Zaporijjia: la centrale mise en danger par une coupure totale
AFP et La Presse Canadienne|Publié le 09 septembre 2022«Seul le retrait des Russes de la centrale et la création d’une zone de sécurité autour d’elle peuvent normaliser la situation à Zaporijjia. Ce n’est qu’alors que le monde pourra respirer», a déclaré vendredi Petro Kotin, le chef d’Energoatom, à la télévision ukrainienne. (Photo: La Presse Canadienne)
Ce texte regroupe toutes les réactions depuis l’invasion de la Russie en Ukraine pour la journée du 09 septembre 2022. Il sera mis à jour au courant de la journée. Pour retrouver toute notre couverture sur le conflit, c’est ici.
10h59 | Vienne — L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a fait état vendredi d’une «coupure totale de courant» dans la ville ukrainienne d’Energodar, où est située la centrale nucléaire de Zaporijjia, une situation qui «compromet la sécurité des opérations».
«C’est totalement inacceptable. Cela ne peut pas continuer», a déclaré dans un communiqué le directeur général, Rafael Grossi, appelant à «cesser immédiatement les bombardements dans la zone».
Depuis des semaines, la confusion règne autour de la plus grande centrale d’Europe, occupée par les Russes, qui a été touchée par de multiples frappes dont Kiev et Moscou s’accusent mutuellement.
«L’infrastructure électrique alimentant la ville a été détruite par des frappes au niveau de la centrale thermique, provoquant une coupure totale d’eau et d’électricité», a expliqué M. Grossi, informé par les deux experts de l’instance onusienne présents sur place.
«Étant donné l’intensification des bombardements qui sont incessants, il est peu probable qu’il soit possible de rétablir une alimentation hors site fiable pour la centrale», a ajouté le chef de l’AIEA, qui s’est rendu sur le site début septembre.
Dans ces conditions, l’opérateur ukrainien Energoatom «envisage de fermer le seul réacteur en fonctionnement», qui produit pour l’heure l’électricité nécessaire pour le refroidissement du combustible nucléaire et la sécurité du site.
Le cas échéant, l’ensemble des systèmes de la centrale devront s’appuyer sur des générateurs de secours fonctionnant avec du diesel, avertit l’agence basée à Vienne.
En outre, du fait de ces circonstances «dramatiques auxquelles sont confrontés les habitants d’Energodar», le personnel nécessaire pour maintenir la sécurité du site risque de ne plus être disponible.
Quelques jours après un rapport alarmiste, Rafael Grossi réitère son inquiétude: «c’est une situation insoutenable et de plus en plus fragile».
Dans le communiqué, il appelle de nouveau à la mise en place d’une zone de sécurité autour de la centrale.
Les troupes russes ont pris début mars le contrôle de la centrale comptant six réacteurs nucléaires d’une puissance de 1 000 mégawatts chacun et qui produisait 20% de l’électricité ukrainienne avant l’invasion russe.
La Russie envoie des renforts après une percée ukrainienne
9h02 | Kharkiv — L’armée russe a annoncé vendredi avoir envoyé des renforts en direction de la région ukrainienne de Kharkiv, une réplique à une percée apparemment réussie des forces de Kyiv dans cette zone frontalière de la Russie.
Kyiv a affirmé jeudi avoir reconquis quelque 700 km2 dans cette région du Nord-Est ukrainien ces derniers jours, en particulier la ville de Balakliïa, ainsi qu’une vingtaine de localités.
Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a estimé depuis Bruxelles que le déploiement de renforts par Moscou montre que la Russie paye «un énorme prix».
Le ministère russe de la Défense, qui n’a fait aucun commentaire sur le sujet, a néanmoins annoncé aux agences de presse russes le déploiement de renforts dans cette direction, diffusant une vidéo montrant blindés, obusiers et camions roulant en grand nombre sur des routes non géolocalisées. Il n’a pas diffusé de communiqué pour détailler ou commenter ces déploiements.
Combats acharnés
Un haut responsable de l’administration d’occupation mise en place par Moscou dans les zones contrôlées par l’armée russe, Vitali Gantchev, a affirmé vendredi sur la chaîne de télévision russe Rossiya 24 que des «combats acharnés» étaient en cours autour de la ville de Balakliïa, que Kyiv a dit jeudi avoir reconquise.
«Nous ne contrôlons plus Balakliïa. Des tentatives pour déloger les forces ukrainiennes sont en cours, mais les combats là-bas sont acharnés et nos troupes sont retenues aux abords» de la ville, a-t-il affirmé.
Selon lui, des combats difficiles ont aussi lieu près de la localité de Chevtchenkové, toujours dans la région de Kharkiv. «Là aussi, les forces armées ukrainiennes essayent de briser les défenses. Des réserves depuis la Russie ont été envoyées là-bas, nos troupes ripostent», a affirmé Vitali Gantchev.
La route de Kharkiv en direction du sud-est, vers Balakliïa, était ouverte à la circulation vendredi matin, a constaté une équipe de l’AFP, une zone que l’armée ukrainienne semble avoir reconquise lors de combats ces derniers jours.
De nombreuses voitures civiles circulaient, ainsi que des véhicules militaires. Des files d’attente étaient également visibles à plusieurs checkpoints.
