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Commerce: la crainte d’une Europe désunie face aux États-Unis de Trump

AFP|Mis à jour le 06 novembre 2024

Commerce: la crainte d’une Europe désunie face aux États-Unis de Trump

(Photo: Adobe Stock)

Bruxelles — Avec le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, l’Europe redoute d’être la cible d’un durcissement des droits de douane américains et tente de surmonter ses divisions pour trouver une réponse commune.

Le président élu n’en a pas fait mystère pendant sa campagne: il veut prendre des mesures pour inciter les entreprises à relocaliser leur production aux États-Unis.

Fin octobre, il a comparé l’Union européenne à une « mini Chine » qui abuse des États-Unis en accumulant, année après année, des excédents commerciaux massifs. « Ils ne prennent pas nos voitures, ils ne prennent pas nos produits agricoles, ils ne prennent rien », a-t-il dénoncé.

Le républicain affirme vouloir augmenter les droits de douane entre 10 et 20% pour l’ensemble des produits entrant aux États-Unis.

De quoi pousser l’Europe à se mobiliser?

Le président français Emmanuel Macron a annoncé qu’il avait « échangé » avec le chancelier allemand Olaf Scholz après l’élection de Donald Trump.

« Nous allons œuvrer pour une Europe plus unie, plus forte, plus souveraine dans ce nouveau contexte », a-t-il affirmé sur le réseau social X.

La réaction du chancelier allemand, plus prudente, ne mentionne pas cette quête de souveraineté. « Depuis longtemps, l’Allemagne et les États-Unis travaillent ensemble avec succès pour promouvoir la prospérité et la liberté des deux côtés de l’Atlantique. Nous continuerons à le faire pour le bien-être de nos citoyens », a déclaré Olaf Scholz.

La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen s’est placée sur la même ligne. « Travaillons à un partenariat transatlantique qui continue d’avoir des résultats pour nos citoyens. Des millions de jobs et des milliards en matière de commerce et d’investissements dépendent de chaque côté de l’Atlantique du dynamisme et de la stabilité de notre relation », a-t-elle déclaré.

L’Europe défend traditionnellement le libre commerce, conformément à l’idéologie mercantiliste allemande, et répugne à recourir à des mesures de protection pour son industrie même quand elle subit un traitement déloyal.

La fin de l’Europe naïve?

La France plaide pour une Europe moins « naïve » également soutenue par l’ancien premier ministre italien Mario Draghi qui y voit même une nécessité pour éviter un déclassement de l’économie européenne face aux États-Unis et à la Chine.

La proposition d’une politique commerciale plus pragmatique figure en bonne place dans le rapport publié en septembre par l’ancien président de la Banque centrale européenne et qui sera discuté par les chefs d’État et de gouvernement de l’UE, réunis en sommet jeudi et vendredi à Budapest.

« Les Européens resteront-ils unis face à Trump et capables d’identifier un intérêt européen commun? Cela va être compliqué », s’inquiète pourtant Sylvie Matelly, directrice de l’Institut Jacques Delors.

« La politique commerciale européenne pourrait être la première victime de l’élection du nouveau président américain. L’Allemagne vend énormément de voitures aux États-Unis et devrait freiner une réaction européenne aux droits de douane imposés par Trump ».

L’Europe a déjà subi de plein fouet ces derniers mois l’Inflation Reduction Act (IRA) du président Joe Biden, un plan protectionniste de subvention des industries vertes américaines.

Ces aides publiques géantes ont été décidées et mises en oeuvre au détriment de concurrents européens déjà affaiblis par la flambée du coût de l’énergie dans l’UE après l’invasion de l’Ukraine par la Russie et la rupture des approvisionnements en gaz russe bon marché.

Un problème d’autant plus grave que l’Europe subit au même moment les subventions de Pékin à l’industrie chinoise, notamment dans les véhicules électriques.

Ce sujet a illustré récemment les divisions de l’Union européenne, mais aussi sa capacité à adopter une réponse commune.

Alors que l’industrie automobile européenne est au plus mal et multiplie les suppressions d’emplois, l’UE a finalement réussi à mettre en place fin octobre des droits de douane sur les voitures électriques importées de Chine.

La Commission, soutenue par la France, l’Italie et la Pologne, a agi malgré l’opposition d’un groupe d’États membres mené par l’Allemagne dont les constructeurs sont très engagés en Chine.

Par Daniel Aronssohn