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Face aux sanctions, l’économie russe joue sa survie

AFP|Publié le 02 mars 2022

Face aux sanctions, l’économie russe joue sa survie

La Banque centrale a annoncé des mesures interdisant aux étrangers de vendre leurs actions russes et de retirer des fonds du marché financier russe, face à une hémorragie d'investissements étrangers. (Photo: 123RF)

Moscou — Les autorités russes tentaient mercredi d’enrayer l’hémorragie économique et la panique provoquées par les sanctions massives imposées contre Moscou à la suite de l’invasion de l’Ukraine et qui fragilisent comme jamais l’économie moderne bâtie depuis la fin de l’URSS.

L’économie russe va-t-elle survivre? Interrogé par la presse, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a répondu en termes vagues. Dans un «environnement économique hostile», il faut «minimiser les conséquences». En somme, la Russie «restera debout».

Mais la voix du Kremlin, peu loquace, a avoué que l’économie russe subissait «un sérieux coup dur», et que son «intégrité» était en jeu.

Depuis l’annonce de sanctions économiques massives contre la Russie en représailles à l’invasion de l’Ukraine par Moscou, les Russes se réveillent dans une dystopie économique.

Leur argent a perdu plus d’un tiers de sa valeur en devises en quelques jours, leurs avions ne peuvent plus se rendre que dans une poignée de pays, leurs emplois, leurs salaires, leurs prêts… tout semble menacé.

 

«Panique»

La présidente la Chambre haute du parlement Valentina Matvienko, qualifiant les sanctions de «sans précédent», a invité «tout le monde à brancher les cerveaux, pour analyser tout ce qui empêche» le monde de l’entreprise de fonctionner, invitant à ne pas céder à la «panique».

Le premier ministre a, lui, répété des recettes russes vieilles de vingt ans: remplacer les importations par des produits locaux et diversifier les sources de revenus. 

Mais ces déclarations semblent bien peu de choses face à l’éventualité d’un cataclysme. La Bourse de Moscou reste fermée depuis lundi et les autorités multiplient les restrictions pour limiter la casse.

La Banque centrale a annoncé des mesures interdisant aux étrangers de vendre leurs actions russes et de retirer des fonds du marché financier russe, face à une hémorragie d’investissements étrangers. Il est également interdit de quitter la Russie avec plus de 10 000 dollars en espèces.

Le ministère des Finances s’est prononcé en faveur de l’abolition de la TVA sur les achats d’or par des particuliers, leur suggérant de le préférer à l’achat de devises étrangères.

Sberbank, première banque de Russie, très profitable il y a encore seulement quelques semaines, a annoncé mercredi son retrait du marché européen, provoquant un effondrement de 95% de la valeur de ses actions à la Bourse de Londres. 

Les entreprises et les oligarques russes sanctionnés annoncent en cascade le repli de leurs activités, tandis que les entreprises étrangères se précipitent pour annoncer la fin de leurs services en Russie.

Des poids lourds du secteur des hydrocarbures, comme Shell et BP, ont annoncé leur retrait d’un pays où ils ont investi des milliards.

Des centaines de milliers d’emplois, peut-être même plus, sont en jeu pour les Russes travaillant pour des entreprises étrangères, qui s’inquiètent également du paiement de leurs salaires alors que les liens des banques russes avec l’étranger approchent dangereusement de la rupture.

 

Les Russes à crédit

Les Russes, dont on vante souvent la résilience face aux cataclysmes de l’histoire, goûtent depuis une vingtaine d’années aux fruits du capitalisme et d’une économie intégrée à l’international. 

Loin des décombres de l’URSS, la classe moyenne a pris l’habitude des voyages à l’étranger, des restaurants et des boutiques. La popularité endurante de Vladimir Poutine tient en grande partie à la stabilité économique qui s’est installée depuis son arrivée au Kremlin en 2000. 

Depuis les sanctions de 2014, suite à l’annexion par Moscou de la péninsule de Crimée, l’État a accumulé de solides réserves pour résister aux sanctions.

Mais les citoyens russes, qui ont vu leurs pouvoirs d’achat s’éroder en huit ans dans une économie atone, ne sont pas dans la même situation, d’autant que beaucoup ont financé leur bien-être matériel par le crédit, et ce, alors que près de deux tiers d’entre eux n’ont aucune épargne, selon un sondage de 2021 de l’institut Levada.

«Si vous avez des prêts ou d’autres dettes auprès des banques, il faut les rembourser rapidement. La crise augmente le risque de perdre des sources de revenus», disait mercredi aux Russes le conseiller financier Sergueï Leonidov, dans une interview à l’agence Ria Novosti.