Ukraine: la Finlande fait un grand pas vers l’OTAN
AFP et La Presse Canadienne|Publié le 12 mai 2022Les ministres des Affaires étrangères des pays membres de l'OTAN se réuniront en parallèle, vendredi et samedi, où ils devraient discuter de leur soutien militaire à l'Ukraine, et peut-être aussi à la Moldavie. (Photo: Getty Images)
Ce texte regroupe tous les derniers développements à propos de l’invasion de la Russie en Ukraine pour la journée du 12 mai. Pour retrouver toute notre couverture sur le conflit, c’est ici. NDLR. Certains contenus sont explicites et peuvent être difficiles à lire.
6h40 | Kyiv — La Finlande a fait jeudi un grand pas vers une adhésion à l’OTAN, Moscou dénonçant une «menace» pour la Russie, tandis que les livraisons de gaz russe à l’Europe via l’Ukraine accusaient de nouvelles perturbations, témoin des chamboulements géopolitiques et énergétiques induits par deux mois et demi de conflit.
Le président et la première ministre de Finlande, Sauli Niinistö et Sanna Marin, se sont dits favorables jeudi à une adhésion «sans délai» à l’OTAN, prélude à une candidature formelle dimanche de ce pays nordique, qui partage 1 300 km de frontière avec la Russie et fut longtemps contraint à une espèce de neutralité forcée par Moscou.
Le Kremlin a rapidement critiqué cette décision: une adhésion de la Finlande à l’OTAN serait «assurément» une menace pour la Russie, a déclaré son porte-parole, Dmitri Peskov.
De son côté, le secrétaire général de l’Alliance, Jens Stoltenberg a assuré que «si la Finlande décidait de postuler, elle serait chaleureusement accueillie au sein de l’OTAN et le processus d’adhésion se déroulerait sans heurts et rapidement».
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a lui aussi félicité le président finlandais lors d’un échange téléphonique, a-t-il indiqué dans un tweet.
Cette annonce d’Helsinki — qui devrait être suivie d’une décision similaire de la Suède dans les prochains jours — montre combien l’offensive contre l’Ukraine lancée par Vladimir Poutine le 24 février a fait basculer l’opinion finlandaise. Selon un sondage publié lundi, 76% des 5,5 millions de Finlandais sont désormais favorables à une adhésion, soit trois fois plus qu’avant-guerre.
Inquiètes de la réaction de Moscou à ces probables demandes d’adhésion à l’Alliance atlantique, Stockholm et Helsinki ont signé dès mercredi des déclarations de protection mutuelle avec le Royaume-Uni, lors d’une visite de Boris Johnson dans les deux pays.
Nouvelle baisse des livraisons de gaz
L’incertitude montait par ailleurs sur les livraisons de gaz russe à l’Europe transitant par l’Ukraine, avec l’annonce par le géant gazier russe Gazprom que les volumes allaient baisser de près de 30% ce jeudi, après une baisse de 18% la veille.
Les deux parties se rejettent la faute. Kyiv dit depuis deux jours qu’elle ne peut plus garantir les livraisons via les installations de Sokhranivka, dans la région de Lougansk, en raison de la présence des forces armées russes, et a demandé à Gazprom d’accroître les volumes via un autre point de transit, Soudja.
Mais Moscou assure que le transit peut parfaitement se faire via Sokhranivka, alors que réorienter le flot vers Soudja est impossible.
Mercredi, l’Allemagne, l’un des principaux clients européens du gaz russe, avait indiqué avoir enregistré une baisse de 25% des volumes de gaz russe acheminés via l’Ukraine. Berlin avait souligné avoir compensé cette baisse, en augmentant les volumes venus notamment de Norvège et des Pays-Bas.
Kouleba au G7
Ces perturbations gazières pourraient être au menu de la visite du ministre des Affaires étrangères ukrainien Dmytro Kouleba en Allemagne, où il devait participer vendredi et samedi à une réunion avec ses homologues du G7 (Canada, France, Allemagne, Italie, Japon, Royaume-Uni et États-Unis).
Les ministres des Affaires étrangères des pays membres de l’OTAN se réuniront en parallèle, vendredi et samedi, où ils devraient discuter de leur soutien militaire à l’Ukraine, et peut-être aussi à la Moldavie.