Kharkiv, capitale de la région du même nom et deuxième ville d’Ukraine, est située dans le nord-est du pays, juste à la frontière avec la Russie, et résiste depuis le début de l’invasion du 24 février aux efforts russes pour la conquérir.
Outre la percée dans cette région, Kyiv a aussi revendiqué jeudi une série de succès dans le Sud et l’Est, affirmant avoir repris des territoires et de nombreuses localités.
S’ils sont consolidés, ces gains ukrainiens des derniers jours, associés à ceux revendiqués dans le Sud et l’Est, sont les plus importants pour l’Ukraine depuis le retrait des troupes russes des environs de Kyiv fin mars.
Dans le Donbass, bassin minier de l’Est ukrainien où les combats les plus violents de la guerre se sont déroulés ces derniers mois, Kyiv a affirmé jeudi avoir avancé de deux à trois kilomètres près de Kramatorsk et de Sloviansk et repris le village d’Ozerné.
Unité de l’OTAN
À 45 km de là, à Bakhmout, huit civils ont été tués jeudi et 17 autres blessés dans des frappes russes, selon les autorités ukrainiennes.
«Vingt maisons, six immeubles, quatre magasins, la Maison de la Culture et le centre administratif de la ville ont été endommagés» dans ces frappes russes, a déclaré vendredi le gouverneur régional, Pavlo Kyrylenko, ajoutant que le marché avait été «sous le feu» de l’artillerie russe.
Bakhmout, qui comptait 70 000 habitants avant le début du conflit fin février, n’a plus d’eau ni d’électricité pour le quatrième jour consécutif, selon M. Kyrylenko.
En déplacement à Prague, Lloyd Austin, le secrétaire américain à la Défense, a salué les récents succès de l’Ukraine, notant que les armements occidentaux, comme les HIMARS américains, ont pu être employés pour «changer la dynamique sur le champ de bataille». «Nous voyons des succès à Kherson (sud) maintenant, des succès à Kharkiv, et donc tout ça est très, très encourageant», a-t-il dit.
Le secrétaire d’État américain Antony Blinken était pour sa part à Bruxelles pour une réunion avec l’OTAN, où il compte insister sur «l’unité» des membres de l’organisation pour «s’assurer que notre Alliance soit aussi forte que possible pour dissuader la Russie de toute nouvelle agression».
La centrale de Zaporijjia fonctionne en mode «urgence»
Kyiv — L’opérateur national ukrainien de l’énergie nucléaire a prévenu vendredi que la plus grande centrale nucléaire d’Europe, prise dans la guerre entre l’Ukraine et la Russie, fonctionnait en mode d’urgence avec un risque élevé.
La centrale nucléaire à six réacteurs de Zaporijjia est passée sous le contrôle des forces russes au début de la guerre qui a commencé en février, mais elle est exploitée par du personnel ukrainien. L’usine et les zones environnantes ont été touchées à plusieurs reprises par des bombardements que la Russie et l’Ukraine imputent aux forces de l’autre.
La dernière ligne électrique reliant la centrale au réseau électrique ukrainien a été coupée lundi, laissant la centrale sans source extérieure d’électricité et alimentée pour ses propres systèmes de sécurité par le seul de ses six réacteurs qui reste opérationnel.
Energoatom, l’opérateur nucléaire d’État, a déclaré vendredi que les réparations des lignes extérieures étaient impossibles en raison des bombardements et que l’exploitation dans la soi-disant «île» comporte «le risque de violer les normes de sécurité contre les radiations et les incendies».
«Seul le retrait des Russes de la centrale et la création d’une zone de sécurité autour d’elle peuvent normaliser la situation à Zaporijjia. Ce n’est qu’alors que le monde pourra respirer», a déclaré vendredi Petro Kotin, le chef d’Energoatom, à la télévision ukrainienne.
Les combats se sont poursuivis vendredi dans certaines parties du sud et de l’est de l’Ukraine, et dans le nord, où l’Ukraine affirme avoir récemment repoussé les forces russes hors de certaines zones.
Des avions russes ont bombardé l’hôpital de la ville de Velika Pysarivka, à la frontière avec la Russie, a déclaré Dmytro Zhyvytskyi, le gouverneur de la région de Soumy. Il a dit que le bâtiment avait été détruit et qu’il y avait eu un nombre inconnu de victimes.
Quatre personnes ont été tuées dans des bombardements dans la région de Kharkiv, dont deux dans la ville de Kharkiv, la deuxième ville d’Ukraine, selon le gouverneur régional Oleh Syniehubov. L’Ukraine a affirmé cette semaine avoir repris le contrôle de plus de 20 colonies dans la région de Kharkiv, y compris la petite ville de Balakliya.
Des publications sur les réseaux sociaux montraient des habitants pleurant et souriant de Balakliya embrassant des soldats ukrainiens.
Dans la région de Donetsk à l’est — l’une des deux que la Russie a déclaré être des États souverains au début de la guerre — huit personnes ont été tuées dans la ville de Bakhmout au cours de la dernière journée et la ville est sans eau ni électricité pour la quatrième journée consécutive, a déclaré le gouverneur Pavlo Kyrylenko.