) entre David Poirier, Philippe Lavoie, Félix Curodeau et Simon Lafrance.
Cette situation pourrait toutefois changer à terme, car les entrepreneurs sont ouverts à l’idée d’accueillir un investisseur institutionnel dans le capital-actions de la coentreprise.