La cheffe du renseignement américain Avril Haines avait indiqué mardi que Vladimir Poutine n’avait pas l’intention de limiter sa volonté d’occupation aux régions du Donbass et au sud de l’Ukraine — où un responsable local de la ville de Kherson a indiqué mercredi vouloir demander que cette région soit annexée à la Russie.
Selon Mme Haines, il veut porter le conflit à la Transdniestrie, région de Moldavie qui a fait sécession en 1990.
Lors de sa première intervention publique jeudi à Berlin, M. Kouleba a à nouveau plaidé pour une adhésion de son pays à l’Union européenne.
«On entend très souvent que l’Ukraine appartient à la famille européenne et à présent il importe de (lui) réserver cette place» dans l’UE, a-t-il déclaré à la télévision allemande, tout en paraissant reconnaître qu’il n’espérait pas une «adhésion la plus rapide possible».
Kyiv a présenté sa candidature à l’adhésion à l’UE le 28 février, mais certains pays membres sont sceptiques, y compris sur l’octroi du statut de candidat à l’Ukraine, question sur laquelle une décision est attendue en juin.
Nouvelles frappes russes
Sur le terrain, les combats se poursuivent, et personne ne parle plus de pourparlers depuis plusieurs semaines.
Des frappes aériennes russes ont fait au moins trois morts et 12 blessés dans la nuit de mercredi à jeudi près de Tcherniguiv, dans le nord-est de l’Ukraine, selon les services de secours locaux.
Le gouverneur régional, Viatcheslav Tchaouss, a indiqué que «des infrastructures critiques, dont des écoles» avaient été touchées, sans autres précisions.
L’armée russe poursuit son offensive dans le Donbass, où elle grignote du terrain, avec des combats intenses sur la région de Lougansk. Ils essaient notamment de prendre «le contrôle total» des localités de Roubijné et de Severodonetsk, selon la présidence ukrainienne.
Les habitants de la région qui ont refusé l’évacuation sont souvent favorables à Moscou. «Ils donnent aux Russes nos coordonnées, c’est certain», a indiqué à l’AFP un soldat qui utilise le nom de guerre «Zastava», rencontré sur la ligne de front à Novomykolaïvka.
Le gouverneur de la région russe de Belgorod, voisine de l’Ukraine dans le sud-ouest de la Russie, a lui affirmé mercredi que des bombardements en provenance d’Ukraine avaient fait un mort et six blessés.
Premier procès pour crime de guerre
Sur le plan diplomatique, le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU se réunissait jeudi à Genève en session extraordinaire pour examiner les allégations d’exactions graves commises par la Russie en Ukraine, notamment dans la région de Kyiv que les forces russes ont occupée en mars.
C’est la première réunion de cette instance consacrée à la détérioration de la situation des droits de l’Homme en Ukraine depuis que l’Assemblée générale de l’ONU a suspendu Moscou début avril. Moscou a annoncé qu’elle ne participerait pas à cette réunion demandée par l’Ukraine.
Le texte proposé par Kyiv réclame que la commission internationale d’enquête de l’ONU sur l’Ukraine mène «une enquête» sur les événements survenus dans les régions de Kyiv, Tcherniguiv, Kharkiv et Soumy entre fin février et mars, «en vue de demander des comptes aux responsables».
La Russie est accusée par Kyiv et plusieurs pays occidentaux d’avoir commis des crimes de guerre en Ukraine depuis le début de son offensive le 24 février. Des enquêtes de la Cour pénale internationale et des autorités ukrainiennes sont en cours.
Selon la procureure générale ukrainienne, un premier soldat russe de 21 ans sera jugé prochainement pour avoir abattu un civil ukrainien de 62 ans non armé, sur son vélo.
Le soldat, Vadim Chichimarin, se déplaçait avec quatre autres soldats russes après l’attaque de leur convoi le 28 février, selon le communiqué de la procureure. Ils auraient volé une voiture dans la région de Soumy (est) et Chichimarin aurait abattu le civil «afin qu’il ne les dénonce pas», selon le communiqué, qui ne précise pas la date du procès.
Le Conseil de sécurité des Nations unies doit également se réunir jeudi à partir de 10h00, heure du Québec, à la demande de la France et du Mexique, pour examiner la situation en Ukraine.