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Adieu GNL Québec, dit le gouvernement Legault

La Presse Canadienne|Publié le 21 juillet 2021

Adieu GNL Québec, dit le gouvernement Legault

(Photo: courtoisie)

Le projet Énergie Saguenay « ne pourra pas voir le jour » : c’est ce qu’a annoncé mercredi le ministre québécois de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Benoit Charette, en conférence de presse à Saguenay.

Le conseil des ministres a statué que le projet d’usine de liquéfaction de gaz naturel risquait de « défavoriser la transition énergétique », a expliqué M. Charette. Il a ajouté que ce projet était « risqué » sur le plan économique et avait « plus de désavantages que d’avantages ».

La décision a été saluée par le Parti québécois. « C’était la seule chose à faire, tant d’un point de vue climatique qu’économique. Maintenant, nous pourrons véritablement envisager des projets autrement plus rassembleurs », a affirmé en communiqué de presse son porte-parole en matière d’environnement, le député Sylvain Gaudreault.

Chez Québec solidaire, la députée et porte-parole en environnement Ruba Ghazal s’est réjouie par voie de communiqué d’un « gain solidaire et citoyen très important », tout en déplorant qu’on ait « perdu beaucoup de temps avec un projet polluant comme GNL Québec », au lieu de travailler sur des initiatives économiques vertes.

La Coalition Fjord, un regroupement citoyen qui milite pour la protection écologique du Fjord du Saguenay, a accueilli la nouvelle avec « soulagement », puisque le passage de paquebots transportant le gaz liquéfié aurait mis en péril la population locale de bélugas, déjà en voie d’extinction.

Une coalition d’organismes environnementaux, dont Greenpeace Canada, Équiterre et la Fondation David Suzuki, s’est également réjouie d’une « immense victoire citoyenne contre l’industrie fossile ». « Avec la mort de l’oléoduc Énergie Est en 2017, le recul de Goldboro LNG plus tôt ce mois-ci et le rejet de GNL Québec aujourd’hui, nous pouvons enfin envisager un avenir sans nouveau pipeline dans la belle province », a-t-elle fait valoir.

« L’ère des énergies polluantes et destructrices est révolue », a déclaré Patrick Bonin, de Greenpeace Canada, en entrevue téléphonique. Selon lui, le « virage à 180 degrés » du gouvernement caquiste, qui a longtemps soutenu le projet, « démontre une fois de plus que la population du Québec est un véritable mur qui bloquera tous les projets d’hydrocarbures ». « Au Québec, il faut miser sur l’efficacité énergétique et l’électrification des transports », a-t-il affirmé.

 

Débats sur l’environnement

L’objectif de l’usine était d’exporter par voie navale, chaque année, 11 millions de tonnes de gaz naturel provenant de l’Ouest canadien vers l’Europe et l’Asie, pour une période allant de 25 à 50 ans. Un gazoduc de 780 kilomètres de long devait aussi être construit par l’entreprise Gazoduq, afin d’acheminer le gaz de l’Ontario au Saguenay.

Une évaluation du Centre international de référence sur le cycle de vie des produits, procédés et services estime que l’usine aurait émis l’équivalent de 704 kilotonnes de CO2 par an. Cependant, si on inclut l’extraction, le transport et l’utilisation du gaz, ce nombre s’élèverait plutôt à 45 486 kilotonnes par année.

GNL Québec avait fait valoir que son projet permettrait au contraire de réduire le total des émissions de gaz à effet de serre de la planète, puisque son produit serait « une énergie de transition qui se substituera à d’autres énergies plus polluantes, telles que le charbon et le mazout », qui sont encore largement utilisés en Europe et en Asie.

Le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement était resté sceptique devant ces affirmations, prévenant le gouvernement qu’il « ne peut escompter des réductions nettes de GES au niveau mondial », et que la distribution de gaz naturel risquait au contraire de freiner la transition de certains pays vers des énergies renouvelables.

 

Occasion économique manquée pour le Saguenay

Les partisans du projet, dont un bon nombre d’entreprises locales, voyaient en Énergie Saguenay un moyen de revitaliser l’économie de la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean, considérée comme trop dépendante des usines d’aluminium et de la foresterie. Selon GNL Québec, l’usine aurait créé environ 6000 emplois durant sa construction, puis environ 1300 emplois durant ses années de service, en plus d’amener des retombées économiques de plusieurs milliards de dollars pour le Québec.

Le ministre Charette a voulu rassurer les résidants en rappelant « qu’il y a d’autres projets porteurs qui sont discutés ». Il a cité le développement au Saguenay d’un centre de recherche de l’entreprise ELYSIS, qui a développé une technologie pouvant produire de l’aluminium en relâchant moins de gaz à effet de serre. Certains acteurs du milieu craignent toutefois que cette nouvelle technologie entraîne des pertes d’emplois en usines.

Le président-directeur général du Port de Saguenay, Carl Laberge, rejoint par courriel, a partagé sa « déception » au sujet de l’annulation du projet de GNL Québec. « Il est extrêmement difficile de développer des projets industriels d’envergure en 2021 », a-t-il déploré. Il a cependant confirmé qu’il allait « continuer de travailler avec nos partenaires pour attirer et développer des projets porteurs ».

Cet article a été produit avec le soutien financier des Bourses Facebook et La Presse Canadienne pour les nouvelles.