Son usine de Huizhou, au nord de Hong Kong, a rouvert et a reparti sa production, sans que personne ne soit malade.
Même si une économie a été durement frappée par l‘épidémie de coronavirus, les entreprises manufacturières peuvent reprendre leurs activités grâce à de strictes mesures pour assurer la sécurité sanitaire des employés, des clients et des fournisseurs, assure Sébastien Bourassa de Savaria, une PME québécoise qui a une usine en Chine.
«Notre usine de Huizhou, au nord de Hong Kong, a été fermée du 22 janvier au 19 février. Mais depuis, on a rouvert et on a reparti la production, sans que personne ne soit malade», dit le vice-président des opérations de cette PME de Laval spécialisée dans la fabrication de produits de mobilité, qui a dirigé sur place l’usine chinoise de 2009 à 2015.
Savaria, qui possède 10 usines dans le monde (Canada, États-Unis, Chine et Australie), est active dans trois secteurs, soit l’accessibilité, les véhicules adaptés et le SPAN (des surfaces de soutien thérapeutique et des produits de gestion de la pression pour le marché médical).
L’usine de Huizhou fabrique des plates-formes élévatrices verticales et inclinées, des monte-escaliers ainsi que des ascenseurs pour villas.
Sébastien Bourassa tire trois grandes leçons des derniers mois en Chine, d’où est partie la pandémie mondiale de coronavirus.
Ce pays autoritaire a réussi à la contenir et à relancer son économie grâce à des mesures sanitaires strictes imposées par les autorités chinoises, à commencer par la surveillance électronique des citoyens (évaluant si quelqu’un est malade ou à risque).
Néanmoins, dans le secteur privé, M. Bourassa estime que les leçons tirées à son usine de Huizhou peuvent sans doute être utiles aux entreprises québécoises toujours en activité ou celles qui espèrent repartir bientôt la production, même si elles évoluent dans un cadre démocratique.
Leçon #1 – Respectez à la lettre les mesures gouvernementales
Il faut d‘abord de la «discipline» afin d’éviter la propagation du virus et rendre possible à terme un retour au travail, explique Sébastien Bourassa. «Les gens en Chine sont très disciplinés par rapport aux consignes du gouvernement. Si les autorités affirment qu’il faut fermer des usines, eh bien, elles ferment!»
Aussi, à la demande de Pékin, les entreprises manufacturières non essentielles en Chine ont fermé leur porte du 22 janvier au 19 février (une période qui comprend le long congé du Nouvel An chinois et une prolongation d’une dizaine de jours).
«Nos 123 employés en Chine qui le pouvaient ont fait du télétravail de la maison, et ils ont évité les lieux publics comme les restaurants», raconte M. Bourassa.
Huit employés de Savaria sont toutefois restés bloqués dans la province de Hubeï, après que le gouvernement chinois eut mis la province (l’épicentre de l’épidémie en Chine) en quarantaine forcée afin d’éviter une propagation à grande échelle dans le pays.
Plus de 50 millions de personnes ont été mis ainsi en quarantaine. La ville de Wuhan demeure toutefois en quarantaine jusqu’au 8 avril (mais les mesures de confinement dans la ville sont moins restrictives), selon la chaîne Franceinfo.
«Même si la quarantaine a été récemment levée dans cette province, ces huit employés de Savaria ont eu la consigne de rester encore deux semaines en confinement à leur domicile à Huizhou», précise M. Bourassa.
Leçon #2 – Offrez un environnement totalement sécuritaire aux employés
«L’hygiène est très importante pour être capable de redémarre une usine et éviter une contamination tant que la pandémie mondiale n’est pas terminée», dit le vice-président des opérations de Savaria.
Ainsi, l’usine de Huizhou a installé des stations dans plusieurs endroits stratégiques, à commencer par l’entrée du bâtiment, pour se laver les mains. Tous les employés doivent aussi porter un masque dans l’usine, et ce, de la chaîne de production aux services administratifs.
Mais comme le port du masque est une pratique courante en Chine et en Asie, cette mesure d’hygiène n’a pas été difficile à implanter dans l’entreprise.
Le personnel administratif à l’usine de Savaria à Huizhou, en Chine. (Photo: Savaria)
Leçon #3 – Gardez constamment une distance physique entre les employés
Pour opérer l’usine de Huizhou en sécurité, les employés doivent aussi garder une «bonne distance» entre eux afin d’éviter une contamination potentielle si jamais un employé asymptomatique était infecté sans la savoir.
Cette consigne s’applique autant pour les travailleurs sur la chaîne de production que pour les employés administratifs.
Enfin, jusqu’à un retour complet à la normale (la fin de la pandémie mondiale), le personnel de l’usine ne doit pas non plus fraterniser sur les heures de dîner. «Les gens ne mangent pas ensemble, mais plutôt à leur bureau», précise M. Bourassa.
Au Canada, Savaria essaie de reproduire ces pratiques, même si le chef des opérations de la PME québécoise reconnaît qu’il y a certaines limites, à commencer par le port du masque.
«On ne peut pas l’imposer, confie-t-il. Je ne vois pas comment cette mesure pourrait passer au Canada.»
Dans l’usine de Savaria à Toronto, plusieurs employés portent déjà un masque, mais cette pratique est facilitée par le fait que beaucoup d’entre eux sont issus de communautés culturelles asiatiques.
Au Québec, les établissements de Laval et de Magog sont fermés en raison de la demande du gouvernement du Québec de suspendre les activités des entreprises jugées non essentielles jusqu’au 13 avril.
Toutefois, les autres établissements de Savaria demeurent ouverts dans le reste du Canada, en Colombie-Britannique et en Ontario.
Malgré tout, chacun des 1 400 employés de l’entreprise (incluant le personnel-cadre), au pays et à l’étranger, recevra 1 000$ afin de passer au travers cette crise, et ce, pour une valeur totale de 1,4 million de dollars canadiens.
«Il faut toujours faire attention à notre monde, surtout période de crise», insiste M. Bourassa. Pour les 123 employés à l’usine de Huizhou, ce bonus de 1 000$ représente grosso modo un mois de salaire.