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L’agence de notation Fitch met la France sur le gril

AFP|Publié à 14h15

L’agence de notation Fitch met la France sur le gril

Fitch accorde actuellement un «AA-» à la France, soit l'équivalent d'un 17/20. (Photo: 123RF)

L’agence de notation Fitch dévoile vendredi soir son diagnostic de l’économie française qui pourrait déboucher sur un statu quo ou une rétrogradation de sa note, au lendemain de la présentation d’un projet de budget 2025 qui prévoit un effort de 60 milliards d’euros pour contenir l’envolée du déficit.

L’agence de notation américaine peut aussi ajouter une «perspective négative» à sa note sans la modifier, synonyme de risque de rétrogradation future.

Fitch accorde actuellement un «AA-» à la France, soit l’équivalent d’un 17/20 (c’est-à-dire un 17 sur une échelle de 20 niveaux de notation).

Lors de sa dernière évaluation des finances françaises en avril – un statu quo -, Fitch avait alerté sur un risque de baisse en cas d’«augmentation importante et persistante de la dette (…) résultant de déficits publics plus élevés que prévu». Or, la France a effectué de brutales révisions de sa prévision de déficit pour 2024, passant de 4,4% fin 2023 à 5,1% en avril pour finalement culminer à 6,1% du PIB.

«La France fait figure d’exception» en zone euro, analyse le cabinet de recherche Oxford Economics. Le pays «a peu de chances de réduire significativement son déficit dans les prochaines années», là où la plupart de ses voisins sont plus rigoureux, souligne-t-il.

L’Espagne compte par exemple afficher un déficit public de 2,5% l’an prochain et l’Italie de 3,3%.

2024, année «noire»

Pour prouver sa volonté et éviter un risque de «crise financière» selon les mots du premier ministre Michel Barnier, le gouvernement a présenté jeudi son projet de budget pour 2025, prévoyant 60 milliards d’euros d’efforts sous forme de réductions de dépenses et de hausses d’impôts afin de ramener le déficit public à 5%.

D’ampleur «relativement inédite» selon le président du Haut Conseil des Finances publiques (HCFP) Pierre Moscovici, qui en a analysé les contours macroéconomiques, cette potion mêlant hausses d’impôts et baisses de dépenses pourrait remettre la France sur des rails moins glissants après une année 2024 qualifiée de «noire» jeudi.

Mais elle risque aussi, selon lui de peser sur la croissance l’an prochain, anticipée aujourd’hui à 1,1% par le gouvernement, et de compliquer la réduction des déficits à l’avenir.

«Toute absence de signaux clairs de réduction du déficit public lorsque ce budget sera adopté viendra dégrader la confiance que les marchés (…) peuvent avoir dans notre capacité à nous financier durablement et à avoir une dette soutenable», a prévenu vendredi le ministre des Finances Antoine Armand au cours d’une audition au Sénat.

«On ne fait pas une politique pour des agences de notation, mais on regarde évidemment quel est le climat international», avait-il reconnu un peu plus tôt.

Irréaliste

L’objectif de déficit pour 2025 de la France «parait irréaliste», affirment toutefois les experts de l’assureur-crédit Allianz Trade, qui anticipent dans une note une glissade à 5,5%, notamment en raison des difficiles négociations parlementaires à venir dans une assemblée morcelée.

Sur Fitch, ils jugent que «d’un point de vue historique, un placement sous surveillance négative serait plus probable qu’une rétrogradation pure et simple».

Une rétrogradation a généralement pour effet de renchérir les taux d’emprunt auprès des investisseurs. Le taux à dix ans, référence pour les comparaisons internationales, est déjà supérieur pour la France à celui de l’Espagne et du Portugal, des pays autrefois réputés plus dépensiers.

Ce renchérissement alourdit la charge de la dette, aujourd’hui deuxième poste budgétaire français, d’autant plus inquiétant que Paris a annoncé jeudi un programme record de 300 milliards d’euros d’emprunts sur les marchés l’an prochain.

Mais la question de l’attractivité de la dette française ne se pose pas aujourd’hui: le dernier emprunt de 12 milliards d’euros à long terme début octobre a débouché sur une demande des investisseurs fortement supérieure aux besoins français.

Par ailleurs, la différence entre le taux d’emprunt français et l’Allemagne, pays réputé le plus sûr de la zone euro, reste à des niveaux jugés peu inquiétants.

Après Fitch, l’agence de notation Moody’s, qui classe la France un cran au-dessus de ses consoeurs, donnera son diagnostic sur l’économie française le 25 octobre, avant S&P Global le 29 novembre.