L'actuel président américain Joe Biden (Photo: Getty Images)
Washington — Israël entendra-t-il le message de Joe Biden à propos d’une désescalade? Le doute est permis alors que la diplomatie américaine affiche son impuissance à infléchir son allié depuis le début de la guerre dans la bande de Gaza.
Le président américain a laissé entendre lundi qu’il était opposé à des opérations terrestres israéliennes au Liban, appelant au cessez-le-feu dans un moment de tensions extrêmes après l’assassinat du chef du Hezbollah Hassan Nasrallah.
«Je suis plus au courant que vous ne le pensez et je suis d’accord pour qu’ils s’arrêtent. Nous devons avoir un cessez-le-feu maintenant», a déclaré Joe Biden comme on lui demandait s’il était au courant d’informations sur des projets israéliens d’incursion terrestre au Liban.
Quelques heures plus tard, le département d’État confirmait avoir eu des conversations avec les Israéliens qui ont dit mener «actuellement des opérations terrestres limitées ciblant des infrastructures du Hezbollah près de la frontière».
Le scénario semble familier.
À chaque fois que les États-Unis parlent diplomatie ou appellent au cessez-le-feu, le premier ministre israélien Benjamin Nétanyahou semble répondre en intensifiant l’offensive.
Mercredi dernier, à peine l’encre séchée sur un communiqué conjoint entre les États-Unis et la France appelant à un cessez-le-feu de 21 jours entre Israël et le Hezbollah, que M. Nétanyahou annonçait le lendemain de nouvelles frappes contre le mouvement islamiste libanais, soutenu par l’Iran.
En pleine Assemblée générale de l’ONU, le contraste était d’ailleurs saisissant: alors que le premier ministre israélien autorisait vendredi un raid dévastateur contre le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah, le secrétaire d’État américain Antony Blinken renouvelait son appel à suivre la voie de la diplomatie.
« Israël a le droit de se défendre, mais la manière dont il le fait importe », a-t-il affirmé lors d’une conférence de presse, en écho à la position américaine exprimée dès après l’attaque sanglante du Hamas contre Israël le 7 octobre.
Pousser son avantage
Certes, Washington ne « pleure pas » la mort du chef du Hezbollah, le qualifiant de « terroriste brutal », mais les États-Unis s’étaient empressés de dire qu’ils n’étaient ni impliqués ni informés au préalable de l’attaque. Ils avaient fait de même après la mort du chef politique du Hamas, Ismaïl Haniyeh, tué en Iran le 31 juillet dans une attaque imputée à Israël.
Israël entend clairement pousser son avantage au maximum, ayant considérablement affaibli le mouvement islamiste libanais, et face au Hamas largement défait à Gaza, confie-t-on de source diplomatique.
Et, malgré les vents contraires, à Washington, on veut encore croire en la diplomatie.
« La diplomatie reste la meilleure et la seule voie pour parvenir à une plus grande stabilité au Moyen-Orient, et les États-Unis restent déterminés à faire avancer ces efforts de toute urgence » en vue d’une résolution diplomatique au Liban et d’un cessez-le-feu dans la bande de Gaza, a dit Antony Blinken.
Ce dernier s’est entretenu dimanche avec son homologue français Jean-Noël Barrot, lequel a exhorté lundi depuis Beyrouth Israël à « s’abstenir de toute incursion terrestre au Liban », visiblement sans écho.
Antony Blinken a également joint le Britannique David Lammy lundi matin, et échangé avec des ministres arabes, en marge d’une réunion ministérielle à Washington de la coalition contre le groupe État islamique.
Dans son entourage, on assure ne pas dicter à Israël, un État souverain, sa conduite de la guerre, tout en reconnaissant à demi-mots une marge de manoeuvre limitée sur M. Nétanyahou.
Mais les évènements semblent s’accélérer sans que les États-Unis ne puissent grand-chose, reléguant le premier soutien politique et militaire d’Israël à être dans la réaction, dans la gestion de crise.
Et Joe Biden s’est jusqu’à présent refusé à user du levier des armes à Israël, en dehors de la suspension d’une livraison de bombes en mai.
Le calendrier politique américain vient compliquer les choses, alors que la vice-présidente Kamala Harris est engagée dans une course difficile contre l’ancien président Donald Trump.
L’administration Biden se désespère d’arracher un accord au Moyen-Orient avant la présidentielle afin d’éviter l’impression de chaos, mais peu d’observateurs croient qu’elle est prête à un changement de stratégie, si près du scrutin le 5 novembre.